Lamiré/Carpentier à moins de 250 milles de Salvador de Bahia
« En multicoque, tu fais une erreur, tu te retournes. Donc, tant que tu n’as pas franchi la ligne, il n’y a pas de victoire. La seule variable aujourd’hui, c’est nous. A nous de ne pas faire d’erreur. » confiait à la vacation de midi Antoine Carpentier à bord de Groupe GCA – Mille et un sourires, à 20 nœuds le long des côtes brésiliennes et à quelques heures de l’arrivée. Pendant ce temps-là, la majorité de la flotte des IMOCA souffre dans les orages, les grains, les pluies torrentielles et l’absence de vent du Pot-au-noir. Apivia (Dalin/Eliès) sort en tête de ce cafouillage équatorien avec 144 milles d’avance sur Charal (Beyou/Pratt) et le match est grandiose entre PRB et Banque Populaire à moins de 4 milles d’écart. La flotte des Class40, elle, navigue dans une ambiance encore bien humide dans des alizés toniques et une nuée de poissons de volants, seuls Ian Lipinski et Adrien Hardy (Crédit Mutuel) ralentissent dans les prémices du Pot, avec leur douillet matelas d’avance de 53 milles sur la meute.
Class40 : Faire sa course au casino
Les équipages fourbissent leurs trajectoires afin d’entrer dans le Pot-au-noir en se faufilant dans le meilleur trou de souris possible qui peut-être leur donnera un peu de vent. Rien n’est moins sûr ! « Le Pot-au-noir a l’air plutôt intéressant pour nous d’après les prévisions météo du jour, mais cette zone est un peu le monde de l’incertitude, comme on peut le voir pour Charal. » écrivait dans la matinée Louis Duc sur Crosscall Chamonix Mont-Blanc. Les poursuivants de Crédit Mutuel, en tête depuis le grand large du détroit de Gibraltar (le 2 novembre), ont un lièvre qu’ils vont surveiller de près. A bord de Aïna Enfance & Avenir (2e), Leyton (3e), Banque du Léman (4e), Crosscall Chamonix Mont-Blanc (5e), Made in Midi (6e) et Linkt (7), on rêve sûrement d’un regroupement et on se lèche les babines en pensant à un nouveau départ à la sortie du Pot-au-noir. Sûr que les bateaux de dernière génération seront intouchables à un angle plus serré dans les alizés de l’hémisphère sud, mais sait-on jamais : premier sorti, premier servi !
Multi50 : Groupe GCA – Mille et un sourires attendu demain à 5h
Si le trimaran de Gilles Lamiré et Antoine Carpentier connaît par cœur la route du Café (5 participations, 3 victoires, 2ème dans la Baie de Tous les Saints en 2017 avec Erwan Le Roux et Vincent Riou), c’est avec prudence que l’équipage vise la ligne d’arrivée devant Salvador de Bahia. Sur un multicoque, le chavirage ne quitte pas l’esprit des navigateurs qui doivent donc aller vite tout en mettant le curseur au bon endroit. « On croise des cargos, il faut faire preuve d’un peu de vigilance, ne pas se faire surprendre par un grain sous gennaker. » expliquait Antoine ce midi. Le tandem n’est pas inquiet par Solidaires En Peloton – ARSEP distant de près de 200 milles et attendu vendredi 8 novembre dans l’après-midi. A bord de Primonial, à 870 milles de la Baie de Tous les Saints, c’est l’occasion rêvée pour Sébastien Rogues, skipper du bateau, d’appréhender son bolide dans ces alizés de sud-est soutenus. Un vrai plus de naviguer avec Matthieu Souben pour engranger toujours plus d’expérience…
IMOCA : Vers un décollage ?
Heures après heures, l’écart continue de se creuser inexorablement entre Apivia, en tête, et Charal, deuxième au classement de 16h : 144 milles et cela risque de continuer tant que Jérémie Beyou et Christopher Pratt ne seront pas complètement sortis du Pot-au-noir. Derrière, il y a du grabuge : PRB et Banque Populaire se livrent à un mano a mano exaltant, mais épuisant pour les skippers : « Il faut qu’on récupère juste après une manœuvre-là… On est un peu fatigué. Le vent tourne à chaque grain, on s’arrête. On passe de J0 à J2, on manœuvre, on remet. On va se coucher et une fois dans la bannette, ça repart ! » racontait Clarisse Cremer sur Banque Populaire qui vit son premier Pot-au-noir… Entre Initiatives-Cœur, Arkea-Paprec, Advens for Cybersecurity et 11th Hour Racing, le match est complètement relancé. A la sortie du Pot, on y verra plus clair et une hiérarchie se dessinera nettement sitôt que tous auront attrapé les alizés de sud-est. Il ne fait aucun doute que les foilers voleront à bride abattue vers le Brésil car enfin ils seront sous l’angle idéal ! Les IMOCA à dérives ont profité de conditions idéales pour eux depuis le départ du Havre, et mangeront alors sans doute leur pain noir. N’empêche, le podium est loin, très loin d’être dessiné sur cette 14e Route du café…
Abandon
Isabelle Joschke et Morgan Lagravière ont signifié leur abandon à la Direction de course de la 14e édition de la Transat Jacques Vabre Normandie Le Havre. Suite au talonnage de l’IMOCA d’entrée de jeu à la bouée Région Normandie devant Etretat, le chantier de réparation de la quille se montre trop important pour que MACSF puise repartir.
