Des favoris et une foule d’outstiders
Pour de très nombreux concurrents, la Mini Transat EuroChef est une parenthèse improbable dans leur vie. Un espace ouvert sur un rêve réalisé, une aventure à achever pour se sentir vivant. Pour certains, c’est aussi un objectif sportif, avec de vraies ambitions de résultat. Nombreux sont les prétendants à la victoire, à la fois chez les Série et chez les Proto. Petit tour d’horizon des forces en présence.
Un jeu très ouvert chez les Série
La Mini Transat est synonyme d’aventure avec un grand A. Et pour cause, traverser l’Atlantique en solitaire, sans assistance et sans moyens de communication, reste un défi singulier. Réussir à aller au bout est le premier challenge pour les concurrents, y compris pour ceux qui viennent avec des ambitions de résultat. « Pour gagner, il faut déjà arriver », rappelle Hugo Dhallenne (979 – YC Saint-Lunaire). Le skipper Bretillien, assurément l’un des grands favoris de cette 23e édition après avoir notamment remporté la Plastimo Lorient Mini, la Pornichet Select et la Mini en Mai cette saison, ne vient, certes, pas pour faire de la simple figuration, mais préfère rester prudent. « Une transat n’est pas un exercice anodin. On sait que ça va parfois être dur et qu’il va falloir réussir à tenir dans la durée. Aller vite, sera une chose, mais aller vite tout le temps, en sera une autre », assure Hugo, l’un des marins qu’il conviendra de surveiller de très près dans la catégorie des bateaux de Série, même si les prétendants à la victoire sont nombreux. Parmi eux, on peut notamment citer l’Italien Alberto Riva (993 – EdiliziAcrobatica), Anne-Claire Le Berre (1005 – Rendez-Vous Equilibre), Romain Le Gall (987 – Les Optiministes – Tribord) ou encore Léo Debiesse (966 – Les Alphas).
« Mon premier objectif est d’arriver de l’autre côté, mais j’avoue que le sportif a pris une part importante dans mon projet, et aujourd’hui, j’ai très envie de faire un bon résultat. Le jeu est toutefois très ouvert. On a été trois ou quatre à se partager les victoires d’épreuves sur le circuit, ces deux dernières années, mais beaucoup d’autres skippers ont aussi fait de très belles choses. Rien n’est joué avant de partir, ça c’est sûr », relate le Lozérien, champion de France de course au large en titre. « On a tous nos expériences et nos atouts. Pour la majorité d’entre nous, il va s’agir de notre première traversée de l’Atlantique. Ce sera avant tout le marin qui fera la différente et ça, c’est chouette », détaille Léo, pour sa part, plutôt très à l’aise dans le petit temps et les phases de transition, mais aussi au portant VMG grâce à son Pogo 3. Ses principaux adversaires, eux, ne seront pas en reste avec leurs Maxi 6.50 réputés redoutables au reaching, ou encore leurs Vector 6.50 dont les lignes, très tendues, en font une arme solide au vent de travers.
« On se prépare à une très belle bagarre. J’ai vraiment envie de bien faire mais je sais que ce ne sera pas facile. Il y a cinq ou six coureurs qui sont vraiment chauds et qui me font vraiment peur. Ne rien casser, faire la bonne route, aller vite et trouver le bon rythme composeront assurément le combo gagnant », commente Alberto Riva qui, pour ce qui le concerne, a fait forte impression lors de Puru Challenge Race, en août dernier, en remportant la manche aller puis la manche retour. « La course au large reste un sport mécanique et ont sait que tant que la ligne d’arrivée n’est pas franchie, tout est possible. Quoi qu’il en soit, le fait d’être au départ est pour moi le début d’un rêve incroyable, et je compte bien en profiter au maximum », relate le skipper d’EdiliziAcrobatica.
Du grand match à venir chez les Proto
Du côté des Proto, le match s’annonce tout aussi disputé. Le duel annoncé entre Tanguy Bouroullec (969 – Tollec MP/Pogo) et Pierre Le Roy (1019 – TeamWork) risque, en effet, d’être largement perturbé par des marins très affûtés eux aussi, tels que Fabio Muzzolini (945 – Tartine sans Beurre), Irina Gracheva (800 – Path), Sébastien Pebelier (787 – Decosail), Matteo Sericano (1011 – Gigali) ou encore François Champion (950 – Porsche Taycan). « Je ne pense effectivement pas que la course se résume à un combat entre Tanguy et moi. Quand on regarde le plateau Proto, nombreux sont ceux qui ont déjà l’expérience de la Mini Transat, qui sont de très bons marins et qui ont de très bons bateaux. De plus, on sait très bien que pour gagner une transat, ce n’est pas un élément qui fait la différence mais une somme de petites choses. Il faut que tout se passe bien dans tous les domaines. Si un truc coince, avec un problème mécanique, une erreur de stratégie ou un petit coup de fatigue, immédiatement on se retrouve à perdre des places », explique le skipper de TeamWork, vainqueur cette année de la Plastimo Lorient et de la Puru Challenge Race quand son principal concurrent, Tanguy Bouroullec a, lui, remporté l’ensemble des quatre courses auxquelles il a participé ces deux dernières années.
