L’équipage de Pen Duick VI a bouclé la deuxième étape de l’Ocean Globe Race mardi dernier, en 2e position en temps réel, après 37 jours de mer : « C’était une belle étape, longue et frustrante pour nous en termes de résultat et de découverte du grand sud, que nous n’avons qu’effleuré, mais cela ne fait que décupler notre envie d’y retourner ! », résume Marie Tabarly, capitaine de Pen Duick VI, à son arrivée à Auckland. Le départ de la prochaine étape, la plus courte et la plus sud de toute, est prévu dans un mois. Pourtant, à peine arrivés, Marie et ses « guerriers » ont déjà hâte d’y être !

Après avoir mené haut la main la première partie de cette longue étape entre l’Afrique du Sud et la Nouvelle Zélande, l’équipage de Pen Duick VI, piégé à mi-parcours dans des vents faibles et contraint d’opter pour une route nord bien trop loin des 50e hurlants qu’ils auraient tant voulu affronter, a dû céder son leadership à leurs redoutables concurrents et amis Italiens de Translated9.

Mais le tour du monde n’est pas terminé. Marie Tabarly et son équipage ont désormais une sorte de revanche à prendre, pas tant vis-à-vis de leurs concurrents, mais plutôt contre les éléments, pour avoir le plaisir de découvrir, vraiment, cette fois, la rudesse et la magie du grand sud.
D’ici là ils vont pouvoir décompresser de cette 2e étape moralement éprouvante.
Pen Duick VI a lui aussi besoin de quelques réparations, mais « vraiment rien de grave » souligne sa capitaine.

La Nouvelle Zélande, terre de marins, notamment, saura les accueillir et leur apporter de quoi se ressourcer, se réparer après cette, malgré tout, très belle 2e place en temps réel !

Retour sur ces 37 jours et 37 nuits de course, à l’ancienne, entre Cap Town et Auckland

Marie Tabarly : « Le départ était vraiment génial ! On était bord à bord avec Translated 9, comme en régate, à 2m l’un de l’autre. On était tous au taquet, on se défiait. C’était drôle !
Nous avons rapidement pris le lead de la course, attaqué notre descente vers les iles Crozet. Pas de grosses conditions : 20 – 30 nœuds maximum. Ça a déroulé, sans grosse option stratégique. »

Loin devant à mi-parcours
« A peu près à mi-parcours de l’étape, nous avons tous dû remonter assez nord (jusqu’au 45° Sud) pour respecter le waypoint de la course.
Nous avions alors 400 milles d’avance sur Translated 9 et 3,5 jours sur Maiden et Spirit of Helsinki. C’était une belle satisfaction parce que nous n’avions pas encore exploité tout le potentiel de Pen Duick VI qui se démarque vraiment des autres dans la grosse brise. Nous nous disions que nous avions encore de quoi allonger… »

Piégés au Nord
« Après le waypoint le vent s’est orienté au sud-sud-est : impossible de redescendre vers les 50e. Et, 48h plus tard, une bulle anticyclonique colossale a gonflé devant nous. Impossible d’essayer de la traverser. Il ne faut pas oublier que nous ne disposons que de cartes isobariques et, encore, quand on en a ! Pas de champs de vent, rien.
Nous n’avions clairement pas d’autre choix que de partir sur une route nord et là, nous nous sommes fait piéger. »

Lions en cage
« Ça a été trois semaines d’une longue agonie. Surtout que nous savions que Translated9 avait réussi à passer dans le Sud. L’anticyclone avait glissé devant eux. Nous étions comme des fous.
Dès que possible, nous avons essayé de redescendre dans le sud de la Tasmanie, pour rejoindre la flotte et des conditions météo musclées favorables à Pen Duick VI… Et là, rebelote, bloqués par une zone sans vent. Notre seule échappatoire était le Détroit de Bass. »

Un beau final !
« Au final, nous sauvons les meubles. Je n’ai pas encore débriefé avec des routeurs à terre pour savoir s’il y aurait eu d’autres routes possibles. En tous cas, nous sommes bien revenus sur Translated 9 à la fin. »

Aperçu du grand sud

De la lave dans les veines
« Il y a une super ambiance à bord. J’ai une équipe de rêve, une bande de guerriers : ce n’est pas du sang qu’ils ont dans les veines, c’est de la lave ! Ils sont tous prêts à aller dans le sud et vivre dans des conditions rudes. Nous avons juste effleuré le grand sud, dans seulement 30 nœuds, navigué un peu avec les albatros.
Nous étions venus chercher quelque chose de plus engagé, même si nous avons quand même vu les Kerguelen, des nuances de gris incroyables, des mers magnifiques… »

Le danger est partout
« Tu sens que tu n’es pas le bienvenu et que ça peut vite partir en vrille. Le froid est là, qui guette. Autour de toi le danger est partout. Tu es en sécurité sur le bateau. Dans l’eau, tu n’as aucune chance.
C’est surtout la température de l’eau qui est impressionnante. Il est par exemple difficile de s’hydrater elle est trop froide. Il y a de la condensation partout, tout est humide… mais ce sera beaucoup plus froid encore sur la prochaine étape : nous allons aller beaucoup plus sud. »

Anecdotes

Pen Duick VI furtif
« Dans un gros départ à l’abatée, de l’eau de mer a mis le micro de BLU hors service : nous ne pouvions plus émettre, mais nous entendions les autres. Donc, depuis la sortie du détroit de Bass jusqu’à l’arrivée, nous étions en mode « ghost » : nous savions où ils étaient, mais pas eux.
Translated 9 ne savait pas qu’ils étaient en tête et Spirit of Helsinki a su que nous étions devant eux seulement 2h avant l’arrivée ! C’était assez drôle d’être en sous-marin. Ce n’était sans doute pas très confortable pour les autres, mais nous n’avions pas le choix. »

La météo pour tous by Marie
« Floreal, frégate de surveillance de la Marine française a envoyé des informations météo par BLU aux bateaux français de la flotte, sur la première partie de la course. Je traduisais ces bulletins en anglais et je les transmettais au reste de la flotte. Je crois qu’il n’y a pas beaucoup de course où ça se passe comme ça ! »

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