1 500 ans après Sinbad Le Marin, un marin omanais fait à nouveau parler de lui. Fahad Al Hasni – 34 ans – est aujourd’hui le meilleur des coureurs au large du Sultanat et s’apprête à prendre le départ de la Transat Jacques Vabre le 5 novembre prochain aux côtés de Sidney Gavignet. L’enjeu est de taille pour Fahad qui, même s’il a déjà traversé quatre fois l’Atlantique, s’attaque aujourd’hui à un monument. La Route du Café, c’est la plus longue des transats et elle se dispute en double. « Il est taillé pour cette aventure » assure Sidney qui suit sa progression depuis 5 ans.

Fahad intègre la filière Oman Sail en 2008. Avant ça, il vit de la mer en la faisant découvrir aux vacanciers mais la voile reste un monde inconnu. Tout juste a-t-il tiré quelques bords en catamaran quand il a décidé de postuler à ce programme débuté quelques mois plus tôt. « J’avais envie d’aventure » explique-il. Savoir nager, courir, les prérequis sont simples mais la sélection est drastique. Les 1 000 candidats sont mis à l’épreuve sur des activités physiques et, à la fin, ils sont une douzaine à intégrer le programme et à – enfin – pouvoir approcher d’un bateau à voile. L’athlétique Fahad est de ceux-là et embarque sur tous types d’unités avec une prédilection pour ce qui se passe loin de la côte. « J’aime toutes les sortes de voile mais, au large, il faut savoir tout faire » explique-t-il.

En tant que coach, Sidney salue l’esprit « guerrier » et « dur au mal » de Fahad. Il se souvient : « Nous avons tenté un record du Tour d’Irlande en plein hiver. Au niveau du Pays de Galle, le vent venait des montagnes avec de la neige. C’était glacial, mais il ne s’est pas plus plaint que les équipiers européens alors qu’il vient d’un pays chaud. » En 7 ans, le chemin parcouru par Fahad est énorme. Le débutant qui ne savait pas mettre une écoute sur un winch est maintenant prêt pour traverser l’Atlantique en double, ou même s’attaquer à des tours du monde. « Il ferait un bon équipier sur la Volvo » souligne Gavignet.

Ça tombe bien car le Tour du Monde en équipage fait partie des objectifs de Fahad, comme de bon nombre de marins omanais. Maintenant qu’il a gouté à la navigation en équipage réduit, Fahad s’autorise même d’autres rêves. La Route du Rhum l’attire, le Vendée Globe l’aimante. Avant ça, c’est à Salvador de Bahia (Brésil) que ce nouveau Sinbad doit faire escale. Départ le 5 novembre.

Interview de Fahad Al Hasni.

« Avant d’intégrer Oman Sail, j’emmenais des touristes en mer pour pêcher, aller voir les dauphins, … C’était en bateau à moteur. Je vis face à la mer, à Muscat. Il y a une grande tradition de pêche dans ma famille. Dès que nous voulons du poisson, nous partons pêcher. C’était un deuxième métier. J’avais envie d’aventure. J’ai toujours aimé les choses dangereuses. Un jour, je suis tombé sur un magazine qui parlait d’Oman Sail et ils disaient chercher des candidats pour intégrer le programme. Il fallait savoir nager et être capable de courir quelques kilomètres. Je me suis inscrit sur le site internet et ils m’ont rappelé pour faire des tests. Au début, il fallait courir, faire des pompes, etc… C’est seulement à la fin qu’on a fait du bateau. Au départ, nous étions 1 000, puis 400 et enfin, ils en ont gardé 12.

J’ai débuté avec les Extreme Sailing Series. C’était très dur et c’était trop tôt pour moi. L’équipe n’avait pas le temps de m’expliquer. J’ai demandé à aller sur un projet course au large. Le coach était Néo-Zélandais. J’ai appris énormément et très vite. J’aime toutes les sortes de voile mais, au large, il faut savoir tout faire. J’ai ensuite participé au Tour de France à la Voile. Ça a été une très bonne expérience. Le but ultime est de faire une Volvo Ocean Race et j’aimerais aussi faire du solitaire pour ma propre histoire. Je rêve de la Route du Rhum ou du Vendée Globe. Tous les marins rêvent du Vendée Globe. A Lorient, j’ai la chance de croiser ces bateaux. C’est le rêve absolu. Cette Transat Jacques Vabre est une super opportunité pour apprendre. C’est la première fois que je vais passer l’équateur. »

Interview de Sidney Gavignet :

« En course au large, Fahad est nettement au-dessus des autres à Oman. Il a le niveau pour le faire et le support le permet également. Il barre vraiment pas mal et il règle pas mal du tout. C’est un équipier valable pour une Volvo Ocean Race. Sur une course en équipage réduit, il faut tout comprendre à bord. En mer, c’est un guerrier. Il est dur au mal. Lors d’une tentative de record, en trimaran, il faisait extrêmement froid avec le vent et la neige qui venait des montagnes et il ne se plaignait pas plus que les équipiers européens alors qu’il vient d’un pays chaud. Il n’a pas peur, c’est à la fois une qualité et un défaut mais il a maintenant une bonne expérience de la casse. Cette expérience-là, elle ne s’acquière qu’avec les années. Il a vécu de vraies expériences utiles. Quand on est au large, j’ai confiance en lui. Il est taillé pour cette aventure-là. Il y a sept ans, il ne savait pas dans quelle sens tournait un winch et aujourd’hui il en est là. »

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