Incroyables rebondissements
Avec une arrivée serrée au point que la moitié de la flotte a défilé sur la ligne en moins d’une heure, cette deuxième étape de La Solitaire URGO Le Figaro n’a finalement pas sensiblement bouleversé le classement général cumulé. Même si Adrien Hardy, vainqueur à Concarneau de quelques secondes devant Erwan Tabarly et Nicolas Lunven, en profite pour devenir inquiétant ! Ce rebondissement dans les derniers milles vient après moult surprises depuis le départ de Gijón samedi après-midi…
Trois jours 9 heures 33 minutes 46 secondes : tel est le temps du vainqueur de cette deuxième étape raccourcie à 418 milles. Et à l’arrivée, seulement 54 secondes séparent le vainqueur Adrien Hardy (Agir Recouvrement) de Erwan Tabarly (Armor Lux) qui lui-même devance de 49 secondes Nicolas Lunven (Generali) ! Et derrière ce trio, le Comité de Course voyait défiler un rideau de concurrents séparés de quelques minutes seulement, voire même d’une seule seconde à l’image de Vincent Biarnes (Guyot Environnement) face à Pierre Quiroga (Skipper Espoir CEM-CS)…
Brassage à tous les étages
Tout commençait bizarrement pourtant après un départ retardé devant Gijón pour cause d’absence de vent. La flotte des quarante-trois solitaires peinait à s’extraire des côtes espagnoles et à la nuit tombée, elle se scindait en trois groupes qui s’enferraient dans une bulle sans vent. Or c’est par le centre qu’est venue la solution grâce à un mince souffle qui mit Sébastien Simon (Bretagne CMB Performance) en pole position. Le jeune skipper menait la danse sur ce long bord de près agrémenté de quelques bascules en raison de l’arrivée d’une dorsale anticyclonique açorienne, toute la flotte glissant doucement entre les zones interdites pour cause de tir de missile.
Mais les solitaires étaient très étalés en latitude à cause de cette première nuit qui avait provoqué de gros écarts pour ceux qui avaient choisi les extrêmes : à l’Ouest, Alexis Loison (Custo Pol), Gildas Mahé (Action contre la Faim) et Pierre Leboucher (Ardian) étaient empêtrés dans des calmes ; à l’Est, Yann Éliès (Quéguiner-Leucémie Espoir), Xavier Macaire (Groupe SNEF) ou Jérémie Beyou (Charal) sortaient très difficilement de la pétole… Et à l’approche des côtes bretonnes, la flotte était scindée en trois groupes très espacés, à l’avantage des dix premiers qui peinaient tout de même dans un flux de Nord-Ouest très variable. Au point qu’il s’écroulait totalement à deux milles de la bouée Occidentale de Sein, bloquant le leader Sébastien Simon qui se faisait déborder à contre-courant.
D’île en île
Le Comité de Course avait déjà décidé que le parcours de 520 milles serait raccourci d’une centaine de milles, les skippers devant faire le tour de Belle-Île au lieu de Yeu. Pour autant, si la traversée de la baie d’Audierne pouvait se faire sous spinnaker serré, ce n’était plus le cas en passant devant la pointe de Penmarc’h : un seul skipper continuait sous spi en glissant sous la route, mais Pierre Quiroga dut se recadrer en arrivant sur Belle-Île où la brise de Nord-Est à Est s’écroulait. Or il fallait faire le tour alors que le courant de marée s’inversait : le vent devenant très mou avant de repasser au secteur Nord-Ouest créait une première compression de la flotte et les écarts conséquents du golfe de Gascogne étaient déjà sérieusement réduits.
Alors qu’il ne restait qu’une cinquantaine de milles de la bouée de La Galère à l’arrivée, la flotte devait donc louvoyer contre une brise assez instable qui avait volonté à repasser au Nord-Est à la nuit tombée. Et là encore quand les leaders peinaient le long des côtes lorientaises, leurs poursuivants revenaient du diable vauvert sous spinnaker au point que l’entrée dans la baie de Concarneau était presque embouteillée. Erwan Tabarly avait semble-t-il course gagnée lorsque Nicolas Lunven tentait de se glisser à l’intérieur, mais le duo se faisait dépasser de quelques longueurs par Adrien Hardy resté sous génois…
Quelques changements au cumulé
Cette compression finale de la flotte sauve nombre de skippers qui se voyaient en délicatesse avec le classement cumulé sur deux étapes, à l’image de Yann Éliès qui avait concédé plus de vingt milles dans le golfe de Gascogne ! Mais ces arrivées en rafale confirme Nicolas Lunven en haut du tableau même s’il perd quelques précieuses secondes avec la victoire d’Adrien Hardy, deuxième à Gijón mais premier à Concarneau : le Nantais n’a plus que 11 minutes et 58 secondes de retard.
Charlie Dalin, sur la troisième marche du podium cumulé provisoire, en profite tout de même pour passer devant Sébastien Simon, malheureux au passage de l’Occidentale de Sein. Et si Yann Éliès conserve sa cinquième place acquise en Espagne, il concède désormais plus d’une heure sur le leader… Enfin il faut souligner la superbe position du premier « bizuth », Julien Pulvé, qui termine à la sixième place (après une huitième place à Gijón) et qui peut encore prétendre au podium à Dieppe ! Les solitaires n’auront qu’un peu plus de 24 heures pour récupérer de cette étape incroyable et particulièrement sollicitante nerveusement et physiquement avant d’entamer la troisième manche, un sprint aller-retour de 150 milles entre Concarneau et l’estuaire de la Loire.
