A 3h37, ce jeudi, AINA Enfance et Avenir a franchi la ligne d’arrivée de la deuxième étape des Sables – Horta, s’octroyant ainsi une jolie première place à l’issue d’une course menée tambours battants. La paire Aymeric Chappellier – Arthur Le Vaillant, dont la monture a été mise à l’eau il y a à peine plus d’un mois, a réussi à tenir tête aux deux plus redoutables clients du circuit des Class40, en l’occurrence Tales II et Imerys. Ces deux-là se sont, pour leur part, livrés un incroyable duel jusque dans les derniers milles pour la victoire au classement général. Au final, avec une avance de 13 petites minutes seulement, ce sont les Espagnols Pablo Santurde del Arco et Gonzalo Botin qui l’emportent, même s’ils laissent échapper la deuxième place de la manche retour au duo Phil Sharp – Adrien Hardy, revenu du diable Vauvert après un début de course chaotique dans la molle, au large des Açores.

Le suspense aura donc duré jusqu’au bout. A l’arrivée, le tiercé gagnant de la deuxième étape est, dans l’ordre, AINA Enfance et Avenir, Imerys et Tales II. Les écarts ? Infimes. Jugez plutôt : seulement 14 minutes entre les deux premiers et à peine plus de trois quarts d’heures entre le vainqueur et le troisième. « C’est une victoire un peu inattendue », a commenté Aymeric Chappellier à son arrivée à Port Olona. Le Rochelais ne s’attendait pas à une telle performance, un mois seulement après la mise à l’eau de sa nouvelle monture (un Mach40.3), logiquement encore loin d’être complètement validée et fiabilisée. « Nicolas Groleau, le PDG du chantier JPS, m’a dit « en général, c’est toujours les bonhommes qui lâchent avant le bateau ». J’ai écouté et je n’ai pas lâché ! », s’est amusé Aymeric. Huitièmes de la première étape, lui et son acolyte, Arthur Le Vaillant, avaient rencontrés quelques petits pépins techniques liés à la jeunesse de leur bateau. Lors de cette manche retour, ils sont pu davantage exploiter tout le potentiel de leur machine et naviguer pied au plancher.

Un finish palpitant

« Nous avons été très rapides au reaching. Plus rapides même que les Espagnols dont le bateau est une référence à cette allure », a détaillé le skipper d’AINA Enfance et Avenir qui a parfaitement bien tiré son épingle du jeu tout au long des 1 270 milles du parcours, à la fois en vitesse pure, on l’a dit, mais aussi au tout début, dans les petits airs en quittant l’archipel des Açores. A l’arrivée, le duo a devancé d’un rien Imerys qui, pour sa part, a largement manqué de réussite dans les premiers milles avant de revenir comme une balle lors des 36 dernières heures de course. « Jusqu’au bout, on a espéré doubler Tales II », a avoué Phil Sharp, impressionnant d’aisance au portant lors de la dernière journée de course. « Au bout du compte, ça s’est joué à peu de choses ». C’est un fait. Une fois la ligne franchie, le skipper a patienté, montre en main, pour connaitre le verdict. Pablo Santurde del Arco et Gonzalo Botin, les vainqueurs de la première manche, devaient terminer au moins 43 minutes et 40 secondes (leur avance à l’issue de la première étape) après lui pour qu’il puisse l’emporter. Le hic (pour lui), c’est que seules 30 minutes ont finalement séparé les deux bateaux ce matin.

Treize petites minutes

« Les Espagnols gagnent l’épreuve au général avec 13 minutes d’avance. C’est un écart ridicule mais c’est comme ça. Ils ont vraiment fait une très belle course », a commenté le navigateur Britannique, bon joueur, mais un peu déçu malgré tout d’avoir été confronté à des soucis de spi. Le duo de Tales II, lui, a géré au mieux des problèmes d’électronique et d’informatiques survenus dans les derniers milles, mais surtout tous les coups qu’il a fallu jouer entre Horta et les Sables, ne commettant que très peu d’erreurs. Il n’a cependant appris qu’une fois la ligne franchie et l’arrivée du jaugeur à bord pour le déplombage du moteur, que la victoire était à lui. « Cette victoire fait plaisir, c’est sûr. Quand Imerys nous a doublé, hier, on a eu un moment un peu difficile. Ça a été un peu stressant mais à présent, nous pouvons nous relaxer et savourer. Pour, nous c’est aussi une belle revanche après notre abandon en 2011 », a indiqué Pablo Santurde qui, non seulement conjure le sort, mais en plus termine de la plus belle des manières son histoire et celle de Gonzalo avec Tales II, ce Proto40 étant désormais vendu.

