Gestion de brise
Alors que l’arrivée se profile de plus en plus dans trois jours, les leaders tentent de se recaler les uns vers les autres dans une brise encore indécise, quant à sa direction. Car le vent est bien présent avec 25 nœuds, mais les grains se développent de plus en plus à la tombée de la nuit avec des accélérations et des ralentissements parfois surprenants. Surtout que les sargasses font de plus en plus leur apparition sur la route de Saint-Barthélemy…
C’est probablement le jour du bilan, et à suivre la nuit la plus longue… avant le débarquement aux Antilles. À un peu plus de 800 milles de l’arrivée à Saint-Barthélemy, les options commencent à converger et les plus septentrionaux ont entamé leur première série d’empannages de recadrage : Adrien Hardy & Thomas Ruyant (Agir Recouvrement) ont été les premiers à replonger vers l’arc antillais à l’occasion de petites bascules d’une brise devenue de plus en plus irrégulière sous les grains. Ces nuages qui grossissent au fil des milles, à la nuit tombée, et qui génèrent de bonnes rafales sous leur masse et parfois de gros arrêts buffet dans leur sillage.
Le jour le plus long…
Un peu plus de onze heures de nuit, une nuit pas si câline quand elle débute, sans un brin de lumière, car il faut attendre que la lune se lève et ce n’est désormais qu’à quelques heures du lever de soleil. Les nuits sont longues et les jours aussi quand la chaleur moite enveloppe les duos et que le ciel ne donne encore pas de signes de changement. La rotation de la brise est quasiment homéopathique, par touches impressionnistes, par instants suspendus, par indécisions répétitives : cet alizé ne veut pas franchement tourner. Il virevolte, il hésite, il prend son temps et provoque bien des énervements : faut-il empanner de suite ou patienter encore ? Faut-il enfin se recaler ou grappiller encore du Nord-Ouest ? Que font nos voisins ? Quid de la voie du Sud ?
Gérer la brise, anticiper le vent, s’adapter à l’alizé… Plus aisé à dire qu’à faire sur ce terrain mouvant où les repères sont depuis bien longtemps absents : il n’y a plus personne à l’horizon ! Mais la situation devrait radicalement changer en ce premier jour de la semaine : en revenant vers le but (Saint-Barthélemy situé par 17°55 Nord et 62°50 Ouest), il va forcément y avoir croisement avec les partisans d’une autre voie.
Regroupement général
Gérer la flotte, anticiper ses réactions, s’adapter à leur comportement… Plus aisé à dire qu’à faire sur ce plan d’eau qui change la donne en permanence : il y a du monde dans le bourg et nombre de duos vont se retrouver à touche-touche d’ici quelques heures ! Certes au Sud, il y a semble-t-il plus d’algues, plus de sargasses qui agacent surtout lorsque la perche qui sert à les enlever s’est fait la malle. Comme pour Gildas Mahé & Nicolas Troussel (Breizh Cola) qui ont perdu leur outil de nettoyage dans la nuit. Une anecdote qui a des effets collatéraux non négligeables car il a fallu bricoler une nouvelle perche et perdre bien des milles dans ces bancs flottants qui paraissent sans fin.
Mais comment vont donc croiser les quatre Figaro Bénéteau les plus en pointe et leurs poursuivants qui ne les lâchent point ? Au Nord, Hardy-Ruyant entament leur série d’empannages, au Sud Mahé-Troussel tentent de glisser encore le plus à l’Ouest possible quand Pierre Leboucher & Christopher Pratt (Guyot Environnement) font tout pour les piéger. Et au centre, Sébastien Simon & Morgan Lagravière (Bretagne CMB Performance) maintiennent leur position d’attente : va y avoir du sport !
Et le peloton n’est pas en reste car il est de plus en plus difficile de départager Ronan Treussart & Simon Troël (Les Perles de Saint-Barth), Justine Mettraux & Isabelle Joschke (TeamWork), Thomas Dolan & Tanguy Bouroullec (Smurfit Kappa-Cerfrance), Loïs Berrehar & Erwan le Draoulec (Concarneau Entreprendre) ou Pierre Rhimbault & Romain Attanasio (Bretagne CMB Espoir)… Il va y avoir embouteillage devant l’île Chevreau !
Ils ont dit
Thomas Ruyant (Agir Recouvrement)
« Nous avons empanné. Il y a pas mal de rotation de la brise, surtout la nuit avec des grains de plus en plus actifs en se rapprochant de l’arrivée : on va essayer de profiter des moments de bascules pour tenter de croiser devant. Ça ne va pas être simple et l’arrivée risque d’être serrée. Pour l’instant, nous continuons à naviguer avec notre vent sans trop nous préoccuper de la flotte pour caler les empannages au meilleur moment. A mon avis, on se recroisera quand on verra les Antilles… Il y aura certainement plusieurs empannages. Ça ne sera pas une trace toute simple. On va devoir tricoter encore pour descendre un peu plus Sud. Dès qu’on peut descendre, on descend mais il faut juste que ce soit bien réfléchit et au bon moment. Nous sommes assez détachés de ce que fait le reste de la flotte, mais évidemment il va falloir rentrer dans la tactique avec l’arrivée qui se rapproche : nous sommes concentrés sur le vent que nous avons car c’est très changeant entre le Nord et le Sud ! Nous sommes dans la gestion de la route la plus rapide vers l’arrivée. De toute façon, on va se recroiser et c’est à ce moment-là qu’on commencera à tactiquer et à naviguer en fonction de la flotte. Il y a forcément un peu de tension à bord car nous sommes concentrés. Nous avons envie de continuer à bien naviguer. C’est une régate palpitante, jusqu’au bout. »
Gildas Mahé (Breizh Cola)
« Nous n’avons pas fait une bonne nuit mais nous sommes à fond. On regarde ce qui s’est passé dans le Nord. On a eu un souci technique hier qu’on a réparé depuis mais qui nous a bien pesés : on a perdu notre perche à algues et comme on vit dans un océan rempli de sargasses, c’est vite un gros problème ! On va voir ce que ça va faire quand les autres vont empanner. Ils seront en route directe… »
Justine Mettraux (TeamWork)
« Ce n’est pas une nuit très différente des autres. Pour l’instant on continue sur le même bord en attendant d’empanner. Le plus extrême Nord, Agir Recouvrement a empanné. Nous, on attend de savoir quand on va empanner. C’est prévu dans la journée, ça dépend du vent. C’est relativement stable. Nous avons 25 nœuds toujours à peu près dans la même direction. Nous avons de la peine à tenir la cadence imposée par les autres mais on essaie de s’accrocher un maximum. Ça promet d’être serré avec notre groupe en arrivant sur St-Barth, ça va être intéressant. Isabelle vient de reprendre la barre. Nous essayons d’être à fond les derniers jours pour faire au mieux. »
CLASSEMENT du 7 mai à 5H
- AGIR Recouvrement (Adrien Hardy / Thomas Ruyant) à 856,23 milles de l’arrivée
- Bretagne – CMB Performance (Sébastien Simon / Morgan Lagravière) à 1,56 milles du premier
- Guyot Environnement Breizh Cola (Pierre Leboucher / Christopher Pratt) à 22,69 milles
- Breizh Cola (Gildas Mahé / Nicolas Troussel) à 22,85 milles
- Groupe Royer – Secours Populaire (Anthony Marchand / Alexis Loison) à 40,02 milles