Ce mardi, alors qu’elle est passée sous la barre symbolique des 1 000 restant à parcourir, la flotte de la 24e édition de La Boulangère Mini Transat compose avec des alizés quelque-peu instables. De ce fait, les vitesses des solitaires ont un peu chuté et l’avantage reste à ceux qui se trouvent dans l’axe de la dorsale, au plus près de la route directe. Ces derniers profitent, comme depuis ces dernières 36 heures, d’un angle de progression plus favorable et creusent doucement mais sûrement l’écart sur la concurrence alors que les premières arrivées se précisent. Elles sont en effet attendues dans la journée de vendredi, à Saint-François. Restent que les derniers milles ne s’annoncent pas si simples d’autant que la fatigue accumulée depuis dix jours maintenant commence à peser lourd sur les organismes et sur les machines, en témoignent la multiplication des avaries.

Alors qu’ils étaient franchement solides depuis cinq jours, les alizés sont un peu moins consistants mais surtout assez instables, ce mardi. Résultat des courses, les vitesses des marins de La Boulangère Mini Transat, qui oscillaient entre 9 et 14 nœuds, varient actuellement entre 5 et 10 nœuds. Seuls Federico Waksman (1019 – Repremar – Shipping Agency Uruguay) et Carlos Manera Pascual (1081 – Xucla) continuent de cavaler à plus de 12 nœuds. Positionnés dans l’axe de la dorsale, ces deux-là profitent d’un angle de descente presque idéal. Idem, chez les bateaux de Série, pour Luca Rosetti (998 – Race = Care) qui a nettement recroisé devant Félix Oberlé (1028 – Mingulay) et Hugues de Prémare (1033 – Technip Energies – International Coatings) ce matin, et capitalise à présent une avance sur eux de plus de 30 milles. « Ceux du nord s’en sortent bien. Ils font une route un peu serrée par rapport au vent – ils ne sont pas plein VMG -, ce qui leur permet de lofer un peu et d’être plutôt rapides », détaille Christian Dumard, le consultant météo de l’épreuve dont les derniers routages sont un peu moins optimistes que ceux des jours précédents, et laissent envisager les premières arrivées en Guadeloupe dans l’après-midi, voire dans la soirée du 10 novembre (heure de Paris), plutôt que dans la nuit du 9 au 10. « Dans les prochaines 48 heures, le vent va faiblir autour de 12-13 nœuds puis se réorienter davantage à l’est. Il promet d’être assez variable ce qui ne sera pas si simple à gérer pour les solitaires, mais il est prévu de se renforcer de nouveau aux abords de la Guadeloupe », promet le spécialiste.

La lucidité a un peu de plomb dans l’aile
Dans ce contexte, il faudra donc savoir faire preuve de concentration. Reste qu’avec toute la fatigue accumulée depuis le départ de Santa Cruz de La Palma le 28 octobre dernier, le niveau de lucidité des solitaires n’est certainement plus à son maximum. Preuve en est : le nombre de petits pépins techniques rapportés ces dernières 24 heures. Casse de cloche de bout dehors pour Laure Galley (1048 – DMG MORI Sailing Academy 2), casse son vit-de-mulet et de grand-voile pour Josep Costa Fah (431 – Tip Top Too), casse de safran et/ou de bout-dehors pour Gaby Bucau (865 – Maximum), Victor Mathieu (967 –Celeris Informatique), Uros Kruševac (Ashika II), Arnaud Rambaud (850 – Permis de Construire – ACIEO) ou encore Xavier Condroyer (848 – Elypso – Nitby 848), pour ne citer que ces exemples. Comment expliquer toutes ces avaries, en particulier celles de safrans qui sont plutôt nombreuses ? « Si elles ne sont en lien avec un choc avec un OFNI (objet flottant non-identifié) elles le sont très probablement avec les moyennes hallucinantes que certains ont tenus ces derniers jours. Le niveau d’exigence et d’engagement de cette édition 2023 est, il faut le dire, assez incroyable. De plus, il apparait clair que les alizés ont en réalité été plus forts que sur les fichiers. Ils ont manifestement été assez costauds et c’est pourquoi on a vu des records tomber », note François Jambou, le vainqueur de l’épreuve en prototype en 2019 qui s’étonne néanmoins du nombre d’appendices endommagés.

Réussir à se montrer solide mentalement jusqu’à la fin
« En Proto, les safrans sont relevables, ce qui permet normalement de diviser par deux le risque de casse. Cela étant dit, lorsque que ceux-ci remontent, cela peut rapidement engendrer d’autres casses. Au portant, lorsque le bateau part à l’abatée ou au lof, ça peut clairement vite devenir un peu dangereux. Ce que l’on peut dire aujourd’hui, c’est qu’il y aura des enseignements à tirer de tout ça à l’arrivée », note le navigateur. Ce qu’il pense du match qui se joue actuellement sur l’eau ? « On a cru à l’option nord, puis à l’option sud or ce sont finalement les vitesses et les angles de descente qui font la différence sur cette deuxième étape, plus que les stratégies », relate l’ancien Ministe qui confirme qu’à ce stade de la course, les bonshommes commencent à puiser franchement dans leurs réserves. « Dans cette course de vitesse, ce sont les plus solides mentalement et physiquement qui vont finalement faire la différence. Il va être intéressant de voir comment ça se termine. L’atterrissage sur Saint-François est, entre guillemets, plus simple que celui sur Santa Cruz de La Palma, car il n’y a pas de gros dévents, mais tant que la ligne n’est pas franchie, on sait bien que tout peut arriver », termine François Jambou.

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