Un peu plus à gauche que prévu depuis hier soir, le vent a permis aux duos de la Transat AG2R LA MONDIALE de mettre de l’ouest dans leur route cette nuit. C’est donc toujours en « escalier », au grès des oscillations du vent, que la flotte progresse vers Saint Barth. De ce fait, qu’ils soient décalés au nord ou au sud, les Figaro Bénéteau affichent des trajectoires relativement similaires bien qu’un peu décalées dans le temps. Mais force est de constater, ce matin, que les uns et les autres ne bénéficient pas strictement du même vent. A 5 heures, l’avantage, en termes de vitesse, est aux sudistes. La question : cela va-t-il durer ?

« On joue notre vent » lâchait, laconiquement, Charlie Dalin, ce matin à la vacation. Toujours peu enclin à dévoiler trop d’informations concernant sa progression et sa stratégie, le co-skipper de Cercle Vert, premier à avoir empanné hier, aux alentours de 19 heures, n’a pas détaillé les conditions dans lesquelles il navigue actuellement. Pour autant, à la lecture des positions, en particulier celle des vitesses et des caps de chacun, il semble plus que probable qu’il ne bénéficie pas exactement du même vent que ses concurrents plus au sud. Le fait qu’il y ait un peu de nord dans son ouest tend, en effet, à prouver qu’il compose avec un vent un peu plus à droite que les autres. Et pour la force ? A la même latitude, mais 45 milles derrière lui, Michel Bothuon (Les Recycleurs Bretons) annonçait tout à l’heure, entre 10 et 12 nœuds de vent tandis que plus au sud, Eric Péron (Nacarat) avouait toucher entre 12 et 15 nœuds. Ces petites différences d’orientation et de puissance sont palpables ce matin. En vitesse instantanée, les sudistes sont plus rapides d’un nœud. Mais le plus significatif reste la VMG (Velocity Made Good), comprenez la vitesse de rapprochement par rapport au but. Là encore, avantage aux sudistes. Difficile cependant de tirer des conclusions maintenant. « Les données météo que nous avons depuis deux jours sont assez peu fiables. A chaque nouveau fichier, c’est un nouveau scénario qui s’annonce » a souligné Eric Péron. S’il peut, avec Erwan Tabarly, se féliciter de s’être construit un joli petit matelas d’avance – 25 milles – sur le gros de la flotte au sud, il ne cache pas une petite inquiétude concernant le positionnement de Gildas Morvan et Charlie Dalin. « Ca nous dérange un peu de les voir décalés de 70 milles au nord, 30 milles devant nous par rapport à la distance au but. Leur situation est risquée mais si elle passe, elle peut payer fort ». C’est certain, le tandem de Cercle Vert a fait un sacré pari. Gain ou perte à venir ? Il va falloir être encore un peu patient pour le savoir. Cette nuit en tous les cas, les conditions l’ont contraint à se rapprocher un peu plus de l’anticyclone et donc, de la zone de molle. Pas étonnant qu’il se prépare à un nouvel empannage pour tenter de trouver plus de pression au sud. Idem pour ses adversaires. Certains, comme Sepalumic ou Bretagne Crédit Mutuel Performance, ont déjà replongé, vers 5 heures, pour entamer un nouveau bord bâbord amure. Un bord qui devrait durer une douzaine d’heures… et livrer quelques premières vérités sur les positionnements de chacun.

Ils ont dit :

Charlie Dalin (Cercle Vert) :

« On a empanné hier en fin de journée. On joue pas mal avec le vent. On fait route vers l’ouest mais on ne sait pas trop combien de temps çà va durer. Le vent est rentré hier en fin d’après-midi, on est plutôt parti sur du tribord. A chaque mise à jour du fichier on a un scénario différent. On fait au mieux. Actuellement on est sous spi dans un vent de secteur est, on glisse bien, on est entre 7 et 8,5 nœuds. On a à peu près les mêmes conditions que les autres. On enchaîne les heures à la barre vers Saint Barth. Pour les prochains jours, la tendance risque d’être la suivante : au moment où on partira vers Saint Barth, le vent va monter en force très vite avec des alizés de 25-30 nœuds. Cà risque de souffler fort en milieu de semaine prochaine. En attendant on est abonné à un vent qui est toujours assez irrégulier, ce qui demande plus d’attention à la barre surtout la nuit. De toute manière on commence à être habitué à ces variations, on s’y fait ! »

Eric Péron (Nacarat) :

« Le vent est un peu plus à gauche que prévu ce qui nous autorise une route plus ouest. Tant mieux. Les fichiers ne sont pas très fiables en ce moment, je ne sais pas pourquoi. Les stratégies sont donc un peu difficiles à mettre en place. On a entre 11 et 15 nœuds. Ce n’est pas hyper venté mais c’est un poil plus lisse, le bateau avance mieux. On a une superbe nuit avec une belle pleine lune, c’est assez agréable. Le spi ne se détend pas, çà glisse bien. Derrière nous on un gros paquet de la flotte à 25 milles au plus près, ce qui nous autorise un petit matelas confortable. Ce qui nous embête, à 30 milles plus au nord par rapport à la route directe, c’est toujours Cercle Vert qui est en position dérangeante parce qu’il est devant et un peu mieux positionné si la météo reste comme elle nous le montre en ce moment. Mais si l’anticyclone gonfle, et s’il se fait happer par des vents plus mous, là çà risque d’être dangereux pour lui. On regarde les vitesses, on consulte les cartes pour voir la vitesse qu’il a. On pense qu’il a un peu moins de vent que nous. Globalement on a l’anticyclone qui est très proche de nous, il s’est un peu écrasé et il s’est éjecté vers l’est. On va avoir un passage d’accalmie mais qui sera vite remplacé par un autre anticyclone sur la fin du parcours et un retour des alizés assez soutenus. En gros en ce qui concerne notre stratégie, nous allons faire ce que nous pouvons jusqu’à cet autre anticyclone, on va jouer des bascules et se positionner pour l’arrivée des alizés. »

Michel Bothuon (Les Recycleurs Bretons) :

« On a eu une petite rotation hier en fin d’après-midi. Le vent se ballade pas mal. On a entre 10-12 nœuds de vent, ce ne sont pas franchement des alizés. Nacarat navigue très bien mais je ne vois pas le reste de la flotte donc je ne tire pas de conclusions. En tout cas j’aimerais bien retourner sur la bretelle de déviation. On ne devrait pas tarder à empanner pour éviter de se retrouver dans la molle.»

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