Faire plus pour la mixité dans la course au large
Jeux Olympiques, Ocean Race, Transat Paprec, le virage de la mixité a été enclenché dans les différents supports de voile et de course au large. A leur suite, la Classe Mini s’engage elle aussi dans cette démarche, avec l’inscription au calendrier d’une course mixte la Plastimo Lorient Mini (départ le 13 avril prochain).
Si l’annonce de ce choix a suscité des débats et questionnements nombreux de la part des adhérents, soulignant par là-même de la complexité du sujet mais aussi, peut-être, sa pertinence, la Plastimo Lorient Mini fait aujourd’hui le plein d’inscriptions avec 80 équipages mixtes engagés, un début encourageant pour Jean Marre, le président de la Classe Mini.
La mixité inhérente à la Classe Mini
La mixité, la Classe Mini la vit au quotidien depuis sa création. Rappelons en préambule que la course au large est un des rares sports non genré avec, à chaque arrivée, un seul classement sans distinction de sexe. Accessible par essence avec ces “petits” bateaux maniables, ne nécessitant pas de déployer la force d’un demi de mêlée pour faire tourner les winch ou envoyer les voiles, au budget encore raisonnable, la Classe Mini a toujours constitué une porte d’entrée privilégiée à la course au large, pour tous les publics y compris celui des femmes. Historiquement, c’est donc LA classe de course au large qui accueille le plus de femmes avec 15% de skippers adhérentes cette année ; un record mais surtout un chiffre en pleine expansion depuis 2019 (En moyenne sur les années précédentes, les femmes représentaient 8% des adhérents) !
Au fil du temps, les femmes ont imposé ici leur marque et leur style. Isabelle Autissier est la première à signer un podium sur la Mini-transat (3e proto en 1987), Anne Monmousseau lui emboîte le pas en série, en 1995. D’autres qui fourbissent leur armes en Mini font aussi parler d’elles : elles s’appellent Ellen Mac Arthur, Catherine Chabaud, Isabelle Joschke ou Sam Davies, toutes biberonnées au Mini 6.50. En 2013, après une saison brillante, la suissesse Justine Mettraux remet les femmes à l’honneur en décrochant la seconde place en série sur la Mini-Transat, suivie en 2017 par Clarisse Crémer. On parle Mini-Transat mais les femmes sont de plus en plus présentes sur le circuit (une vingtaine de femmes défendent un projet de course en Mini 6.50 pour cette saison 2023) : un contexte favorable mais pas suffisant pour la Classe qui a donc décidé de s’engager encore plus avant.
“A nous de proposer de nouveaux modèles”
“L’accessibilité globale, la diversité qu’elle soit sociale ou en termes de diversité homme femme ont toujours été des sujets essentiels au sein de la Classe Mini, rappelle Jean Marre, le Président de la Classe Mini. Pour autant, imposer la mixité est une mesure assez nouvelle bien que tardive peut-être. Moteurs sur le sujet, Lorient Grand Large et le directeur de course, Yves le Blevec, nous ont initialement proposé une mesure intermédiaire : instaurer un bonus à la mixité sur la Plastimo Lorient Mini 6.50.
Cette proposition a d’abord suscité beaucoup de débats au sein du conseil d’administration de la Classe Mini et a eu le mérite de creuser le sujet encore davantage. Clairement, on peut faire mieux sur la proportion des femmes sur le circuit ; 15% ce n’est sûrement pas représentatif du nombre de femmes qui aimeraient se lancer dans la course au large. A nous d’élargir le champ des possibles ; c’est ça, la vision de la Classe : créer les opportunités d’égalité.
Sur le fond, le Conseil d’administration a donc trouvé l’initiative géniale et le contexte de cette année particulièrement adapté pour tester une mesure qui pourrait avoir un vrai impact dans le futur. Nous avons donc décidé ensemble avec Lorient Grand Large et Yves Le Blevec d’aller plus loin en imposant la mixité pour tous les équipages.
J’ai pris le temps d’échanger avec de nombreuses femmes skippers toutes classes confondues, pour connaître leur sentiment sur le sujet et avoir leur point de vue sur les pistes à explorer pour favoriser l’accessibilité de la course au large aux femmes. Il y a globalement un consensus pour dire que cette solution, même si elle est imposée, reste l’une des plus efficaces pour le moment au vu de l’enjeu sociétal.
Il y a pu avoir des craintes sur le fait de trouver 80 navigantes pour participer à la Plastimo Lorient Mini 6.50. Pour aider, la Classe a mis en place une base de données qui rassemble aujourd’hui plus d’une quarantaine de noms de femmes, compétentes et disponibles pour la course. Au final, on voit bien que beaucoup de skippers ont trouvé leur binôme en dehors de cette liste et aujourd’hui la course a fait le plein d’inscriptions. Ça permet aussi à chacun de lever la tête et regarder ce qu’il se passe à côté de soi : c’est aussi ça l’esprit mini !
La mixité sur la Plastimo Lorient Mini 6.50 va servir de test pour cette année. Nous avons surveillé de près l’évolution des inscriptions et, comme pour toutes les initiatives que nous mettons en place, nous ferons un suivi d’impact.
L’idée serait de pérenniser au moins une course en double mixte tous les ans, pas forcément sur la Plastimo Lorient Mini 6.50, course de transmission entre les propriétaires des bateaux les années paires. Mais ce format peut par exemple être adapté à d’autres courses, si, bien-sûr, les organisateurs y sont favorables. On verra.
A mon sens, l’exercice doit être répété, pour créer de nouveaux “modèles” et montrer aux femmes que, oui, la course au large est un sport accessible dans lequel elles peuvent s’épanouir, réussir et briller au même titre que les hommes.”