Alors que les deux premiers ont fait exploser les commentaires en direct sur les TV, les radios, la presse écrite, Internet et les réseaux sociaux, les seize solitaires encore en mer bataillent ferme, qui pour conserver ou gagner une place, qui pour préserver son matériel afin de revenir aux Sables d’Olonne. Du milieu du Pacifique à l’entrée du golfe de Gascogne…

Les deux premiers solitaires du huitième Vendée Globe ont fait vibrer Les Sables d’Olonne, la Vendée, la France, l’Europe et même le monde : émotion, congratulation, humilité, douleur, foule, feu d’artifice, retrouvailles, respect, courage, applaudissements… Mais les deux hommes ont d’un seul coup basculé du monde de la mer à la réalité de la terre. Un choc émotionnel qui a bouleversé Armel Le Cléac’h (Banque Populaire VIII), vainqueur de cette édition en 74 jours 03 heures 35 minutes et 46 secondes, jeudi 19 janvier à 16h 37′ 46 ». Et l’arrivée aux Sables d’Olonne fut une surprise joyeuse pour son coriace adversaire britannique : Alex Thomson (Hugo Boss) lui a mené la vie dure depuis le cap Horn et terminait seize heures plus tard, au lever du soleil après 74 jours 19 heures 35 minutes et 15 secondes de mer !

Beyou attendu lundi

À moins de 500 milles des Sables d’Olonne, le troisième n’est pas à la fête pour achever ce tour du monde de plus de 24 500 milles : Jérémie Beyou mord la queue d’une dépression qui s’échappe vers le Nord et rentre progressivement dans une cellule anticyclonique qui ne va pas faciliter son atterrissage sur la Vendée. Même s’il n’aura pas à monter jusqu’à l’entrée de la Manche comme les deux premiers, il va devoir viser la pointe de Penmarc’h puis suivre les côtes bretonnes et vendéennes avant d’apercevoir Les Sables d’Olonne. Un détour par de petits airs avec un week-end particulièrement mou et psychologiquement dur… Le skipper de Maître CoQ ne devrait ainsi pas en finir avant lundi matin, si la brise reste toutefois coopérative !

Dans le Sud-Ouest des Açores, la bataille fait rage pour la quatrième place car le trio suivant navigue au contact dans un vent de Sud qui prend du coffre au fil des heures de ce vendredi : Jean-Pierre Dick a d’ailleurs empanné cet après-midi pour aller au devant de ce vent qui ne va que se renforcer dès la nuit prochaine pour l’amener jusqu’à l’entrée du golfe de Gascogne… où un gros coup de mou pourrait totalement redistribuer les cartes ! Car si la position plus septentrionale de StMichel-Virbac est un avantage ces jours prochains, toute son avance accumulée lors de cette longue parabole finale risque fort de disparaître dans ce dernier marasme météorologique : Yann Éliès (Quéguiner-Leucémie Espoir) et Jean Le Cam (Finistère Mer Vent) seraient alors à touche-touche avec le Niçois pour proposer un finish à la minute près à l’issue de 79 jours de course !

Des jours voire des semaines plus loin…

Mais pourquoi donc Éole s’acharne-t-il sur Louis Burton ? Le Pot au Noir n’en finit pas de finir… Et Bureau Vallée tourne en rond dans ce pot sans fond. Une lueur d’espoir pointe derrière cet horizon bouché, noir et plombé qui caractérise cette Zone de Convergence Inter Tropicale (ZCIT). Et 1 400 milles plus au Sud, Nándor Fa (Spirit of Hungary) grignote son retard grâce à un alizé de Sainte-Hélène tout de même assez poussif : le Hongrois va devoir patienter jusqu’à la latitude de Recife pour bénéficier d’un flux plus consistant de Sud-Est.

Ce n’est pas non plus l’extase au large de l’Uruguay où Éric Bellion (CommeUnSeulHomme) se bat face à un régime de Nord qui devient de plus en plus orageux en approchant le cap Frio, tout comme Conrad Colman (Foresight Natural Energy) qui se retrouve englué dans une bulle 150 milles plus au Sud… Atteindre la latitude de Salvador de Bahia sera laborieux et long puisque les deux solitaires n’y seront qu’en milieu de semaine prochaine ! L’occasion pour Fabrice Amedeo (Newrest-Matmut) et Arnaud Boissières (La Mie Câline) de combler une partie de leur retard de 800 milles. Tout comme pour Alan Roura (La Fabrique) et Rich Wilson (Great American IV) qui vont se faire pousser par leur dernière dépression australe sur ce Vendée Globe.

Enfin, au cap Horn, l’Espagnol Didac Costa (One Planet-One Ocean) vient tout juste de rentrer dans l’Atlantique : il a passé l’extrémité de l’Amérique du Sud ce vendredi à 14h43 après 75 jours 01 heure 41 minutes. Le pompier catalan est suivi par Romain Attanasio, 65 milles plus loin : le skipper de Famille Mary-Étamine du Lys s’est malheureusement fait mal au bas du dos en tombant de la bôme où il bricolait, dans le cockpit. Même s’il a perdu connaissance quelques instants, le solitaire a repris le fil de la course et devrait embouquer le détroit de Drake en soirée, avant que le vent de Nord-Ouest ne prenne trop de tours… Quant à Pieter Heerema (No Way Back), le Hollandais avance sur le dos d’une dépression australe à 1 000 milles du cap Horn alors que Sébastien Destremau (TechnoFirst-faceOcean) longe la Zone d’Exclusion Antarctique (ZEA), 1 200 milles plus loin…

 

Alex Thomson (Hugo Boss) :

« C’était plutôt relaxant la bataille dans l’Atlantique. Armel était le chassé, j’étais le chasseur. Je plaignais Armel, car la météo était de mon côté : elle me permettait de le rattraper, c’était plutôt sympa… Tant mieux si nous bousculons la course au large en France ! Nous ne sommes pas basés en Bretagne, nous sommes au Royaume-Uni. Nous devons donc réfléchir autrement, être plus malins… Je ne peux pas rester sur une deuxième place, je ne serais jamais satisfait avec cette place-là. Mais il faut être sûr de pouvoir faire encore mieux. Faire une meilleure préparation pour mettre toutes les chances de notre côté : c’est une bagarre, une guerre, c’est brutal, très dur. Vous voulez que je le refasse ? Vous voulez vraiment qu’un Britannique gagne le Vendée Globe ? »

Jérémie Beyou (Maître CoQ) :

« Quand ceux de devant commencent à arriver, ça donne envie. D’autant plus que les conditions que je vais rencontrer jusqu’à la ligne d’arrivée ne vont pas être simples et j’aurais très envie que ce soit déjà derrière moi. Il commence à y avoir un peu d’impatience. J’ai un vent qui est très variable en force et en direction, ça passe de 5 nœuds à 20 nœuds avec des bascules de 30° ou 40° toutes les minutes. C’est hyper dur de faire avancer le bateau, et j’ai une mer qui reste un peu forte d’Est. C’est très compliqué et pour la suite je ne sais pas trop… »

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