La voie de la sagesse
A mi-chemin entre les Bahamas et les Açores, une onde tropicale se profile sous forme d’une formation orageuse active. Pour l’heure, le minimum dépressionnaire associé ne présente pas de caractère de dangerosité avéré, mais la température de l’eau, exceptionnellement chaude en cette période de l’année, conditionne une forte instabilité. A terme, la formation d’une tempête tropicale fait partie des hypothèses plausibles.
Autour des tables de la zone coureurs de la marina de la Vela Latina, les solitaires n’avaient que ce mot à la bouche. Dans l’attente de la décision de la direction de course, tous supputaient les cas de figures possibles. Car ce matin, les routages incitaient clairement à privilégier une route très nord proche de la route directe, mais potentiellement sur la route de la possible tempête tropicale. Et tous d’échafauder des hypothèses sur les pourcentages de chance de transformation de l’onde tropicale en profonde dépression, voire en formation cyclonique. 20% de chances, c’est une hypothèse acceptable arguaient certains quand d’autres estimaient que c’était encore trop.
Détour par le Cap-Vert
En l’occurrence, la direction de course a tranché. Parce qu’il ne saurait être question de prendre le risque d’envoyer une flotte de bateaux de 6,50m de long, dans des vents supérieurs à 45 nœuds et une mer démontée, Denis Hugues, en accord avec l’organisateur, a donc décidé d’imposer une porte entre les îles de Santo Antao, au nord et Sao Vicente au sud. En termes de distance, c’est un détour de 200 milles environ par rapport à la route directe, soit une grosse journée de navigation supplémentaire pour rallier la Martinique. C’est en revanche la garantie d’être suffisamment éloigné du centre potentiel de la dépression tropicale. En tout état de cause, le passage par le canal entre les deux îles pourra permettre éventuellement d’annoncer de nouvelles dispositions aux coureurs en cas de dégradation de la situation météorologique.
Une donne stratégique modifiée
Bien évidemment, le passage par les îles du Cap-Vert modifie quelque peu la donne stratégique. Là où certains espéraient un champ des possibles très ouvert, il va falloir s’adapter à une navigation plus fine, où le rythme de déclenchement des empannages comptera certainement plus que le choix de grandes options marquées. Il va falloir être à l’affut des angles de vent, être opportuniste sur la route des alizés qui ne sont jamais, quoi qu’on en dise, vraiment réguliers. Ceux qui craignent de jouer le petit train sur la route de la Martinique en seront pour leurs frais. 20% de risque cyclonique, c’est peu peuvent penser certains. Mais qui déciderait de prendre la route sur une voiture dont les freins auraient 20% de chances de lâcher ?