Alors que la flotte de la Volvo Ocean Race est attendue dans environ une semaine au Cap, terme de la deuxième étape, la régate bat son plein dans l’Atlantique Sud avec une bataille stratégique qui tourne pour l’instant à l’avantage du bateau le plus à l’est, AkzoNobel, mais dont l’issue est très incertaine, d’autant qu’un gros obstacle météo va bientôt se dresser sur la route de l’Afrique du Sud…

Qui remportera dans environ une semaine la deuxième étape de la Volvo Ocean Race entre Lisbonne et Le Cap ? À un peu plus de 2500 milles de l’arrivée, les sept Volvo ocean 65 engagés autour du monde ont tous leurs chances, regroupés en moins de 80 milles, mais désormais décalés avec des choix de route différents. 130 milles d’écart en latéral séparaient ainsi ce vendredi le bateau le plus à l’est de la flotte, team AkzoNobel, de celui le plus proche du continent sud-américain, Team Brunel. Avantage pour l’instant au premier qui tente de « couper le fromage » au moment de contourner l’anticyclone de Sainte-Hélène, qui barre la route directe vers l’Afrique, mais risque à terme d’avoir moins de vent et un angle moins favorable pour rejoindre l’arrivée.

Le second, imité par Vestas 11th Hour Racing, à quant à lui fait le choix d’aller chercher plus de vent à l’ouest, il a ainsi empanné tôt vendredi matin pour faire un contre-bord vers l’ouest avant un second empannage dans le bon sens synonyme de cap vers… Le Cap. « La raison est qu’il y a plus de pression à l’ouest, notre but était d’aller vers cette zone puis de faire un ultime empannage et de sauter dans le train. Sur le papier, c’est un contre-bord qui peut paraître coûteux, mais nous pensons que c’est un bon investissement pour le futur proche », a expliqué le skipper néerlandais Bouwe Bekking, sept Volvo Ocean Race au compteur, tandis que son équipière Annie Lush a ajouté : « C’est un moment très important de l’étape, il peut y avoir de gros gains ou de grosses pertes ».

Entre ces deux options, se trouvent les deux bateaux qui, depuis le départ de Lisbonne, ont passé le plus de temps en tête et semblent plutôt bien positionnés, Dongfeng Race Team et MAPFRE, avec un avantage au premier, parvenu peu à peu à se détacher de son rival espagnol (20 milles d’écart). « Nous avons réussi à creuser un petit écart avec MAPFRE, du coup, c’est plus relax à bord, Pascal (Bidégorry, le navigateur) peut faire un petit break parce qu’il a passé énormément de temps à surveiller leur vitesse sur l’AIS », a commenté le skipper Charles Caudrelier. Effectivement, lorsque les bateaux sont très proches, comme c’est le cas pour ces deux-là, mais également pour Team Sun Hung Kai/Scallywag et Turn The Tide on Tide on Plastic, qui naviguent à vue, et pour Team Brunel et Vestas 11th Hour Racing, qui se sont croisés vendredi matin, l’AIS (radar qui détecte des bateaux dans un rayon de 5-10 milles) est le meilleur moyen de surveiller la progression du voisin et de le garder sous contrôle.

« Comme ils n’ont que quatre pointages par jour, c’est souvent plus intéressant de garder ses adversaires proches à l’AIS que de les perdre et de leur ouvrir l’opportunité de tenter un coup que tu n’aurais pas vu. Les navigateurs passent beaucoup de temps à la table à cartes à comparer les vitesses », confirme Fabien Delahaye, en charge de la performance au sein de Dongfeng Race Team, et qui, pendant les étapes, entraîne en Figaro à Lorient les marins chinois du Team qui ne sont pas en course. Et l’intéressé d’ajouter, à propos de l’équipage de Charles Caudrelier : « On imagine bien le stress qu’il doit y avoir à bord pour nos gars qui mènent l’étape depuis le début, sans réellement avoir l’opportunité de se détacher sérieusement. Cette course, ça n’arrête jamais, c’est une vie sans répit ».

Et ce n’est pas fini, puisque, lorsqu’ils auront terminé le contournement de Sainte-Hélène et feront enfin route directe vers Le Cap, les sept équipages vont avoir le droit en guise de dessert à un ultime obstacle susceptible de redistribuer totalement les cartes. « L’anticyclone de Sainte-Hélène développe une belle dorsale dans son sud (prolongement de l’anticyclone, donc zone sans beaucoup de vent) qu’ils vont devoir traverser, le jeu va être de savoir où traverser, ça promet une belle fin d’étape », commente Fabien Delahaye. A bord de Dongfeng Race Team, cette perspective n’enchante visiblement pas trop Charles Caudrelier : « La petite avance que nous avons (sur MAPFRE, notamment) n’est rien, d’autant que la situation devant nous n’est pas à notre avantage : le vent va revenir de l’arrière et la flotte va se resserrer, ce n’est pas une bonne nouvelle pour nous. La course est loin d’être terminée et tout le monde est dangereux. C’est sympa de mener la flotte depuis le départ, mais c’est aussi stressant, parce que la ligne d’arrivée approche doucement et que ce serait dur de perdre cette première place ».

Dans ces conditions, certains vont peut-être tenter de jouer la carte du mode furtif (qui permet une fois par étape d’être invisible de ses adversaires pendant 24 heures, seul Turn The Tide a utilisé son joker pour l’instant) pour tenter un coup. « Nous avons discuté de l’opportunité de passer en mode furtif, nous ne savons pas si nous allons l’utiliser maintenant ou plus tard », a ainsi commenté le navigateur de MAPFRE, Juan Vila, avant de conclure, à propos de la possibilité de dépasser Dongfeng Race Team dans la dernière ligne droite : « Il va y avoir beaucoup d’opportunités sur toute la route jusqu’au Cap, nous allons faire de notre mieux pour trouver le bon moment, tout peut arriver… » Fin du suspense vendredi ou samedi prochains !

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