ETA (heures d’arrivées estimées)
Multi50
- Groupe GCA – Mille et un sourires : vendredi 8 novembre à 5h00
- Solidaires En Peloton – ARSEP : vendredi 8 novembre à 15h30
- Primonial : samedi 9 novembre à 11h30
IMOCA
- Apivia : dimanche 10 novembre à 1h
Date : 07/11/19 – 09h00
Class40
1 – Crédit Mutuel
2 – Leyton
3 – Aïna Enfance & Avenir
Multi50
1 – GROUPE GCA – MILLE ET UN SOURIRES
2 – Solidaires En Peloton – ARSEP
3 – PRIMONIAL
Imoca
1 – Apivia
2 – Charal
3 – PRB
Ils ont dit :
Xavier Macaire – La Mie Câline Artisans Artipôle (IMOCA)
« Nous sommes bien dans le Pot-au-noir. C’est la pétole dans des vents erratiques et les réglages sont permanents. Les premiers orages sont arrivés hier. On essaie d’être bien réglé. Nous n’avons pas fait 36 changements de voiles et on essaie d’aller au plus simple, au plus efficace. Il n’y a pas eu de manœuvres trop compliquées et ça s’est plutôt bien passé. On attendait du refus, on savait quelle voile on allait envoyer. On avait un peu peur de prendre des rafales fortes et finalement on n’a pas eu plus de 20 nœuds. Là, je suis à l’intérieur. J’ai une main sur l’ordi, une autre sur la télécommande du pilote. Le Pot-au-noir est étendu cette année et on ne sait pas quand on va en sortir. On a une idée de ce qu’on veut faire mais les nuages ne nous permettent pas forcément d’aller où l’on veut. Le vent est au sud-est et c’est difficile de faire du sud, ce qui est le but. On a une idée du schéma global mais on ne sait pas ce qui va nous arriver. »
Antoine Carpentier-Groupe GCA Mille et un sourires (Multi50)
« Ce sont les dernières manœuvres avant l’arrivée. Nous avons envoyé un petit gennaker, le but c’est d’arriver ce soir. On a entre 12 et 18 nœuds de vent d’alizé avec des grains de temps en temps. Derrière les grains, c’est plutôt assez calme. On croise des cargos, il faut faire preuve d’un peu de vigilance, ne pas se faire surprendre par un grain sous gennaker. L’avantage, c’est que de jour et on les voit arriver. Nous sommes sous pilote automatique. Le Fleet (communication par satellite) ne marche plus et donc nous ne recevons plus les positions des autres. Mais d’après nos informations, je pense qu’ils ont compris que ça ne servait à rien de mettre du charbon et ils ont levé le pied je pense. Depuis la sortie du Pot, ça commence à être bon. Après, ça reste du multicoque. Tu fais une erreur, tu te retournes. En multicoque, tant que tu n’as pas franchi la ligne, il n’y a pas de victoire. C’est évident qu’on a envie d’en parler ensemble avec Gilles. La seule variable aujourd’hui, c’est nous. A nous de ne pas faire d’erreur. On se voit à l’entrée de la Baie de tous les Saints avant minuit, heure brésilienne. »
Louis Burton – Bureau Vallée II (IMOCA)
« Là tout de suite, c’est moche, il fait tout gris, il pleut. On est dans la dernière grande zone de nébulosité du Pot-au-noir. Jusqu’à maintenant, on a eu pas mal de réussite et de chance mais là, on est un peu bloqué. On est rentré dedans il y a 24 heures. Ça a redémarré mais sous l’influence des grains. On ressent très peu le vent synoptique. Une grosse masse nuageuse ferme le Pot-au-noir. C’est la roulette russe ! On est rentré par 27°30 de longitude, ça s’est bien passé. On a bien slalomé mais depuis 3 heures du mat’, une masse a gonflé sur la route et personne ne pouvait trop le prévoir. »
Clarisse Crémer-Banque Populaire (IMOCA)
« Tout va bien. Il faut qu’on récupère juste après une manœuvre là… On est un peu fatigués. Le Pot-au-noir a été chiant ! Et j’espère que c’est terminé. Nous sommes rentrés dedans mardi après-midi alors qu’on était par 9 degrés nord. Le vent tourne à chaque grain, on s’arrête. On passe de J0 à J2, on manœuvre, on remet. On va se coucher et une fois dans la bannette, ça repart ! Hier après-midi, on a pu se reposer un peu mais cette nuit était pourrie. Ce n’est pas le bateau comme on l’aime ! On est désolé pour Charal. En bateau tout peut arriver, mais c’est un peu nul de perdre comme ça. C’est la première fois que je passe le Pot-au-noir et je me rends compte qu’entre la prévision à l’entrée et ce que tu trouves dedans, tout est différent. C’est très dur d’établir une stratégie. L’objectif, c’est toujours d’aller au sud et d’être à l’est pour l’angle à la sortie mais c’est aussi là que le Pot-au-noir est le plus dense. »
Alexia Barrier, skipper de 4MyPlanet (IMOCA)
« Pour notre entrée dans le Pot-au-noir, j’ai mis un way-point depuis 4 jours, j’ai vu que tout le monde est passé plus ou moins par ce way-point. Mais, on va réajuster le tir d’ici une vingtaine d’heures. Je ne sais pas si on va réussir à rattraper Miranda (Campagne de France). On essaye de mener notre vieux bateau à fond les ballons. Il commence à faire chaud, le bateau est une piste d’atterrissage pour poissons volants, ça m’avait manqué, j’adore ces moments. J’ai trouvé un joli déguisement pour Joan, car ce sera la première fois qu’elle passe l’équateur. Pour ma part, j’ai fait 4 fois ce trajet donc j’ai une idée de comment ça va se passer. On aborde sereinement le Pot-au-noir, on aborde les choses les unes après les autres, on ne veut rien regretter une fois arrivées à Salvador. Nous passons beaucoup d’heure à la barre, car le pilote est en mode compas. »