Ils ont dit :

Aymeric Chappellier, skipper d’AINA Enfance et Avenir, vainqueur de la deuxième étape :

« C’est une victoire complètement inattendue. On savait que si on était bien placé, on pouvait jouer. Là, ça s’est déroulé un peu comme dans un rêve. Je veux saluer le travail qu’a fait la voilerie Incidence sur les voiles. Elles tombent super bien, elles sont rapides et c’est grâce à ça aussi que le bateau va vite. Au chantier JPS, j’ai eu un bon conseil, Nicolas (Groleau, PDG du chantier ndlr) m’a dit « en général, c’est toujours les bonhommes qui lâchent avant le bateau ». J’ai écouté et je n’ai pas lâché (rires) ! Nous avons été très rapides au reaching. Plus rapides même que les Espagnols dont le bateau est une référence à cette allure. La différence s’est faite surtout sur des petits détails. Je pense qu’à ce moment-là, on était les mieux toilés. Lors de cette deuxième étape, on a surtout cherché le contact. La première nuit, on l’a passée avec Campagne de France, la deuxième avec Serenis Consulting et la troisième avec Tales II. C’est vrai que quand on était dans un petit paquet, ça nous permettait de nous étalonner, de tester des réglages. A un moment, on a perdu les Espagnols parce qu’on est tombé dans une molle. Ensuite, on est reparti au Nord sur notre option principale, avec Stella Nova, ce qui nous a permis de raccrocher le wagon avec du vent plus favorable et plus fort. Ce qu’on a pu voir et ce qu’on a montré est super prometteur. Au final, arriver à avoir les deux bateaux qui ont tout gagné ces deux dernières saisons, c’est, comme je l’ai dit, complètement inattendu. On savait que le bateau avait le potentiel mais le prouver aussi rapidement, un mois seulement après sa mise à l’eau, c’est vraiment quelque chose. On a bossé comme des fous pour ça depuis le mois de mai, avec des journées de 6h à 22h. On l’a d’ailleurs payé cher à Horta avec des infections pour Arthur et pour moi. On a bien navigué et on a porté haut les couleurs de l’association AINA. On encourage d’ailleurs les gens à découvrir ses actions auprès des enfants et des mamans à Madagascar. »

Arthur Le Vaillant, co-skipper d’AINA Enfance et Avenir, vainqueur de la deuxième étape :

« On très très heureux d’être arrivé, surtout à cette place. On a fait une super bataille navale avec les Anglais et les Espagnols. C’était plutôt sympa surtout vu le contexte. Je n’étais pas en forme au départ, avec mon infection au genou, et je suis encore moins en forme à l’arrivée. Mais bon, je suis là et on s’est bien battu. On a vu les autres tirer comme des ânes sur leurs bateaux alors on a fait pareil (rires) ! A plusieurs moments, on n’était pas trop rassuré parce qu’il y avait beaucoup de vent. Surtout ce matin. On a regardé les vitesses des autres et on s’est dit qu’il fallait tenir la cadence. Le bateau fonctionne. On a commencé à trouver les manettes. Je pense qu’il a beaucoup de potentiel. On est très heureux d’avoir pu faire la course et de finir à cette place.

Phil Sharp, skipper d’Imerys, 2e de la deuxième étape et du général (avant jury) :

