Groupama 4 victorieux à Auckland
Quelques heures avant de prendre le départ de cette 4ème étape, il y a près de 3 semaines, Franck Cammas n’avait pas caché ses intentions d’attaquer sur cette manche capitale : « Nous sommes quasiment à mi-parcours de la Volvo Ocean Race : c’est un moment important parce que nous sommes dans le vif du sujet. Les Espagnols de Telefonica peuvent prendre un ascendant très fort s’ils font un nouveau résultat à Auckland ! C’est une occasion à ne pas manquer de revenir sur eux au score. »
C’est fait ! Franck Cammas et ses hommes ont arraché à la force du poignet leur première victoire d’étape dans cette 11ème édition de la Volvo Ocean Race. En 37 ans de l’histoire de cette course, c’est la seconde victoire tricolore à Auckland, sur les 8 escales de la course dans cette ville. Le premier de cordée avait été Alain Gabbay et son équipe de 33 Export en 1978, en temps compensé.
Il s’en est pourtant fallu de peu pour que cette victoire française ne tombe à l’eau au sens propre du terme, puisque quelques heures avant de franchir la ligne, Groupama 4 annonçait au PC terre que l’équipage avait découvert une importante voie d’eau dans la compartiment avant du bateau. Une avarie heureusement rapidement mise sous contrôle après de 2 heures de pompage intensif sans doute due à un contact avec un OFNI, (objet flottant non identifié) et un avant quelque peu fragilisé par les nombreux chocs encaissés pendant d’interminables journées de près sur une mer agressive.
Avant le départ, Franck savait ce qui les attendait sur cette étape et ils ont été servis jusqu’à cette voie d’eau qui aurait pu leur être fatale à quelques heures de l’arrivée : « Nous allons avoir des vents forts de face, ce qui est statistiquement normal en cette saison en mer de Chine, et on est un peu tendu. Le bateau va souffrir.. il y aura pas mal de mer. » Prémonitoire.
Cette 4ème étape avait commencé de façon musclée, puisque le départ initialement prévu le dimanche 19 février avait été reporté au lendemain en raison un avis de tempête sur les 600 milles qui menaient à l’incontournable détroit de Luçon, porte d’entrée dans le Pacifique.
C’est donc par un bref parcours côtier de 43 milles devant Sanya que les 6 concurrents avaient commencé cette étape de 5 220 milles avant de rentrer s’abriter dans le port de Sanya pendant une douzaine d’heures, le temps que les conditions en mer de Chine s’appaisent un peu.
Au petit matin du lundi 20 février, les concurrents ont pris un départ décalé (suivant leur ordre d’arrivée et leur écart en temps, à l’issue du parcours côtier de la veille). Groupama partait donc en 2ème position, après Telefonica qui s’était une nouvelle fois brillamment distingué la veille.
Après 4 jours de course, la flotte franchi le détroit qui sépare Taïwan des Philippines, soulagée d’en avoir fini – pour un moment – avec des conditions particulèrement éprouvantes. Groupama, qui n’est pourtant pas supposé être particulièrement à l’aise au près, sort en 2ème position de ce salon de brassage chinois.
Les concurrents prennent alors une route Nord-Est, cap au 100°, ce qui les met à 300 milles au-dessus de la route directe, mais en bonne position pour retrouver le régime de mousson.
Au 6ème jour de course, Yann Riou, le MCM de Groupama, écrivait amusé mais confiant dans la tactique Nord-Est de Cammas et Nélias, le navigateur d’un Groupama 4 mené par Camper, le leader du moment : « Portant, spi, vent médium et ciel bleu pour changer un peu. Ça pourrait être très sympa, mais quand on jette un oeil à la carto, c’est une autre histoire ! On fait route au nord-est… Disons que si on allait à Tokyo, on serait bien, mais pour Auckland, on n’est pas vraiment sur le chemin ! »
Au 8ème jour de course, Groupama a pris les commandes pour ne plus les lâcher jusqu’à la fin. Puma, qui a été le dernier à mettre cap au sud-est, est alors en 2ème position grâce aux vents de secteur Nord qui ont permis aux Américains d’incurver en douceur leur route atypique.
Groupama file au reaching. Sa vitesse de prédilection. Mais les conditions ne sont pas confortables. Pluies dilluviennes à répétition, mer chaotique, pont balayé par les paquets de mer, les yeux qui brulent.
Et enfin, arrive un flux de Nord-Nord-Est plus régulier qui favorisent les concurrents de la route Est qui touchent les alizées plus rapidement. Le soleil est de retour.
Au 9ème jour de course, l’équateur est encore à 1 500 milles. Les concurrents restent assez regroupés dans les classements intermédiaires calculés en distance par rapport au but, mais c’est leur position géographique qui va faire la différence, même si les 6 Volvo Open 70 bénéficient à ce moment de la course des même conditions météo : un flux stable de N-N-E d’une vingtaine de nœuds. Les vitesse s’affolent sous un soleil lumineux. Les hommes envoient des messages enthousaistes à terre : « C’est pour cela que nous faisons cette course ». Et pourtant le pont est toujours balayé par les paquets de mer. Le port du casque est presque incontournable pour éviter que les yeux ne soient attaqués par le sel marin.
Le record de vitesse des 24h ne tombera pourtant pas sur cette étape. Puma a affiché 523 milles. On est loin du record d’Ericsson 4 en 2008-2009 avec ses 593,23 milles.
Vendredi dernier la flotte franchissait enfin l’équateur. Groupama mene toujours les débats. Après la chevauchée fantastique, le pot au noir qui même peu actif sur zone compliquera un peu la tâche des navigateurs.
Pour Cammas, Nicholson et Read, cap à l’Est, à nouveau pour descendre le long des îles Salomon, alors que Telefonica suivi par Abu Dhabi et Sanya coupent le fromage et passent entre les îles. Le « Jugement de Salomon » renvoie, comme dans la Bible, les deux parties dos à dos. 15 partout. Groupama peut respirer, il garde un peu d’avance sur son rival direct, Telefonica, que les Français savent pouvoir désormais aller chercher au classement général.
Au cours des 3 derniers jours de course, Groupama voit enfn poindre le réel espoir d’une victoire d’étape. Et quelle étape. Sans doute la plus symbolique, dans la ville qui représente la cour des grands de la voile mondiale. Auckland. Mais mardi dernier Cammas restait prudent, car le vent arrive de l’arrière et les écarts entre les concurrents se resserrent : « « Être en tête de cette étape donne évidemment le moral, mais ce n’est pas l’autoroute pour terminer…. Rien n’est donc acquis, même avec une avance de plus de cent milles. »
Mais le timing sera finalement favorable aux Français qui remportent une magnifique victoire d’étape à Auckland après plus de 19 jours de mer. Pas mal pour une première participation du Groupama sailing team dans cette Volvo Ocean Race. Et une petite revanche du la Coupe du Monde de Rugby…
Au moment où Groupama 4 franchissait la ligne d’arrivée, la bataille fait toujours rage pour la déclinaison du podium final de cette 4ème étape entre Puma, Telefonica, et le local de l’étape Camper. Avec Abu Dhabi et Team Sanya qui n’ont pas encore dit leur dernier mot.
Au pointage de 11h
2 – Puma à 130,7 milles de l’arrivée
3 – Telefonica à 136 milles
4 – Camper à 137,7 milles
5 – Abu Dhabi à 153 milles
6 – Team Sanya à 174,6 milles