Bienvenue au « Antoine Koch Show »
Après 10 jours d’une intense course poursuite sur l’Atlantique, il est temps de parler d’Antoine Koch. Le marin occupe actuelle la troisième place du classement général à bord For The Planet, aux côtés du skipper Sam Goodchild, mais Antoine est aussi le co-designer des deux seuls bateaux qui les précèdent – For People et Paprec Arkéa.
Les plans Koch-Finot Conq, menés respectivement par Thomas Ruyant/Morgan Lagravière et Yoann Richomme/Yann Eliès, devancent donc le tandem Goodchild/Koch dans les alizés, en direction de la Martinique.
Ce jeudi, For People avait encore 1 190 milles à parcourir. Paprec Arkéa n’était qu’à 25 milles de son tableau arrière et For The Planet (l’ex-LinkedOut), à 70. Un podium provisoire intéressant pour le designer-marin dont nous avons pris des nouvelles afin de savoir s’il appréciait ce qui ressemble à un véritable « Antoine Koch Show ».
« Je suis évidemment heureux de voir les deux bateaux en tête de flotte », confie-t-il à la Classe. « C’est formidable de voir qu’ils sont performants dans ces conditions de course. Très souvent, pendant les entraînements d’été en Bretagne, vous avez un plan d’eau plat avec un vent moyen et vous ne naviguez qu’au près ou au portant. Vous n’avez donc pas une vision réelle. »
« C’est pourquoi, c’est positif de voir qu’ils se comportent bien en conditions de course, que ce soit dans des vents forts comme au départ et au portant dans les alizés comme maintenant. Cela est prometteur pour l’avenir de ces bateaux », poursuit-il. « D’autant plus qu’ils sont surtout conçus pour des vents portants plus forts et que nous n’avons eu que des alizés modérés jusqu’ici. Ils semblent déjà être assez rapides, avec la capacité de naviguer peut-être un peu plus bas que les autres. »
Antoine Koch note néanmoins que Charal, sixième ce soir avec Jérémie Beyou et Franck Cammas et qui a mené de façon impressionnante le début de course, semble ne plus pouvoir naviguer à son plein potentiel en raison de quelques problèmes techniques. Il rappelle aussi qu’il manque une autre pièce maîtresse du puzzle IMOCA : MACIF Santé Prévoyance de Charlie Dalin, absent du plan d’eau actuellement.
Quatre places derrière Sam Goodchild et Antoine Koch, le skipper allemand Boris Herrmann sur Malizia Seaexplorer, se dit impressionné par les deux nouveaux sisterships qui mènent la charge vers Fort-de-France. « Je dirais que malgré leur manque de milles, ils s’en sortent très bien sur cette course », commente-t-il aujourd’hui. « Un grand compliment aux designers, aux équipes et aux marins. Ils ont une longueur d’avance sur tout le monde, ce qui est évident. Des bateaux fantastiques ».
Boris, qui navigue avec le Britannique Will Harris, ajoute qu’il espère toujours que son propre IMOCA, qui a beaucoup voyagé depuis sa mise à l’eau l’été dernier, soit capable de rivaliser avec les plans Koch-Finot Conq dans le Grand Sud lors du Vendée Globe, l’hiver prochain. « J’espère nous aurons un avantage dans les vents portants très forts et dans la grosse mer », précise-t-il.
L’élément intéressant de la bataille en tête de flotte est la manière dont Thomas Ruyant et Morgan Lagravière ont réussi à garder l’avantage sur Yoann Richomme et Yann Eliès. Thomas Ruyant qui fait tout aujourd’hui pour aller chercher un remarquable triplé de victoires, après celle de la Transat Jacques Vabre 2021, puis de la Route du Rhum 2022 – et sur deux IMOCA différents ! « Nous manquons un peu de vitesse par rapport à Thomas », admet Yoann Richomme. « Nous apprenons à connaître le bateau, mais il nous manque certainement des connaissances pour qu’il aille aussi vite que celui de Thomas. Mais nous apprenons tous les jours et c’est intéressant de naviguer avec Yann, en partageant à chaque quart ce que nous avons découvert ».
Sam Goodchild se régale sur cette course durant laquelle Antoine et lui ont surmonté des problèmes de grand-voile puis d’instruments de mesure du vent, avant de réussir à se hisser dans le trio de tête, dans les alizés. Le marin de Falmouth confie qu’il n’a pas de plan secret pour dépasser les deux Koch-Finot Conq devant, ni pour se défendre contre les bateaux qui poussent fort derrière. Il s’agit simplement de naviguer « proprement », comme il le dit, jusqu’à l’arrivée.
« La flotte est évidemment très serrée et il n’y a donc pas de place pour la moindre erreur, et ce serait d’ailleurs une erreur d’essayer d’être gourmand et d’aller chercher les deux bateaux devant, avec le risque de finalement perdre encore plus de places. Pour l’instant, il s’agit donc d’essayer de faire ce qu’il faut et de saisir la moindre opportunité qui pourrait se présenter », explique-t-il.
Sam Goodchild ne sait pas comment cela va finir avec la Suissesse Justine Mettraux et le Français Julien Villion, en approche par le nord, à bord de Teamwork. Actuellement en cinquième position à seulement 60 milles du leader, le duo navigue 1000 milles plus au nord !
« Nous gardons un œil sur eux », poursuit Sam. « C’est difficile à dire. Sur le papier, ils sont une menace, mais on ne sait pas comment ils vont traverser la mer formée par la grosse dépression qu’ils contournent actuellement, donc nous surveillons et c’est certain que l’arrivée va être serrée ».
Boris Herrmann se montre aussi particulièrement élogieux à l’égard de Justine Mettraux qui, selon lui, réalise « un job extraordinaire ». Il l’a décrit comme « l’une des meilleures navigatrices de la flotte et l’une des plus courageuses », qui prouve à nouveau son sens marin et sa ténacité.
« Justine a été la première à faire le pas vers l’ouest. Elle a été convaincue par elle-même et n’a pas suivi le groupe et elle mériterait de gagner cette course pour cela », déclare-t-il sans détour. « Et c’est encore possible, je pense. Nous espérons qu’elle passera bien cette dépression. Bien sûr, nous espérons être légèrement devant elle et tout dépendra ensuite des oscillations du vent et d’un peu de géométrie ».