Un podium conforme aux pronostics
A l’issue du premier acte de la 24e édition de La Boulangère Mini Transat entre Les Sables d’Olonne et Santa Cruz de La Palma, les neuf premiers Proto du classement provisoire se tenaient en moins de 4h15. Pas grand-chose à l’échelle d’une transatlantique. C’est donc quasiment avec les compteurs à zéro que les uns et les autres ont attaqué le deuxième volet de l’épreuve à destination de Saint-François. Très vite, deux options se sont dessinées. On a d’abord cru à l’une, puis à l’autre, mais au final ce sont avant tout les vitesses et les angles qui ont fait la différence. Le niveau d’engagement des marins aussi. A l’arrivée, peu ou pas de surprises. Ceux que l’on attendait ont répondu présents. La preuve, les deux grands favoris, Federico Waksman (1019 – Repremar – Shipping Agency Uruguay) et Carlos Manera Pascual (1081 – Xucla), ont terminé premier et deuxième en Guadeloupe, et dans le même ordre au classement général. La troisième place, elle, est restée disputée jusque dans les dernières longueurs, et si Marie Gendron (1050 – Léa Nature) a complété le podium d’étape, elle a toutefois concédé cette même place à Julien Letissier (1069 – Frérots Branchet) au classement de l’épreuve (avant jury) pour seulement 29 petites minutes !
« La Mini Transat, ce n’est pas juste une course contre les autres, c’est avant tout une épreuve contre soi-même. Il faut véritablement puiser très loin dans ses réserves pour réussir à aller au bout », a commenté Federico Waksman (1019 – Repremar – Shipping Agency Uruguay) à son arrivée. De fait, si la première étape s’est révélée exigeante, la seconde a imposé un engagement total. Hors-normes. Et pour cause, elle s’est majoritairement jouée dans des conditions soutenues, mettant ainsi à rude épreuve à la fois les organismes et les machines. « On savait que ce serait avant tout une course d’endurance. Il a constamment fallu rester concentré sur le bateau pour ne rien casser », a confirmé Marie Gendron (1050 – Léa Nature). Elle, comme les autres leaders, a imprimé une très grosse cadence sur les 2 700 milles du parcours, et tenu des vitesses particulièrement élevées, flirtant régulièrement avec les 14-15 nœuds de moyenne. Dans ce contexte, il y a évidemment eu des sorties de pistes, quelques figures de style… et un peu de casse. « Dans ce type d’exercice, que l’on vienne pour gagner ou non, le premier objectif est de réussir à aller au bout », a ajouté le grand vainqueur de cette 24e édition de La Boulangère Mini Transat (avant jury) qui savait qu’il n’avait en aucun cas le droit à l’erreur lors de ce deuxième round. Avec un retard de 4h14 cumulé à l’issue du premier, il n’avait pas d’autre choix que de finir devant ses adversaires et, en prime, de les reléguer à une certaine distance.
Federico Waksman entre dans la légende de la course
Auteur d’un judicieux décalage au sud après une première option plutôt nord après le débordement de El Hierro, le navigateur s’est alors installé aux commandes de la course le 2 novembre dernier et ne les a ensuite plus jamais lâchées malgré les attaques répétées de Carlos Manera Pascual (1081 – Xucla) qui l’a ainsi mis sous pression jusque dans les derniers milles, à tout le moins jusque dans les 250 derniers. « C’est à ce moment-là que j’ai commencé à réaliser que ça sentait bon et que si je gérais bien ma fin de course, je filais tout droit vers la victoire », a indiqué l’Uruguayen qui n’a pas failli, franchissant la ligne d’arrivée avec une avance de plus de 80 sur son adversaire direct et décrochant, du même coup, la première place au général (avant jury). « Pour moi, c’est un véritable accomplissement. Je suis si heureux ! Il y a deux ans, j’avais pleuré en franchissant la ligne d’arrivée. Cela a de nouveau été le cas cette fois, mais pas pour la même raison ! », a détaillé le navigateur qui, pour mémoire, avait terminé à une décevante 21e place en bateau de Série lors de la dernière édition. « Je ne pouvais pas espérer mieux mais c’est le résultat de beaucoup de travail. Comme l’ensemble des autres concurrents, j’ai construit ce projet sur plusieurs années. Cela a été énormément d’investissement et autant de sacrifices. Participer à la Mini Transat ne se résume pas à barrer un bateau, c’est bien plus que cela ! », a rappelé le navigateur qui succède donc à Pierre Le Roy au palmarès de l’épreuve – à la barre du même bateau – et rentre également dans la légende de la course en devenant le premier représentant de son pays, le premier Sud-Américain et le septième étranger à réaliser une telle performance (catégories Proto et en Série confondues) après l’Américain Norton Smith en 1979, le Belge Laurent Vancutsem en 1993, le Suisse Yvan Bourgnon en 1995, le Belge Peter Laureyssens en 2005, le Portugais Francesco Lobato en 2009 puis l’Italien Ambrogio Beccaria en 2019.
Un sentiment de fierté pour tous
« Je suis fier car l’une de mes ambitions, au-delà d’un résultat, était de contribuer à populariser la course au large chez moi », a ajouté Federico Waksman, auteur d’un presque sans-faute cette saison avec six courses courues et autant de podiums, et premier avec plus de quatre heures de marge sur son dauphin. « Finir deuxième au classement général, même si je visais la première place, c’est malgré tout très satisfaisant. Je n’oublie pas qu’il y a un an tout pile, j’étais seulement en train de finir de construire la coque de mon bateau. On s’est livré une belle bagarre avec Fede. Celle-ci a pris un autre tournant lorsque j’ai cassé mon balcon arrière. J’ai alors perdu pas mal de terrain et ensuite c’est devenu difficile de revenir. Pour finir, je n’ai pas grand-chose à me reprocher. J’ai globalement fait les choses proprement », a résumé l’Espagnol qui s’est, certes, fait un peu fait distancer par le leader, mais qui a nettement devancé le duo Marie Gendron -1050 Léa Nature) et Julien Letissier (1069 – Frérots Branchet). Un duo qui s’est battu jusque dans les derniers milles pour la troisième place, de l’étape mais aussi du classement overall. « Je suis restée focus en me disant que tant que la ligne n’était pas franchie, tout pouvait encore arriver. On a d’ailleurs pris des grains énormes lors de la dernière nuit. Il n’y avait même pas moyen de tenir un spi tellement ça partait dans tous les sens. Julien (Letissier) a perdu son aérien et il a pété des trucs. Pour ma part, j’ai joué la carte de la prudence mais jusqu’à la fin, c’est clairement resté une épreuve ! », a assuré la navigatrice qui s’est finalement emparée de la troisième place de l’étape, mais qui a concédé la troisième marche du podium au général à son rival pour seulement 29 petites minutes. « Je ne m’attendais pas à conserver ma place sur le podium. Comme sur la première étape, j’ai réussi de nombreux petits coups mais il y en a plein que j’ai raté. Reste qu’à l’arrivée, il y a un immense sentiment de fierté et c’est bien ce qui compte ! », a terminé le marin. Assurément !