Quarante-huit années après l’invention de cette course mythique, le départ de la Solitaire Urgo Le Figaro 2018 sera donné dimanche depuis Le Havre, pour une première étape de 570 milles à destination de Saint-Brieuc, via les côtes anglaises et les îles anglo-normandes. A bord de Gedimat, Thierry Chabagny sera à la fois un des favoris et le skipper le plus expérimenté de l’épreuve. Entretien à quelques jours du top départ.

C’est reparti pour un tour… et on dirait bien que tu es le plus expérimenté des 36 marins inscrits sur cette Solitaire 2018, non ?

« J’en ai bien peur ! Nous sommes en 2018, j’ai commencé en 2001 et j’ai participé à toutes les éditions depuis sauf en 2010. C’est donc ma 17e participation à cette course que j’adore, ça commence à causer. L’important c’est que l’envie soit toujours présente et elle l’est ! »

Quand on regarde la liste des engagés, on se rend compte que les quatre plus expérimentés sont toi Thierry Chabagny, puis Erwan Tabarly (16e participation), Alexis Loison (13e) et Frédéric Duthil (11e)… Et vous êtes tous des piliers de ce bateau, le Figaro 2, qui tire sa révérence cette année…

« On est encore loin du record de Jean-Paul Mouren qui en a fait 27, mais je dois être à vue de nez dans le Top 5 de ceux qui ont le plus participé à cette course, avec des marins comme Gildas Morvan, Jean Le Cam, Alain Gautier… J’ai couru deux fois la Solitaire avec le précédent bateau, le Figaro 1, et toutes les autres avec le Figaro 2. C’est une belle partie de ma vie de sportif. Une page va se tourner, c’est sûr, d’autant que c’est la huitième et dernière sous les couleurs de Gedimat. On fera le bilan plus tard, mais il y a eu de sacrés moments pendant ce cycle, en Transat ou sur la Solitaire. De belles victoires, un vrai palmarès. Je ne navigue pas qu’en Figaro, mais ça a toujours été un peu la ligne conductrice, le fil rouge de ma vie de marin.»

Revenons à cette édition 2018. Que penses-tu du parcours, avec ces quatre étapes du Havre à St Gilles Croix de vie, via Saint-Brieuc et Ria de Muros-Noia ?

« Je regrette un peu de ne pas faire escale ni en Irlande ni en Angleterre, ce qui faisait un peu l’exotisme de la course, mais ça reste un joli parcours, très varié. La première partie en Manche est assez technique, avec de petits segments qu’il faut bien enchaîner, que ce soit les traversées ou les parties côtières. Ensuite, l’aller-retour dans le golfe de Gascogne s’apparente plus à de la navigation au grand large et il faut donc bien anticiper la météo, notamment avec le double passage au cap Finisterre où tu peux aussi bien avoir 3 nœuds que 45 nœuds de vent ! Enfin, il y aura la dernière manche qui sera exclusivement du côtier, encore une autre palette des différents menus qu’offre cette épreuve chaque année. Celui qui gagnera sera forcément un marin très complet, à l’aise dans tous ces types d’exercices. »

A l’instar de ce que font les cyclistes du Tour de France, as-tu « coché » une étape en particulier ?

« Certains me taquinent en disant que la deuxième étape vers l’Espagne ressemble beaucoup à celle que j’ai gagnée en 2015, mais je ne fais vraiment pas attention à ce genre de choses. Moi je pars toujours pour gagner n’importe quelle étape… Maintenant mon objectif c’est le classement général. Evidemment que si je peux gagner une étape je ne me gênerai pas, mais c’est bien le général qui m’intéresse. L’an dernier, j’ai eu des pépins techniques importants sur deux des quatre étapes et sur celles où je n’en ai pas eu j’ai terminé 3e et 4e… ce qui aurait donc pu faire un très bon résultat. Ce que je veux c’est faire quatre belles manches sans problème technique. »

Tu n’échapperas pas à la question de tes objectifs sur cette dernière Solitaire en Figaro 2…

« Pour moi, Charlie Dalin, Sébastien Simon, Alexis Loison et Anthony Marchand sont les grands favoris, il y aura forcément un de ces quatre-là sur le podium, voire mieux, mais on est quelques-uns à pouvoir gagner : Erwan Tabarly et moi compris mais aussi Gildas Mahé, Xavier Macaire, etc. Comme toujours il y a des petits jeunes qui montent et les très expérimentés qui ont toujours leur mot à dire : Gildas Mahé, Fred Duthil, Corentin Douguet, Vincent Biarnes et j’en oublie… Pour Gedimat et moi, tous les clignotants sont au vert : on a parfaitement préparé le bateau et je sais que je peux bien faire. Au fond de moi, je sais que je peux gagner. C’est ce qui m’importe ! Le jour où je me dirais que je ne peux pas être dans les cinq premiers je ne serai pas au départ. Parce que ‘prendre des bâches’ c’est mauvais pour le moral… mais en revanche gagner, c’est bon pour la santé ! »

Est-ce que ça change quelque chose de partir si tard dans la saison, à la toute fin du mois d’août ?

« Côté météo, c’est impossible à dire à l’avance. Mais le vrai changement que ça implique ce sont des nuits beaucoup plus longues que sur les éditions précédentes : deux à trois heures de noir de plus que d’habitude. La température ne sera pas la même et la nuit en solitaire c’est forcément plus dur : moins de repères, plus d’envie de dormir etc. Donc oui, de ce point de vue, ça rend la course plus difficile encore. »

Quelles sensations as-tu, à quelques jours du départ ?

« Le moral est au beau fixe ! Je me sens particulièrement en forme, je reviens avec de l’envie, je suis content de partir en mer et je sais que le potentiel est là. J’ai navigué avec mes voiles neuves et tout va bien, je ne suis pas inquiet. Pour cette dernière Solitaire à bord de ce bateau et avec Gedimat, il y a forcément l’envie de boucler ce cycle sur une bonne note, de partager de jolies choses… »

Source

Articles connexes