Amateurs éclairés, pros … ils sont tous au Spi !
Du 14 au 18 avril, lors du week-end de Pâques à la Trinité-Sur-Mer, près de 400 bateaux et 2 300 marins sont attendus en baie de Quiberon pour quatre jours de courses intenses qu’ils soient amateurs éclairés, pros de la course au large ou anciens champions de voile olympique.
Amateurs, pros et la famille Escoffier…
Certains ont bouclé en amateurs avisés le challenge de Printemps organisé par la Société Nautique de La Trinité. D’autres préparent la Route du Rhum – Destination Guadeloupe, la Solitaire du Figaro, la Drheam Cup, le Vendée Globe… comme skipper, boat captain, constructeur, team manager ou routeur. Ils ne manqueraient le « Spi » pour rien au monde. C’est notamment le cas de Kevin Escoffier, dont le nouvel Imoca PRB est actuellement en construction. L’an dernier, il régatait avec son complice Armel Le Cléac’h en Figaro 3, lors du National Equipage à l’occasion du Spi Ouest-France -Banque Populaire Grand Ouest. Cette année, il embarque comme équipier avec son frère Loïc en catégorie Multi 2000. Ce catamaran de 50 pieds récemment mis à l’eau disputera la Route du Rhum en novembre avec Loïc à la barre. Il n’y a pas que les Escoffier dont le père Franck-Yves est triple vainqueur de la Route du Rhum et de la Transat Jacques Vabre, qui viennent régater en famille en baie de Quiberon. On trouve aussi Nicolas Lunven, Charlie Capelle ou Antoine Gautier. Des frères et sœurs, filles et fils, cousins cousines, conjoints, l’on en croise plusieurs dizaines sur les pontons de La Trinité. Ils ont pour nom Martinie, Troublé, Coville, Carpentier, Fournier Le Ray, Le Marec, Feur, Nadal, Moncerisier, Lemarchand…
Pen Duick 2 et Pen Duick V en guest-stars
Et puis, il y a d’autres fidèles de la course, souvent d’anciens de l’équipe de France de voile, et qui ont raflé plusieurs dizaines de titres nationaux et internationaux en dériveur, que ce soit en 420, 470, 505, Fireball, Tornado, SL16. Frédéric Bourdereau, Hubert Follenfant, Jean-Charles Scale, Eric Flageul, Gurvan Bontemps, Eric Basset, Valentin Bellet, Philippe Claude, Franck Aussedat, Hervé Leduc, Philippe Delhumeau… affectionnent de se confronter que ce soit en monotype, Osiris ou IRC. L’on peut ajouter Anne Phélipon, Simon Moriceau, Julien Villion, Gildas Mahé, Fred Duthil, Yvan Bourgnon, Alexis Loison, Luc Nadal, Sylvain Pélissier, Jean-Pierre Kelbert… tous des marins et régatiers brillants, qui savent qu’au fil des ans, les amateurs préparant le Spi, leur donnent de plus en plus de fil à retordre.
Enfin, deux guest-stars sont très attendues : Les Pen Duick 2 et V de Eric Tabarly en IRC équipage et IRC double.
Le chiffre : 50
Soit le nombre de bouées préparées par la SNT et nécessaires pour les cinq ronds de course, afin de mouiller les parcours répartis en baie de Quiberon pour les vingt classes.
L’histoire
Ce n’est pas vraiment Pâques au balcon… mais au baston ! Si dix ans auparavant, sous une température méditerranéenne estivale (25 degrés sous abri) et pas un zest de vent, les régates s’étaient transformés en thalasso avec batailles de seaux d’eau et autres bains de mer, ce Spi millésime 1994, est tout l’inverse. Les bars de La Trinité ne vont guère désemplir quatre jours durant, selon l’adage « Avis de tempête, marin reste à la buvette ! ». Une dépression très creuse sur les îles britanniques engendre des vents tempétueux de Sud-Ouest sur toute la Bretagne, et dans le Morbihan. Qu’à cela ne tienne. Malgré ce BMS (Bulletin Météo Spécial) et des appels du pied de coureurs professionnels soulignant à juste titre que ce n’est pas raisonnable d’envoyer les concurrents sur l’eau, le comité de course décide de lancer un départ pour les 500 concurrents. Sur le JOD 24 armé par des journalistes de Voiles et Voiliers, la régate s’arrête avant d’avoir commencé, la barre se brisant comme du petit bois lors d’un départ au lof… Luc Gellusseau à la tête du Mumm 36 et son commando de l’équipe de France avec lequel il va remporter ensuite le championnat du monde, ne tardent pas à affaler la voile d’avant pour ne pas la déchirer, et sont quasiment en mode survie. L’anémomètre du bord indique même une rafale à 54 nœuds (force 11).
