La France peut-elle réussir le triplé ?
Lorsque l’on évoque les deux dernières éditions de l’événement phare du RORC qui a lieu tous les deux ans entre Cowes et Plymouth, via le rocher le plus célèbre du sud-ouest de l’Irlande, force est de constater que les bateaux français n’ont pas fait que le remporter, ils l’ont carrément dominé.
Par exemple, lors de la dernière édition de la course en 2015, le JPK 10.80 « Courrier Du Leon » de Géry Trentesaux a gagné de plus de deux heures et demi et, malgré le fait qu’il courrait en IRC Trois, il a battu tous les bateaux qui étaient en IRC Deux sur l’eau. Cette année-là, sept des dix premiers bateaux au classement général étaient français.
Même scénario similaire en 2013 lorsque la Rolex Fastnet Race a connu son premier vainqueur en double avec une équipe « père et fils » : Pascal et Alexis Loisin à bord de leur JPK 10.10 « Night and Day », qui ont battu tous les bateaux, même ceux qui naviguaient avec un équipage complet. Cette année-là, 12 des 14 meilleurs bateaux étaient français.
Peu de choses ont changé cette année. Géry Trentesaux est de retour, mais cette fois dans la classe des Multicoques à bord du catamaran TS42 « Guyader Gastronomie ». La course de cette année sera spéciale, puisqu’elle marque le 40ème anniversaire de sa première participation à la Fastnet.
Les Loisin sont aussi de retour à bord de « Night and Day ». Ils ont toujours leur avantage concurrentiel, après avoir gagné en IRC Quatre et terminé troisièmes au général de la dernière Channel Race. Pascal admet que c’était le seul entrainement qu’ils ont fait ensemble cette année. Mais ils ont beaucoup navigué individuellement chacun de leur côté : « Alexis a fait le Figaro, et j’ai passé trois semaines de vacances sur mon bateau au début du mois de juillet ! » Alexis est l’un des meilleurs coureurs français en Figaro. Bien qu’il n’ait pas gagné le championnat en équipage restreint de la classe monotype à proprement parler, il a terminé dans le top 10 des sept dernières éditions.
« Night and Day » demeure à peu près identique à 2013, même s’ils ont expérimenté des configurations de gréement hors navigation. Leur dernier set up comprend donc un bout-dehors court à partir duquel ils pilotent leur Code 0 hissé en tête de mât, un tangon plus long pour leur spinnaker symétrique et un A5 – soit une voile de moins qu’en 2013. Grâce à cela, « Night and Day », leur bateau qui a quatre ans de plus et qui a gagné 20 kg, s’est débarrassé de six points de rating.
Noel Racine_s JPK 10.10. Foggy Dew will give Night and Day a tough battle in this year_s Rolex Fastnet Race _ Paul Wyeth_pwpictures.com
Le JPK 10.10 de Noel Racine. « Foggy Dew » donnera du fil à retordre à « Night and Day » dans la Rolex Fastnet Race de cette année. © Paul Wyeth/pwpictures.com
Un sistership bataillera ferme contre eux, le « Foggy Dew » de Noel Racine qui embarquera lui un équipage complet. Son JPK 10.10 a terminé sept minutes derrière « Night and Day » en temps compensé sur la Channel Race, et a il a également terminé en deuxième position derrière lui au classement général de la Rolex Fastnet Race 2013. Cette année, Noel Racine naviguera avec environ la moitié de l’équipage avec lequel il a navigué en 2015 lorsqu’il avait terminé à la neuvième place. Toujours modeste, il estime que « Night and Day » est de nouveau le favori cette année.
Quant à savoir pourquoi les JPK ont remporté les deux dernières courses et ont pris quatre des cinq premières places en 2015, Noel Racine croit que cela vient du large éventail de configurations et de ratings qu’ils peuvent avoir. « Vous pouvez avoir un bateau ancien et lourd, mais si les conditions sont légères au début et qu’il y a du vent à la fin, ils peuvent être devant nous. »
A l’autre extrême de la gamme en terme de taille/vitesse, le deuxième bateau français le plus rapide de la flotte IRC est « Bretagne Telecom », un Mach 45 avec une canting keel (quille basculante) skippé par Nicolas Groleau qui dirige JPS Productions, constructeur du Mach 45 et du très performant Mach 40, dont six sont en compétition dans la Class40. Ce sera la cinquième Rolex Fastnet Race consécutive pour « Bretagne Telecom » qui, dans les deux dernières éditions, l’a remportée dans la classe Canting Keel. Cependant, en raison du manque de concurrents, cette classe a désormais été incluse à l’IRC Zero. Nicolas Groleau espère qu’ils auront de bonnes conditions de reaching, dans lesquelles « Bretagne Telecom » peut exceller.
Quant à savoir pourquoi les bateaux français réussissent aussi bien, Nicolas Groleau pensent que cela vient des bateaux de série que fabriquent les français : « Dans des conditions de vent medium, les bateaux de série avec un faible rating et un bon équipage sont les meilleurs. Les JPK sont très efficaces dans ces conditions. Les bateaux anglais sont plus de vrais racers. » À cet égard, son propre bateau tient plus du racer-cruiser. « Nous n’avons pas de cabines. Il n’y a pas de bois à l’intérieur. »
Second fastest French boat in the IRC fleet is Nicolas Groleau_s Mach 45 Bretagne Telecom _ Pierre Bouras
Le second bateau français le plus rapide dans la flotte IRC est celui de Nicolas Groleau, le Mach 45 « Bretagne Telecom ». © Pierre Bouras
Les trois skippers sont d’accords sur une chose. La principale raison de la domination de la France est d’avoir deux excellentes « écoles » de course au large : la classe Figaro et le Tour de France à la Voile d’autrefois (avant qu’il ne devienne un événement de courses in-shores pour les multicoques).
Comme l’observe Pascal Loison : « J’ai remarqué en 2013 que parmi les dix premiers bateaux, vous aviez un ou plusieurs équipiers qui avaient fait le Figaro à bord de huit d’entre eux. J’en avais seulement un – mon fils ! »
Noel Racine est bien d’accord : « Le Figaro est une très bonne école pour les courses au large en équipage restreint, et très bonne pour les courses au large en général. Le Tour de France à la Voile l’était aussi – J’ai plusieurs membres de mon équipage qui ont fait cette course. »
La Rolex Fastnet Race partira de Cowes dimanche 6 août avec le premier départ qui sera donné à 11H00 BST (soit 12H00 CET).