Un peu plus d’un an après sa deuxième victoire sur la Solitaire du Figaro, Nicolas Lunven vient de boucler, le week-end dernier, la Volvo Ocean Race à bord de Turn The Tide On Plastic, le voilier mené par la britannique Dee Cafari. Le navigateur vannetais, membre du pôle Finistère course au large, récent Champion d’Europe IRC à bord de J lance 12, revient sur cette compétition planétaire et parle de son avenir…

Quel enchaînement de navigation depuis ta deuxième victoire sur la Solitaire du Figaro ! Tu dois être content de faire une pause ?

C’est vrai que cela commence à faire beaucoup. Ce n’est pas exagéré en disant que depuis mon retour sur le circuit Figaro en 2016, je me levais tous les matins et me couchais tous les soirs en pensant au Figaro. Ces deux saisons se sont terminées en apothéose avec une jolie série de podium tout au long de l’année dernière et surtout une deuxième victoire sur la Solitaire doublé d’un titre de Champion de France. Puis en juillet dernier, je suis contacté par Dee Caffari qui cherche un remplaçant pour Brian Thompson, sérieusement blessé, sur la Volvo Ocean Race. Il a fallu alors mener de front la fin de la saison Figaro et le début de cette folle aventure autour du monde ! A côté de cela, la vie personnelle a été aussi intense avec la naissance de notre deuxième fille, alors que j’étais en plein milieu de l’océan ! Donc oui, cela va faire du bien de poser son sac à la maison et de profiter de mes proches.

Que retiens-tu de ta Volvo Ocean Race en tant que navigateur ?

Je commence tout juste à me rendre compte de l’énorme expérience que j’ai accumulée durant ces neuf derniers mois. En embarquant à bord de Turn The Tide on Plastic, je savais que l’on ne partait pas pour gagner la course. Le projet a été monté à la dernière minute avec un équipage très jeune et sans grande expérience de la navigation au large. Deux mois avant le départ de la course, tout était quasiment à zéro au niveau de la performance et de la navigation. Nous avons du tout faire nous-même en un minimum de temps : calibration électronique, polaires de vitesse, Sailect de voiles, préparation des étapes, roadbook, etc… Forcément, il y a eu quelques ratés et pas mal d’approximations, mais quelle expérience emmagasinée ! Je pense notamment à la préparation des étapes et à la définition de la stratégie à tenir. Avec Brian nous étions 100% autonome, sans préparateur météo à terre contrairement à la plupart des équipes. Alors c’est vrai que je suis frustré que l’on n’ait pas réussi à faire au moins un beau résultat sur une étape. Nous avons souvent manqué de réussite et de vitesse. Je pense à l’étape Itajai-Newport où nous prenons une belle option le 2e jour qui nous place en tête avec un petit matelas d’avance. Malgré tous nos efforts ce dernier sera grignoté en remontant le long du Brésil. Ou bien à un bon coup stratégique dans le pot au noir qui là encore sera un coup d’épée dans l’eau puisque l’issue de cette étape se jouera en rivière de Newport… Mais d’un point de vue humain, l’expérience a été top. J’ai rencontré des gens formidables dans cette équipe que ce soit les navigants ou l’équipe à terre.

Sur ton compte twitter, tu as avoué avoir versé une larme quand tu as su que c’était bon pour tes copains de Dongfeng notamment Charles Caudrelier qui t’a fait confiance à tes débuts en solitaire. Raconte-nous cette dernière étape ?

C’est vrai que cette dernière étape a été incroyable à tout point de vue : un parcours alambiqué en mer Baltique avec notamment une bouée à virer dans le port d’Aarhus au Danemark, un waypoint virtuel sous la Norvège et enfin des zones interdites à foison sur la fin de parcours (zone d’éoliennes, rail de navigation, etc…). En plus de cela, la météo était complexe avec pas mal de transitions et un vent parfois à l’opposé de la prévision !
La victoire de Dongfeng s’est jouée dans la dernière option de cette étape : il fallait choisir entre faire le tour d’un très grand DST (150 mille de long !) par le large ou par la côte. A première vue, l’option du large semble plus « facile », notamment avec un jeu un peu plus ouvert par rapport à l’option côtière te contraignant à naviguer dans une bande de 5 milles de large pendant 150 milles !
C’est cette dernière option que Dongfeng, comme nous, avons choisi. Et quand j’ai reçu le PosReport de 13h, là j’ai compris que ça sentait bon pour Dongfeng. Alors forcément, j’ai pensé à Charles, qui m’a lancé sur le circuit Figaro en 2007 en m’offrant son bateau et son sponsor pendant une saison complète. Cette année-là nous avions gagné le tour de Bretagne ensemble… En plus d’être un grand champion, il a le cœur sur la main. Mais je sais qu’il perd vite confiance en lui, il a d’ailleurs avoué dans une interview à l’arrivée que depuis quelques temps il n’avait plus la foi. Je suis tellement content pour lui et pour toute son équipe. Alors oui, j’ai été ému en pensant à eux, à tous les sacrifices et l’investissement qu’ils ont fait pour arriver à un tel niveau, sur une course aussi longue et difficile.

Quel est ton programme à venir et où en es-tu dans ta recherche de partenaires pour le prochain Vendée Globe ?

Je vais faire de l’analyse météo pour une équipe sur le Tour de France à la voile. J’ai toujours en tête de participer au prochain Vendée Globe, mais depuis un an je n’ai pas consacré beaucoup de temps à la recherche de partenaires puisque j’étais sur la Volvo. Mais il n’est pas trop tard donc cela est dorénavant ma priorité N°1 !

Enfin, que penses-tu du Figaro Bénéteau 3 ? Un retour en Figaro est-il envisageable ?

Je n’ai malheureusement pas encore eu l’occasion d’essayer le Figaro 3, mais il me tarde de le faire ! Quant à un retour sur le circuit, disons qu’aujourd’hui ce n’est pas ma priorité puisque je me concentre sur le Vendée Globe. Enfin il ne faut jamais dire « jamais » et en plus le Figaro est une drogue dure à laquelle on ne décroche jamais complètement ! Alors qui sait… ?

Source

Articles connexes