Reste que l’un et l’autre ne sont pas confrontés récemment, et que depuis la dernière fois, le météorologue a eu le temps de trouver les manettes de son bateau, un sistership du Maximum vainqueur des deux dernières éditions avec Ian Lipinski puis François Jambou. « Je pense que ça va être un gros match », assure Pierre. Un avis partagé par son concurrent. « Sur une transat, il peut se passer plein de choses et, en ce sens, c’est très difficile de faire des pronostics. Sur chaque édition de la Mini Transat, il y a toujours quelqu’un que l’on n’attend pas sur le podium et qui crée la surprise », commente le skipper de Tollec MP/Pogo, bien décidé, d’une part, à exploiter tout le potentiel de son Pogo Foiler et, d’autre part, à aller chercher la victoire après déjà deux 4e places en 2017 puis en 2019 (en Série puis en Proto). « Il y a deux ans, mon bateau avait été mis à l’eau juste avant le départ de la course. Je suis donc parti sans le connaître. A présent, j’ai dompté la bête. Elle est fiabilisée et optimisée, et mon objectif, c’est la première place en Guadeloupe », termine Tanguy Bouroullec. Les favoris arriveront-ils à tenir leur rang ? Qui parviendra le mieux à déjouer tous les pièges de l’Atlantique ? Pour l’heure, impossible de répondre. Une première tendance se dessinera à l’issue de la première étape aux Canaries vers le 2 octobre, et le résultat final sera connu autour du 9 novembre, à Saint-François. En attendant, les paris sont ouverts !
Ils ont dit :
Seb Pebelier (787 – Decosail) :
« Quand j’ai décidé que j’allais repartir (après une première participation en 2015, ndlr), j’ai fait le choix d’un bateau dans mes moyens. D’un proto fiable, avec des systèmes simples, pas mal de Mini Transat au compteur, et dans lequel j’ai pu avoir confiance tout de suite. Cette saison, ça s’est plutôt pas mal passé puisque j’ai fait trois podiums. Ça m’a donné envie d’aller plus loin, bien conscient toutefois que le défaut de mon bateau était qu’il enfournait beaucoup selon l’état de la mer. J’ai ainsi fait le choix de modifier l’étrave en juillet. Léo Debiesse a été d’une aide précieuse pour les travaux composites. Le but a vraiment été d’améliorer le comportement du bateau dans certaines conditions, en l’occurrence celles d’une transatlantique. Aujourd’hui, le pari semble réussi. J’ai envie de bien faire mais je ne me mets pas trop de pression car je reste un amateur. Je navigue pendant mes vacances et j’ai précisément envie que cela reste des vacances. J’espère donc prendre un maximum de plaisir sur l’eau tout en allant vite. On s’est fait de bons matches en avant-saison et j’espère que cela va de nouveau être le cas pendant cette course. »
Anne-Claire Le Berre (1005 – Rendez-Vous Equilibre) :
« Quand j’ai lancé mon projet Mini Transat, j’ai essayé d’avoir le meilleur bateau pour faire en sorte de pouvoir gagner. Depuis un an, je suis régulièrement montée en puissance et j’ai montré que j’étais capable de belles choses, notamment sur la Puru Challenge Race, une course très engageante. J’espère continuer ma progression et aller encore plus haut. Je pars clairement avec l’ambition de terminer sur le podium, et plus la marche sera haute, plus je serai contente, évidemment. Alberto (Riva), Hugo (Dhallenne) et d’autres sont très rapides. C’est aussi l’un de mes atouts. Je pense que nous sommes une petite poignée à être capables d’avoir une bonne analyse météo et de mettre du rythme au bon moment. J’ai déjà passé 15 jours d’affilée en mer et je sais à peu près à quoi m’attendre. En solo, ce sera une première, mais je pars avec une grosse envie ! »
Romain Le Gall (987 – Les Optiministes) :
« C’est chouette parce que sur cette édition, énormément de gens peuvent gagner. Le jeu s’annonce hyper ouvert, avec plein de bateaux différents en plus, puisque contrairement à il y a deux ans où le Pogo 3 dominait, aujourd’hui, le Maxi 6.50 et le Vector 6.50 sont aussi de belles armes pour aller chercher la victoire. Il y a beaucoup d’homogénéité au sein de la flotte, et cela tire tout le monde vers le haut. Mon but à moi, c’est d’abord d’arriver de l’autre côté. Si j’arrivais à monter sur le podium, je serais ravi mais le classement ne sera que la cerise sur le gâteau. »