La onzième édition de la Route du Rhum-Destination Guadeloupe s’est achevée ce vendredi 7 décembre à 14h00 (heure métropole) : décalée de cinq jours suite aux conditions météorologiques dans le golfe de Gascogne qui ont retardé une partie de la flotte, la ligne d’arrivée a donc été fermée après 33 jours de mer qui ont vu 79 solitaires boucler ce parcours de 3 452 milles entre Saint-Malo et Pointe-à-Pitre. Seuls deux skippers ne pourront pas terminer la course dans les temps.

Organisée tous les quatre ans depuis 1978, la Route du Rhum-Destination Guadeloupe a fêté ses quarante ans avec une édition d’une intensité particulière, tant au niveau des conditions météorologiques très difficiles au large du golfe de Gascogne, qu’en fin de course, avec ce duel au sommet entre Francis Joyon (IDEC Sport) et François Gabart (MACIF) pour le sacre en temps réel. L’histoire se rappellera aussi de l’échouement du Britannique Alex Thomson (Hugo Boss) alors qu’il tenait presque la victoire en monocoques IMOCA. Et depuis l’arrivée des premiers, les bras de fer de solitaires autour de l’île ont animé nombre de journées et de nuits tropicales. Alors, après une ouverture magique en baie de Saint-Malo le 4 novembre, la fenêtre atlantique se referme en Guadeloupe ce vendredi 7 décembre.

Et pour conclure !

Après l’arrivée jeudi de Christophe Souchaud (Rhum Solidaire-Cap Handi) neuvième Rhum Mono, il ne restait plus que deux solitaires en mer : Éric Bellion (Rhum Mono-Commeunseulhomme) devrait ainsi boucler le parcours dimanche prochain alors que Loïc Le Doyen (Class40-Saint Cast-Le Guildo Terre Exotique) avait encore ce vendredi midi environ 250 milles à couvrir avant d’atteindre la Guadeloupe. Mais la ligne d’arrivée a été fermée à 14h00 (heure métropole, 9h00 heure locale), ce qui implique que ces deux solitaires seront considérés, s’ils effectuent le tour de la Guadeloupe, comme DNF (Did Not Finish), hors temps imparti.

Rappelons que le temps limite avait été initialement daté au dimanche 2 décembre, mais suite aux conditions particulières qui avaient régné dans le golfe de Gascogne et au fait que plusieurs concurrents avaient choisi de se réfugier dans un port pour laisser passer ces coups de tabac, la Direction de Course en accord avec le corps arbitral et l’organisateur de la Route du Rhum-Destination Guadeloupe, avait décidé de reporter la fermeture de la ligne d’arrivée de cinq jours.

Il y aura donc eu 42 abandons officiels et deux concurrents hors temps, pour 123 partants le 4 novembre dernier, soit 34% qui se répartissent très différemment selon les six catégories retenues :

  • ULTIME : 6 partants, 4 classés, 2 abandons (33%)
  • Multi50 : 6 partants, 5 classés, 1 abandon (17%)
  • IMOCA : 20 partants, 15 classés, 5 abandons (25%)
  • Class40 : 53 partants, 34 classés, 1 hors temps, 18 abandons (34%)
  • Rhum Mono : 17 partants, 9 classés, 1 hors temps, 7 abandons (41%)
  • Rhum Multi : 21 partants, 12 classés, 9 abandons (43%)

Une édition particulière

Rappelons que le départ ayant été donné dimanche 4 novembre à 14h00 devant Saint-Malo, les 123 partants ont eu à négocier une première dépression au large de Ouessant, mais c’est surtout l’arrivée d’une perturbation très active dès le mardi suivant qui incitait plusieurs solitaires à se réfugier dans les ports bretons, et pour certains en Espagne. Et si les plus rapides multicoques purent s’échapper par le Sud, de nombreux skippers durent affronter des conditions météorologiques très éprouvantes au large du golfe de Gascogne, et même pour certains aux abords des Açores. Cette succession de coups de vent, typique à cette période de l’année, entraînait aussi la formation d’une mer très forte au-dessus d’une ligne allant de Lisbonne à Sao Miguel.