« Le début a été très difficile. On est parti dans l’Ouest et on s’est retrouvé empétolé pendant toute la première nuit alors que les autres, plus à l’Est, ont continué d’avancer. On s’est retrouvé en queue de peloton mais on a réussi à bien revenir lors de la première journée grâce à une bonne option au Nord. Ensuite on est reparti plus au Sud pour nous rapprocher de la tête de la flotte mais là où on a vraiment fait la différence, c’est ces dernières 24 heures. On était vraiment plus rapide que les autres. On a espéré doubler Tales II au général mais on a eu des problèmes. Hier matin, la tête de spi a lâché. On s’est arrêté un moment à cause de ça. Au bout du compte, on a quand même fait un super match avec les Espagnols qui nous battent de seulement 13 minutes, ce qui n’est rien du tout. Comme d’habitude, ça s’est joué à peu de choses. On a fait des erreurs tactiques, bien sûr, mais je pense que sur la deuxième moitié du parcours, on a navigué super propre. Adrien (Hardy) est une vraie machine. Il aime le vent fort. Quand il barre dans ce type de conditions, il a le sourire (rires) ! Au bout du compte, on est très content de notre résultat. Les Espagnols ont vraiment fait une super première étape. Pour l’anecdote, aujourd’hui, j’ai fait la traversée du golfe de Gascogne la plus rapide de ma vie. Plus rapide qu’un ferry, je pense. On était encore au cap Finisterre ce matin ! C’est fou ! »

Adrien Hardy, skipper d’Imerys, 2e de la deuxième étape et du général (avant jury) :

« On ne pensait pas qu’à l’arrivée, il allait nous manquer seulement 13 minutes pour aller chercher la victoire. On a fait notre maximum. Forcément, il y a quelques petits regrets. Ce matin, la sangle de tête de spi a cassé. A 15 milles de l’arrivée, l’amure de spi s’est rompue aussi. On s’est arrêté pour changer de voile, ce qui nous a fait encore perdre 2-3 milles. Quand on additionne tout ça… Reste que ce que je retiens moi, de cette course, c’est la performance du nouveau AINA, mais aussi et surtout celle des Espagnols. Par ailleurs, j’ai été très content de renaviguer avec Phil et je le remercie de m’avoir embarqué. C’est toujours sympa de voir les différences qu’il peut y avoir dans les façons de naviguer, de mener un bateau ou de mener une course. J’avoue que, quelques fois, on a quand même eu des difficultés de compréhension avec Phil. Ce n’est pas facile quand on ne parle pas la même langue. Moi, ça m’a parfois un peu limité. Je savais en venant que ça pourrait être un peu embêtant et ça l’a été, mais au final, je suis super content de cette course. »

Pablo Santurde del Arco, skipper de Tales II, 3e aux Sables d’Olonne et premier au général (avant jury) :

« Jusqu’au dernier moment, nous n’étions pas sûrs d’être toujours premiers. Nous avons appris que c’était le cas seulement quand le jaugeur est monté sur le bateau pour déplomber le moteur. C’est lui qui nous l’a confirmé. On savait que ce serait très serré mais de savoir que c’était dans le bon sens pour nous, forcément, ça nous a fait super plaisir. On a quand même eu un peu peur, je dois l’avouer. Quand Imerys nous a doublé, hier, on a eu un moment un peu difficile. Les derniers jours n’ont globalement pas été faciles. Les conditions météo étaient toniques et le contexte un peu stressant. A présent, on peut se relaxer et savourer. C’est une belle revanche sur les dernières fois où j’ai dû abandonner. Au départ, bien sûr qu’on espérait monter sur le podium, mais l’objectif était avant tout de finir la course. Au final, on gagne. Forcément, on est content. Fatigué mais content. »

Gonzalo Botin, co-skipper de Tales II, 3e aux Sables d’Olonne et premier au général (avant jury) :

« C’est une super belle victoire. Pour notre dernière course avec ce bateau, on ne pouvait pas espérer mieux. C’est d’autant plus fantastique que ça a été dur. Jusqu’à la fin, on n’était pas sûr du tout d’être toujours devant au général. On savait qu’Imerys était arrivé avant nous, mais on ne savait pas si c’était de 20, 30, 40 ou 50 minutes. Évidemment, on est content, surtout qu’on a eu une dernière journée difficile. Dans un premier temps, on s’est fait dépasser par Aymeric et Arthur (AINA Enfance et Avenir), puis ensuite par Phil et Adrien (Imerys). Les deux fois, c’est moi qui était à la barre. Je me suis alors dit qu’il était temps que je prenne ma retraite (rires) ! Finalement, ça s’est joué à rien. C’est une belle revanche après notre abandon en 2011. Cette fois, ce qu’on voulait, avec Pablo, c’était d’abord aller jusqu’au bout et bien naviguer. C’est fait ! »

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