La nouvelle date de départ de La Route du Rhum – Destination Guadeloupe, mercredi 9 novembre à 14h15, semble bien plus propice à une course rapide. Après un début de parcours délicat, tout indique que les différentes classes profiteront de conditions permettant de faire défiler les milles, sur une trajectoire proche de l’orthodromie (route directe). Pour les concurrents, la victoire est bien entendu l’objectif premier, mais battre le record de l’épreuve offrirait une belle cerise sur le gâteau.

7 jours, 14 heures, 21 minutes et 47 secondes. C’est très précisément le record absolu de La Route du Rhum – Destination Guadeloupe, établi en 2018 par Francis Joyon à bord de son fidèle IDEC Sport, un trimaran lancé en 2006. Depuis, les progrès réalisés sur les Ultim 32/23 ont été considérables, extraordinaires même. Sur le papier, le record de Joyon est tout à fait prenable. Encore faut-il que la météo le permette, ce qui semble être le cas avec un départ le mercredi 9 novembre.

Une course de moins de 6 jours pour les premiers Ultim 32/23 ?

Tout comme Franck Cammas, vainqueur de La Route du Rhum 2010, le navigateur Morgan Lagravière fait partie de la cellule de routage qui entoure Charles Caudrelier (Maxi Edmond de Rothschild). « En partant dimanche, l’espoir de battre le record était réduit car les conditions vraiment très fortes auraient impacté la gestion du bateau et donc sa vitesse. Il y avait beaucoup d’incertitudes sur les premiers jours de course, explique Morgan. Avec le report du départ à mercredi, la situation change clairement. Aujourd’hui, les deux modèles de prévision auxquels nous avons accès (CEP et GFS) sont en phase. Quand on lance des routages, les temps de course sont très intéressants en Ultim 32/23, en dessous du record avec une traversée possible en un peu moins de 6 jours ! Bien sûr, pour Charles Caudrelier et ses concurrents, la grande priorité est d’arriver avant les autres. Mais passer sous la semaine de course, avec un record à la clé, ce serait un joli bonus. » Christian Dumard, notamment routeur de Francis Joyon (IDEC Sport), voit lui aussi une course très rapide. « Le début ne sera quand même pas tout rose avec le passage d’un front fort et une mer formée ; on est quand-même sur un départ de Route du Rhum !, prévient-il. Ensuite ça devrait aller vite pour toutes les classes de bateaux et particulièrement les Ultim 32/23. S’ils ne cassent pas, on pourrait être sur un scénario à 6 jours, voire 5 jours et demi ! »

En IMOCA aussi le record pourrait bien tomber

En IMOCA, le record de La Route du Rhum – Destination Guadeloupe est détenu par François Gabart depuis l’édition 2014. Son temps de course : 12 jours 4 heures 38 minutes et 55 secondes. Il naviguait sur un bateau mis à l’eau en 2011 et non équipé de foils. Cet IMOCA est d’ailleurs au départ cette année, entre les mains de Benjamin Ferré (Monnoyeur – Duo For a Job). Les progrès ont été considérables depuis avec l’avènement des foilers de plus en plus performants, surtout aux allures de reaching (vent de travers) et de portant. Morgan Lagravière fait également partie de la cellule météo de Thomas Ruyant (LinkedOut). « Les routages pour les meilleurs IMOCA donnent un temps de course de moins de 11 jours, dit-il. Le début de course sera délicat, avec un premier front à passer. Ensuite, les conditions seront favorables avec un vent permettant de progresser au travers et au portant, des allures propices à la vitesse. Les alizés semblent bien établis. Autre paramètre engageant : les trajectoires pourront être assez proches de l’orthodromie, la route directe. » Christian Dumard, qui travaille la météo avec plusieurs skippers IMOCA, voit lui aussi un temps de course de 10 à 11 jours. « L’arbitre sera l’état de la mer qui leur permettra de tenir les routages ou pas », souligne-t-il.

Ocean Fifty : l’Atlantique en 10 jours ?

Les Ocean Fifty seront probablement un peu moins rapides que les derniers IMOCA pendant les 3 ou 4 premiers jours de course où la flotte va filer presque plein Ouest comme si l’arrivée se disputait à Charleston ! Ensuite, ils devraient reprendre un petit ascendant dans l’alizé. Pour les trimarans de 50 pieds, la navigation promet d’être très tonique et assez engagée compte tenu de l’état de la mer qui s’annonce forte notamment entre les Açores et l’Irlande. En Ocean Fifty, le record de l’épreuve a été établi en 2014 par Erwan Le Roux en 11 jours 5 heures 13 minutes et 55 secondes. A nouveau engagé cette année, le skipper de Koesio est optimiste quant à la possibilité de faire mieux : « Sur le précédent départ, nous étions sur un parcours de 11 jours. Là, on tombe à moins de 10 car la route idéale est très proche de l’orthodromie. Il faudra quand même bien se méfier des petites “patates” sur l’avant du grand front froid qui nous attend à la longitude des Açores. »

Class40 : le record plus que jamais en ligne de mire

Le record détenu par Yoann Richomme depuis 4 ans (16 jours, 3 heures, 22 minutes et 44 secondes) a de forte chance d’être battu à Pointe-à-Pitre, en Région Guadeloupe. Tanguy Leglatin suit de nombreux skippers en Class40. « A priori, on part sur une configuration de course proche de la route directe, avec sans doute le même nombre de fronts ou un de moins. Ça devrait aller plus vite », explique-t-il. Christian Dumard fait un constat similaire : « Même si ça reste très loin en termes de prévision, les Class40 pourraient boucler la course vite, peut-être en 14 ou 15 jours. » Fabien Delahaye, qui travaille notamment auprès de Yoann Richomme (Paprec – Arkéa) et de Corentin Douguet (Queguiner – Innoveo) poursuit l’analyse : « Dès la pointe Bretagne, il y a des routes qui permettent d’avoir le champ libre pour faire des choix stratégiques. Il faut voir comment la météo va évoluer mais le record est complétement possible. » Au-delà des conditions météorologiques, plusieurs facteurs rentrent en compte : la puissance et la facilité à passer la mer des nouveaux bateaux (les scow) et le fait qu’il va y avoir du match jusqu’au bout. Le fait de batailler en permanence en tête de course contribue à accélérer le rythme global. « Les concurrents se regardent en permanence, ils savent très bien si un autre skipper tire plus sur son bateau. On verra où ils sont prêts à mettre le curseur dans l’engagement », conclut Tanguy Leglatin.

Enfin, dans les catégories Rhum Multi et Rhum Mono, les marins s’attendent eux aussi à bien filer sur l’Atlantique, à l’instar de Fabrice Payen (Ille-et-Vilaine Cap vers l’inclusion) : « Je vais continuer à suivre l’évolution des fichiers mais on devrait partir dans des conditions favorables. La bonne nouvelle, c’est que les fichiers nous envoient sur une route proche de la route la plus courte. On va en profiter, cela relance la course par rapport au départ initial. On peut s’attendre à de belles bagarres dans toutes les classes, avec des temps de parcours rapides. »

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