En procédant jeudi en fin de journée à Vannes à la mise à l’eau de son maxi-trimaran IDEC-SPORT, Francis Joyon commence à égrainer le compte à rebours qui le mènera le dimanche 6 novembre prochain sur la ligne départ de la Route du Rhum-Destination Guadeloupe. Pour la 8ème fois dans son immense carrière, le marin de tous les records reprend une rasade de cette course mythique qui a marqué sa vie, et dans laquelle il a tout connu, du chavirage au triomphe historique de la précédente édition.

Comme il y a quatre ans, le marin de 66 ans repart à la barre de son valeureux trimaran lancé en 2006, ignoré des pronostiques et armé de cette éternelle passion pour les belles navigations, les routes maritimes aventureuses et ces formidables multicoques si stimulants à bien faire fonctionner. Tenant du titre, détenteur du temps référence entre Saint Malo et Pointe à Pître, Francis Joyon s’élancera en novembre prochain de la Cité corsaire avec pour seule pression, celle que lui dicte son perpétuel désir d’harmonie entre lui-même et sa machine, pour arriver sans regret dans les îles, juste heureux d’avoir donné tout ce que le vent, la mer et son IDEC-SPORT exigeaient de lui.

En piste pour une 8ème Route du Rhum

« La Route du Rhum est un rêve pour tout navigateur en multicoque. » Francis Joyon sait de quoi il parle, lui qui voici déjà 36 ans, bricolait de ses mains un improbable catamaran, pour prendre part à la grande classique en solitaire marquée du sceau du mythe depuis la victoire d’un petit trimaran jaune. « La Route du Rhum est la plus belle des transats. Aucune édition ne se ressemble. On part toujours dans l’inconnu, et cette dimension d’incertitude me plait. » Vainqueur il y a 4 ans à l’issue d’un scenario de course aussi fou qu’imprévisible, Francis Joyon porte un regard lucide sur ce nouveau défi qu’il se jette à lui-même. « J’ai conscience qu’il devient de plus en plus difficile de gagner. La voile, dans toutes ses classes, s’est professionnalisée. Je préserve, avec ma petite équipe, un côté amateur, et le Rhum permet aussi de côtoyer quelques marins atypiques, en Classe Rhum notamment. Cette course comporte suffisamment d’aspects mystérieux pour préserver son côté aventurier. En multicoques, toutes les courses sont dangereuses et cette dimension préserve à mon sens encore un peu le suspens. »

IDEC SPORT, un grand bateau simple

« Nous avons tout l’hiver bichonné notre IDEC SPORT. Nous continuons de rechercher la simplicité, dans tous les compartiments du jeu. Le bateau emporte au final peu d’informatique, peu de systèmes hydrauliques compliqués. Il se pilote à l’ancienne, avec les postes de barre en extérieur et peu protégés. On a bien travaillé sur les appendices, pour retrouver une certaine douceur à la barre. On a refait les cales de dérives, qui laissaient entrer l’eau. Et on partira avec une Grand-Voile et un gennaker neufs. IDEC SPORT est un bateau stable et c’est là un facteur rassurant. Je le connais par coeur, et je sais pouvoir éviter de me faire dépasser par ma machine, comme c’était trop souvent le cas en 60 pieds Orma. Je m’attends à un combat âpre, comme en 2018. Il me faudra à nouveau tout donner, jusqu’aux derniers mètres. Je sais qu’il me faudra une nouvelle fois aller chercher loin au fond de moi les ressources physiques, surtout sur la fin. Il faudra de la chance aussi, critère important en voile. Mais la chance se provoque, à commencer dans la préparation du bateau et dans le choix des routes les moins casse-bateaux. Il faut aussi être joueur. En 2018, je me suis faufilé au plus près de la côte de Guadeloupe, en limite de toucher les cailloux. Il n’y avait pas d’eau, mais juste un petit contre courant qui m’a aidé à revenir sur François (Gabart). Je le voyais au loin dans la nuit grâce aux sillages lumineux de tous ses bateaux suiveurs. Le vent a oscillé en ma faveur à l’arrivée, et je n’ai pas eu à tirer ce contre bord qui m’aurait couté la victoire. Le coeur battait fort. J’ai eu du mal à réaliser ce qui arrivait. C’est la magie du Rhum. »

20 ans après sa rencontre avec le Groupe IDEC

Il tarde à Francis et à sa petite équipe, Bertand Delesne, Antoine Blouet, Valentin Kapps et David Leven, tous bientôt rejoints par Corentin Joyon, de reprendre les navigations, pour remettre doucement IDEC SPORT dans sa configuration course en solitaire. A son rythme, à son humeur, à l’expérience, Francis va progressivement enter dans sa Route du Rhum, 36 ans après sa première expérience, et 20 ans après sa rencontre avec le Groupe IDEC.

Francis Joyon et la Route du Rhum : 7 participations

  • 2018 : Victoire maxi trimaran IDEC SPORT en 7 jours, 14 heures, 21 minutes et 47 secondes, nouveau temps de référence (Ultime)
  • 2014 : 6ème (Ultime)
  • 2010 : 2ème (Ultime)
  • 2002 : abandon sur chavirage (ORMA)
  • 1998 : 6ème (ORMA)
  • 1994 : abandon (ORMA)
  • 1990 : 10ème (ORMA)

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