Arrivées à Concarneau
- Adrien Hardy (Agir Recouvrement) 3j 09h 33’ 46
- Erwan Tabarly (Armor Lux) 3j 09h 34’ 30
- Nicolas Lunven (Generali) 3j 09h 35’ 21
- Charlie Dalin (Skipper Macif 2015) 3j 09h 36’ 43
- Anthony Marchand (Ovimpex-Secours Populaire) 3j 09h 38’ 52
- Julien Pulvé (Team Vendée Formation) 3j 09h 44’ 12 – premier bizuth
- Sébastien Simon (Bretagne CMB Performance) 3j 09h 44’ 53
- Martin Le Pape (Skipper Macif 2017) 3j 09h 46’ 15
- Gildas Mahé (Action contre la Faim) 3j 09h 47’ 52
- Benjamin Dutreux (Sateco) 3j 09h 49’ 27
Classement cumulé provisoire
- Nicolas Lunven (Generali) en 5j 17h 06’ 37
- Adrien Hardy (Agir Recouvrement) en 5j 17h 18’ 25 à 11’58 du leader
- Charlie Dalin (Skipper Macif 2015) en 5j 17h 36’ 52 à 30’15 du leader
- Sébastien Simon (Bretagne CMB Performance) en 5j 17h 43’ 55 à 37’18 du leader
- Yann Éliès (Quéguiner-Leucémie Espoir) en 5j 18h 12’ 05 à 1h 05’28 du leader
- Julien Pulvé (Team Vendée Formation) en 5j 18h 18’ 26 à 1h 11’49 du leader
- Gildas Mahé (Action contre la Faim) en 5j 18h 31’ 02 à 1h 24’25 du leader
- Justine Mettraux (TeamWork) en 5j 18h 41’ 45 à 1h 35’08
- Damien Cloarec (Saferail) en 5j 18h 43’ 09 à 1h 36’32
- Benjamin Dutreux (Sateco) en 5j 18h 46’ 07 à 1h 39’30
Ils ont dit
Adrien Hardy (Agir Recouvrement) 1er de l’étape 2
« C’est moi qui gagne cette étape alors que j’étais loin d’être celui qui était devant pendant longtemps. Il y a eu beaucoup de leaders et je n’en faisais pas partie : j’ai juste était bon pour le finish. Je suis déçu de ne pas avoir tout compris en stratégie, en revanche, j’ai beaucoup donné sur le bateau. Je pensais finir entre 6ème et 8ème. J’ai eu beaucoup de rigueur sur la fin de l’étape, c’est ce qui m’a permis de faire la différence. Je sais ce que c’est que d’être devant et de se faire voler la victoire sur la fin. On était tous proches, il fallait être bon sur la fin. Je suis allé dans les cailloux, je le sentais bien. J’aime le jeu de la régate tout simplement. Le passage dans la chaussée de Sein était un super moment ! »
Erwan Tabarly (Armor Lux) 2e de l’étape 2
« Je n’étais pas loin de l’emporter jusqu’à 500 mètres de la ligne. J’étais devant, je me suis fait avoir sur la fin. Je fais une belle course, souvent en tête. Dommage que je ne l’emporte pas car c’était ça mon objectif… On était dans la pétole : Nicolas Lunven est passé devant, je l’ai redoublé et finalement c’est Adrien Hardy qui est passé. On tombait dans des trous d’air. C’était une belle étape. Je n’ai presque pas vu Adrien ! Sur un dernier coup, il nous est passé dessus un peu comme ça. Celle-là, j’aurais bien aimé l’emporter, c’était une arrivée à Concarneau en plus. C’est le sport ! On remettra ça pour la prochaine. »
Nicolas Lunven (Generali) 3e de l’étape 2
« Quand on était en approche de la Chaussée de Sein, j’avais sept milles de retard sur le premier. Finalement, il y a eu un regroupement général, je me suis remis dans le match et je fais une étape de 3ème. Je n’ai pas trop d’état d’âme, j’ai gagné la première étape, il en reste encore. Effectivement, à un moment donné, je n’étais pas super bien sur cette étape. Je n’étais pas non plus 25e. A ce moment là, il y avait Yann Eliès et Jérémie Beyou qui avaient beaucoup de retard. Finalement, on arrive serré, ça n’a servi à rien de faire tout ça ! Adrien a vraiment fait un super coup, un de plus ! »
Charlie Dalin (Skipper Macif 2015) 4e de l’étape
« Je ne reprends du temps qu’à Sébastien Simon : au final il va falloir quand même que je reprenne du temps sur les autres étapes. Je suis dans le match. C’était un début de course piégeux, ce n’était pas facile, le vent rentrait par la gauche, et finalement il est tombé. Je pensais que la course était pliée à l’Occidentale de Sein, et finalement ce fut un nouveau départ. C’était vraiment une belle étape typique de La Solitaire avec de la pétole, du rase-cailloux, du courant… Maintenant, il va y avoir de la fatigue en plus. Ce paramètre va rentrer en jeu pour la suite. »
Julien Pulvé (Team Vendée Formation) 6e de l’étape et premier « bizuth »
« Ce n’était pas simple d’attraper les wagons. J’ai été agréablement surpris d’être dans ma position. Les leaders ont changé, il a fallu que je m’adapte pour raccrocher à chaque fois. Je suis ravi ! Il fallait être tout le temps sur la machine pour attraper le vent avant l’autre, il n’y a pas eu beaucoup de sommeil. J’avoue que je suis fatigué, mais tout va bien. Le classement bizuth ne bouge pas, c’est une bonne chose. Je trouve rapidement les manettes de mon bateau, je me sens plus polyvalent qu’avant, je commence à avoir le bateau à ma main. J’ai fait des erreurs quand même… Je reste réaliste et serein dans le sens où je fais le mieux possible. Cela m’encourage de faire encore deux belles étapes. »