Et à suivre, les alizés se sont avérés très instables et surtout très bas en latitude, au fur et à mesure que les jours passaient : relativement établis pour les premiers trimarans ULTIME sur le tropique du Cancer (23° Nord), ils glissaient progressivement jusqu’au 15° Nord, soit au niveau de l’archipel du Cap-Vert… La route des leaders de chaque catégorie s’est donc incurvée au fil des jours pour atteindre, pour certains solitaires, plus de 5 000 milles parcourus alors que la route directe (orthodromie) ne fait que 3 542 milles ! Notons aussi que les services de sécurité maritime (CROSS) n’ont eu à intervenir que trois fois : pour l’échouement de Willy Bissainte (C’ la Guadeloupe) devant Perros-Guirec, pour les chavirages d’Armel Le Cléac’h (Maxi Solo Banque Populaire IX) au large des Açores et de Lalou Roucayrol (Arkema) à trois jours de l’arrivée.

Trois questions à Jacques Caraës, Directeur de Course

C’était la première fois que vous étiez Directeur de Course de la Route du Rhum-Destination Guadeloupe…

« C’est un peu différent du Vendée Globe ou d’autres courses où tous les bateaux sont cadrés dans une classe. C’est la particularité de la Route du Rhum-Destination Guadeloupe : avoir six catégories, et cette année 123 partants. C’était très intéressant et surtout j’ai été très bien entouré. Parce que ce n’est pas simple ! Mais le point très positif, c’est le comportement général des solitaires qui ont su adopter une attitude maritime en choisissant de continuer ou de se réfugier dans un port, de privilégier la sécurité sur la performance. Et j’ai eu de bons échos à l’arrivée des solitaires : la course au large doit rester dans ce cadre, conserver la capacité d’esquive. »

Deux chavirages et un échouement…

« Nous avons dû faire intervenir le CROSS pour Willy Bissainte qui s’est mis sur les roches des Sept Îles et pour Armel Le Cléac’h qui s’est retourné à proximité des Açores. Ainsi que pour Lalou Roucayrol qui a chaviré avant la Guadeloupe. C’est toujours douloureux mais cela s’est très bien déroulé avec les services de sécurité maritime et bien terminé pour les coureurs. Mais dans l’ensemble, les solitaires qui ont eu des avaries importantes (démâtage, dommage structurel) ont résolu leur problème pour rallier un port. »

Au final, quarante-deux abandons, deux hors temps…

« Le taux d’abandon reste cohérent pour une course au large difficile qui démarre à l’automne. Surtout que les conditions météorologiques ont été très « toniques » : les coureurs ont gagné en préparation et en expérience. Et les bateaux ont aussi progressé en termes de fiabilité. Certes, cette onzième édition restera marquée par cette succession de dépressions musclées, mais ce fut aussi une Route du Rhum-Destination Guadeloupe pleine de suspense dans presque toutes les catégories et sportivement de très haut niveau. »

Pourcentage de concurrents classés par rapport au nombre de partants depuis quarante ans (les solitaires hors temps ne sont pas inclus comme classés)

  • 1978 : 65% + 5 hors temps
  • 1982 : 62%
  • 1986 : 42% + 1 hors temps
  • 1990 : 69%
  • 1994 : 54% + 1 hors temps
  • 1998 : 77% + 1 hors temps
  • 2002 : 52%
  • 2006 : 82% + 1 hors temps
  • 2010 : 84%
  • 2014 : 71%
  • 2018 : 64% + 2 hors temps

La remise des prix de cette 11e édition réunira les marins le vendredi 14 décembre à partir de 18h sur la Scène du Nautic de Paris, à la Porte de Versailles.

Les podiums par catégorie après jury

ULTIME

1-Francis Joyon (IDEC Sport)
2-François Gabart (MACIF)
3-Thomas Coville (Sodebo Ultim’)

Multi50

1-Armel Tripon (Réauté chocolat)
2-Erwan Le Roux (FenêtréA-Mix Buffet)
3-Thibaut Vauchel-Camus (Solidaires en peloton-ARSEP)

IMOCA

1-Paul Meilhat (SMA)
2-Yann Éliès (UCAR-StMichel)
3-Alex Thomson (Hugo Boss)

Class40

1-Yoann Richomme (Veedol-AIC)
2-Aymeric Chappellier (Aïna Enfance et Avenir)
3-Phil Sharp (Imerys Clean Energy)

Rhum Multi

1-Pierre Antoine (Olmix)
2-Jean-François Lilti (École diagonale pour citoyens du monde)
3-Étienne Hochedé (PiR2)

Rhum Mono

1-Sidney Gavignet (Café Joyeux)
2-Sébastien Destremau (Alcatraz IT-FaceOcean)
3-Luc Coquelin (Rotary-La mer pour tous)

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