Nous suivons en même temps l’arrivée du Trophée Jules Verne. Au large de Ouessant, sur Enza New Zealand le maxi catamaran mené par Peter Blake et Robin Knox-Johnston, le vent souffle à près de 70 nœuds, levant une mer énorme avec des creux de près de dix mètres. Pour ralentir le bateau, l’équipage en passe de battre le record du tour du monde avec un chrono de 74 jours, largue tous les cordages disponibles à l’arrière du bateau afin d’en faire des trainards et ainsi éviter un chavirage « cul par-dessus tête ». Peter Blake – cinq courses autour du monde en équipage consécutives au compteur – déclare : « ces conditions bretonnes sont plus dangereuses qu’au cap Horn ! » En baie de Quiberon, c’est aussi sauve qui peut ! Très vite le comité de course renvoie tout le monde au port. Trop de vent ! Les bateaux de sécurité ne savent plus où donner de la tête. Un J 24 coule et une jeune équipière est à deux doigts d’y laisser sa peau, recueillie par un bateau de presse… Si les équipages serrent les fesses et rentrent pour la plupart sous foc voire tourmentin seul, les photographes se régalent. Dans les grains, sous un ciel d’encre et une mer verte, le spectacle est juste hallucinant. Le photographe Benoît Stichelbaut, est dans l’hélicoptère, et « shoote » à tout va. Il saisit l’image d’un First Class 8, mât dans l’eau, et dérapant sur les vagues tel un jouet sur une toile cirée. Au retour du Spi, à la rédaction de Voiles et Voiliers, en découvrant sa diapositive (le numérique en est à ses balbutiements), on décide de la basculer verticalement et d’en faire la couverture du magazine. On dirait une maquette accrochée à la montagne… Le titre « FOU ! » n’est pas usurpé. »
Le marin du Spi
Pablo Thomere a 14 ans et va courir son premier Spi Ouest-France à la barre d’un Open 5.70. « Je fais de la voile depuis que j’ai six ans, sur Optimist, Open Bic, RS Feva… et depuis cette année en Open 5.70 » explique ce jeune régatier passionné, en classe de troisième, benjamin de l’épreuve, et qui se verrait bien courir la Mini Transat un jour. « A trois ans, il a effectué un tour de l’Atlantique avec nous sur un Feeling 920 » précise son père Erwan, qui a disputé plusieurs Spi Ouest-France sur un Sun Fast 37. « Nous nous entraînons au sein de la SNT un week-end sur deux. Nous avons constitué un petit noyau avec un copain du même âge, et le troisième équipier change en fonction de ses disponibilités. Participer au Spi Ouest France, c’est un peu impressionnant quand même ! Quand on voit le nombre de bateaux, ça doit être cool ! Il me tarde d’y être même si j’appréhende un peu… J’espère que nous n’aurons pas trop de brise, car nous sommes un équipage plutôt léger ! »
Ils ont dit
Gaël Degrées du Loû, directeur du Spi Ouest-France-Banque Populaire de l’Ouest :
« Comme l’an dernier, l’idée est d’avoir un village dynamique avec de très nombreuses animations : associations venant présenter leur activité, vente aux enchères au profit de la SNSM, concerts chaque soir, rencontres avec des skippers (Thomas Coville, Yves Le Blévec). Nous souhaitons également ouvrir le village le plus possible au public et aux habitants de La Trinité. Enfin, et c’est quelque chose qui me tient à cœur, on veut profiter du Spi pour le populariser et ainsi permettre à celles et ceux ayant envie de découvrir le monde de la voile et la régate, de les embarquer pour suivre les courses, et ce afin que le monde des terriens rencontre celui des marins. Il y aura donc des « croisières » en baie de Quiberon pour un prix très modeste afin d’être au plus près des bateaux. La Grande Parade Voiles et Voiliers le samedi matin, va contribuer à offrir le spectacle des 400 voiliers dans le chenal de La Trinité. »
Didier Visbecq, président de la SNT :
« Je suis un peu le président du « Covid » car les deux dernières années, le Spi a été décalé de Pâques à l’automne. A terre et en mer, le Spi, ce sont entre 130 et 150 personnes, pour la plupart bénévoles et qui sont parfaitement rôdés. Un Spi, c’est aussi pour le cuisinier, la préparation de 150 petits déjeuners et repas quotidiennement. Quand il fait beau, tous les bateaux de sécurité font du « tourisme »… mais s’il y a beaucoup de vent, cela devient très vite tendu. On attend cet événement toute l’année et on croise les doigts quatre jours durant pour que tout se déroule bien. »