Un bel exemple de l’égalité homme-femme
La Classe IMOCA a toujours compté des concurrents masculins et féminins, que ce soit dans les grandes classiques en solitaire comme le Vendée Globe ou la Route du Rhum, ou dans les courses en double comme la Transat Jacques Vabre.
Le dernier Vendée Globe a vu un record de six skippers féminins au départ et cette Transat Jacques Vabre 2021 a également un fort contingent de navigatrices de haut niveau. En effet, le plateau propose un nouveau record d’équipages mixtes dans la course, avec pas moins de cinq binômes au sein de la division IMOCA.
La tradition des équipages mixtes sur la Transat Jacques Vabre remonte à 1999, lorsque Catherine Chabaud et Luc Bartissol ainsi qu’Ellen MacArthur et Yves Parlier l’avaient disputé. Depuis, l’IMOCA n’a cessé de démontrer que les hommes et les femmes peuvent courir au plus haut niveau de la course au large en équipage, sur un pied d’égalité.
Sur cette transat, les équipages mixtes comptent notamment les prétendants au podium Justine Mettraux et Simon Fisher à bord de 11th Hour Racing Team-Alaka’i. Ils partageront la ligne de départ ce dimanche avec Sam Davies et Nicolas Lunven sur Initiatives-Coeur, Isabelle Joschke et Fabien Delahaye sur MACSF, Manuel Cousin et Alexia Barrier à bord de Groupe SÉTIN-4myplanet, ou encore Louis Duc et Marie Tabarly aux commandes de Kostum-Lantana Paysage.
Depuis plusieurs années, Alexia Barrier est membre de la Classe IMOCA et a toujours été fervente partisane des équipages mixtes. Originaire d’Antibes, la « Finisheuse » du Vendée Globe, celle que l’on aperçoit souvent sur les pontons avec son fidèle labrador Nikka (le chien est resté à Antibes cette fois), affirme que les équipages mixtes sont une option très sympa de la discipline.
« C’est l’une des raisons pour lesquelles j’aime la course au large, car lorsque vous êtes une femme, vous pouvez rivaliser avec les hommes en étant à égalité « , explique-t-elle. « Pour moi, c’est juste normal d’être entourée d’hommes dans un environnement de compétition et de jouer le même jeu qu’eux en ayant les mêmes chances. »
Alexia, actuellement à la recherche d’un sponsor principal pour l’aider à participer au Vendée Globe à bord d’un IMOCA à foils en 2024, estime que la Classe envoie un message fort. « Je pense qu’il est normal de courir ensemble et que cela devrait être le cas partout », poursuit-elle. « Dans la société d’aujourd’hui, nous avons de nombreux défis à relever pour les femmes et je pense que c’est un bon exemple, non seulement pour le sport et la voile, mais aussi pour la société dans son ensemble, comme moyen de promouvoir l’égalité entre les sexes ».
« Je suis donc très fière d’être un exemple pour des jeunes filles ou des femmes qui aimeraient réaliser quelque chose », poursuit-elle, « et qui pensent peut-être que cela est réservé aux hommes, mais quand elles nous voient – avec des marins comme Sam (Davies), Isa (Joschke) ou Miranda (Merron) – elles peuvent voir que cela est possible. »
Justine Mettraux est une autre skipper dont la carrière a démontré les opportunités uniques qu’offre la voile dans la manière dont elle permet de combiner les compétences des athlètes masculins et féminins au niveau de l’élite. Ayant été élevée dans le monde des régates du Léman, au Centre d’entraînement de Genève, Justine a toujours été habituée à naviguer en équipage mixte.
« Dans ma carrière, j’ai davantage navigué en configuration mixte qu’avec des équipages féminins, car c’est ainsi que nous avons appris au centre de formation de Genève », précise-t-elle. « Nous avions toujours des équipages mixtes là-bas et c’est une organisation qui existe depuis 40 ans et ils ont toujours eu des femmes à bord. Je viens donc de ce milieu. »
Membre de Dongfeng Race Team, équipe victorieuse de la Volvo Ocean Race 2017-18, Justine Mettraux estime que le genre à bord n’est pas important. « Pour moi, ce n’est pas le fait d’être un homme ou une femme qui compte, mais le fait d’être un bon marin ou non », explique-t-elle. « Et vous avez besoin des mêmes compétences pour que le bateau aille vite et au bon endroit. C’est bien de voir qu’une équipe mixte peut être performante et cela peut se produire dans d’autres sports également. Il pourrait y avoir plus d’incitations à mélanger les sexes dans différentes équipes de différents sports. »
À bord du Groupe SÉTIN-4MyPlanet, Alexia Barrier affirme que la charge de travail est partagée de façon égale entre elle et Manuel Cousin. « Nous faisons tous les deux les tâches physiques », précise-t-elle. « Nous travaillons ensemble quand il faut manœuvrer et quand c’est difficile. Nous devons être ensemble pour ce genre de choses parce que c’est comme ça quand on court en double. On fait toutes les choses physiques ensemble. »
Alexia ajoute qu’elle se concentre probablement plus sur les aspects de performance du bateau, les données et la vitesse, tandis que Manu s’occupe des problèmes de maintenance et des pannes techniques qui surviennent. « Nous nous répartissons les choses à faire, mais pas les tâches physiques », déclare la co-skipper de Groupe SÉTIN-4MyPlanet, qui affirme que son objectif est de remporter la « course des dérives » dans cette Transat Jacques Vabre et de mettre quelques foilers derrière eux également.
Sur 11th Hour Racing Team-Alaka’I, Justine Mettraux reconnaît qu’elle fait parfois un peu plus d’efforts physiques que Simon Fisher, que ses amis appellent SiFi. « Nous essayons de partager l’effort et, en fait, je fais parfois plus de choses physiques, comme aller sur la plage avant, mais c’est sûr que nous travaillons ensemble sur la colonne de winch dans le cockpit. Parfois, SiFi fait un peu plus de matossage que moi mais nous essayons de bien répartir tout ça parce qu’il y a tant à faire et que c’est vraiment physique, donc nous essayons de partager l’effort. »
Justine Mettraux affirme que Simon et elle forment un duo solide, et cela s’est vérifié dans leurs résultats, avec un podium à la fois à la Rolex Fastnet Race (3ème) et sur les 48h du Défi Azimut-Lorient Agglomération (2ème). Ils sont aujourd’hui en tête du Championnat IMOCA Globe Series. « Cela a été très agréable pour moi, très facile », confie-t-elle. « Je pense que nous avons trouvé un moyen de travailler ensemble et que nous l’avons fait très rapidement, donc tout se passe super bien. SiFi est un très bon marin, un très bon navigateur (météo). Il est bon pour pousser le bateau et trouver un bon réglage, donc c’est génial de naviguer avec lui. »
La clé du succès à bord d’Alaka’i est que ces deux marins sont « cools » et sur la même longueur d’onde. « Je pense que nous sommes assez semblables », résume Justine. « Des personnes plutôt calmes et tranquilles et la plupart du temps, nous pensons les mêmes choses au même moment sur ce qu’il faut faire pour le bateau et ainsi de suite, donc c’est très agréable. »
Il va être intéressant de voir si ce duo peut poursuivre ses excellentes performances du début de l’année et devenir le troisième couple homme-femme de la Transat Jacques Vabre en IMOCA à terminer sur le podium (après Chabaud et Bartissol en 1999 (2ème) et Roland Jourdain et Ellen MacArthur en 2005 (2ème) et peut-être même le premier à la gagner.