Retard à l’allumage
Pas un souffle d’air ce dimanche midi en baie de Quiberon, une mer d’huile, un soleil de plomb et 440 équipages en stand-by… Le ventilateur aura mis du temps à se mettre en route, mais vers 15h, il envoyait enfin un léger vent de sud pour une petite dizaine de nœuds. De quoi poursuivre « les bagarres de rue » comme dit si bien Erwan Le Roux (Open 7.50 Le Britannia). Les 22 catégories de bateaux réparties dans toute la baie de Quiberon ont couru au minimum une manche (cinq pour les ETF) cet après-midi négociant le fort courant de la marée montante et les chausse-trappes des risées capricieuses.
11h08. Vent au 45° pour 6 nœuds. Les comités de course et les parcours sont en place, les J/70 viennent de prendre un départ. Jusque-là tout va bien. 12h07, grosse bascule à droite et avec elle un vent qui cesse subitement de caresser les voiles. « Pavillon N, manche annulée » annonce le comité du rond Département du Morbihan. Ce dimanche de Pâques a donc ressemblé à un immense repas de famille sur l’eau dans une ambiance bon enfant. Entre petits roupillons et grands bavardages, chacun a attendu patiemment le courant d’air. Et c’est à 15h dans le 195 qu’il est apparu permettant de lancer des départs pour les 22 catégories de bateaux dont un côtier pour les IRC et Osiris, et des séquences de vol spectaculaires pour les ETF 26.
Oui, la bagarre fait rage sur ce 41e Spi Ouest-France. En ce troisième jour de course (2ème pour les J/80), on commence sérieusement à compter les points et à regarder les classements de plus près. D’autant que sur cette régate à 440 bateaux, les réclamations sont nombreuses (entre 130 et 150 au total à chaque édition !). Un mauvais joueur peut tout à fait « sauter » d’un podium. « La flotte est compacte, il y a beaucoup de bagarres, mais c’est vraiment du sérieux. Hier on était tous en réclamations, il y a 31 bateaux, ça ne rigole pas ! » confiait ce soir Nicolas Bérenger, tacticien sur le Grand Surprise, Chaintrier Avocats, 2ème au classement général provisoire. Les places sur les podiums sont chères selon les ronds et la moindre erreur se paie cash. Pierre Mas, ancien de la Whitbread et de la coupe de l’America, coach en Diam 24 le dit lui-même : « Le signe que le niveau est élevé en Diam 24, c’est que Beijaflore est premier au général sans avoir gagné de manches. C’est dire si la compétition est rude. Le Spi, c’est vraiment une régate géniale pour ça, les qualités tactiques peuvent s’exprimer, le jeu est très ouvert. »
Dans certaines catégories, le classement général provisoire montre déjà la suprématie de certains équipages. EN IRC B, par exemple, le 40.7 Pen Koent creuse l’écart avec une dizaine de points d’avance sur le JPK 10,80 Racing Bee. Idem en Mini 6.50 où Erwan Le Mene tient la dragée haute à Fabio Muzzolini et Ronan Gabriel. Du côté des Open 7.50, Antoine Gautier sur son Open Game affiche une belle avance sur Nicolas Groleau et Erwan Le Roux. Ce dernier, coureur professionnel en multicoque, avoue tout de même que le jeu de la régate lui fait davantage plaisir que de compter les points : « L’objectif, c’est de se faire plaisir entre amis, passer du temps sur l’eau, avancer avec le vent, faire un peu de bagarre de rue avec les copains. On reste des compétiteurs, mais on n’est pas là pour se prendre la tête. Quand on a le plaisir et l’honneur de venir ici avec ces conditions on ne peut que profiter ! On a une chance incroyable. »
Chez les Grand Surprise, CVSQ survole ses concurrents avec 4 victoires sur 4 manches. L’équipe de Gaston Morvan en First 24 fait également des lumières avec une belle victoire de manche aujourd’hui. Du côté des ETF 26, le match est plus serré : Team Pro prend ce soir la tête au général devant Cool Runnings 4 et ABC Arbitrage Ville de Nice de Jean-Pierre Dick !
Brèves de pontons
- Figaro 2,de beaux restes : avec la naissance du Figaro Bénéteau 3 à foils, le Figaro 2 s’offre une seconde jeunesse, notamment dans la régate en double avec une classe de 11 bateaux sur le Spi Ouest-France.
Les esprits des Figaristes planent en baie de Quiberon avec les anciens bateaux de Yann Eliès, Thierry Chabagny ou Sébastien Simon. On y voit les anciens noms de sponsors sur les mâts, des voiles encore siglées, et surtout de nouveaux propriétaires très concentrés… - Un Vismara en IRC A : c’est le seul du genre sur le « Spi », un bateau de course-croisière italien baptisé Grain de Soleil 6, tout en composite qui court en IRC A contre des JPK 11,80, des Grand Soleil 43 ou encore le TP 52 Paprec Recyclage. Ce superbe voilier aux voiles kevlar est mené par un équipage d’amateurs éclairés : Nicolas Svilarich et son fils Etienne, excellents navigateurs qui sont tous les deux passés par la case Solitaire du Figaro.
- À ne pas rater Sodebo 3 et Idec : à voir absolument au bout du village du Spi Ouest-France Destination Morbihan, les deux trimarans géants de Thomas Coville et Francis Joyon. Le premier vient d’être mis à l’eau, le second date de 2006 et demeure le récent vainqueur de la dernière Route du Rhum !
- Météo : temps un peu plus couvert demain matin avec un vent de sud-est pour 7-8 nœuds. De quoi courir les dernières manches du 41e Spi Ouest-France – Destination Morbihan !
- Sur le Spi Ouest-France Destination Morbihan, il y a des séries monotypes comme les Open 7.50 ou les J80, mais également des bateaux très différents qui entrent dans les jauges IRC et Osiris. L’idée de base d’une jauge est de faire courir ensemble le plus équitablement possible un panel de voiliers qui ne ressemblent pas.
- L’IRC (International Rule Club) est une jauge internationale gérée par L’UNCL (Union Nationale pour la Course au Large) qui se base exclusivement sur des paramètres techniques des bateaux pour calculer un « rating », alors que l’OSIRIS (Organisation du Système pour les Régates Inter Séries), 100% française sous la houlette de la FFVoile, prend en compte les prédictions de vitesse des bateaux, leur classement et une simple auto déclaration. Cette dernière a été élaborée pour permettre aux régatiers occasionnels de participer à certaines courses.