Si Armel Le Cléac’h navigue désormais la tête à l’endroit depuis 1h23 la nuit dernière, Alex Thomson devrait franchir l’équateur ce soir. Il y a donc un peu moins de 24 heures d’écart entre les deux premiers qui naviguent au cœur d’un Pot au Noir… bien noir. Etonnamment très active pour la période de l’année, cette zone de convergence intertropicale va bien ralentir les deux leaders, tandis que les poursuivants devraient être moins pénalisés. Pas de pot pour Armel et Alex ! « Le Pot au Noir est anormalement actif pour cette période de l’année mais bon il faut faire avec. Il remonte avec moi vers le Nord. Derrière, cela devrait être plus facile pour mes poursuivants. » souligne le premier de la flotte du 8e Vendée Globe dont le matelas d’avance se réduit d’heure en heure : Alex Thomson n’est plus qu’à 119 milles.

Ce midi encore Alex Thomson se satisfaisait de « conditions champagne » pour Hugo Boss. Comprenez que l’oiseau noir glissait à 14 nœuds sous un ciel bleu tandis que l’oiseau bleu se montrait bien pataud dans le marasme équatorial à 5 nœuds de moyenne. Ce soir, Alex commence à ralentir et espère juste que Banque Populaire VIII ne sortira pas trop tôt du Pot au Noir pour continuer à lui mettre la pression jusqu’à la ligne d’arrivée. Une envie légitime tant la suite du programme paraît compliquée : encore 36 heures dans le Pot au Noir, puis ce sera le retour des alizés de Nord-Est donc de la navigation au près tribord amure, il y aura ensuite le contournement d’une dépression près des Canaries à négocier… Bref, aucun des deux ne va chômer. Le possible jour d’arrivée aux Sables d’Olonne (ETA) est le mardi 17 janvier, impossible en revanche de parler d’écart !

Beyou, Dick, Eliès et Le Cam pleins d’espoir

A moins de 900 milles de la ZCIT, Jérémie Beyou voit bien que qu’il aura des opportunités de réduire son écart avec les deux chefs de file. « J’ai la chance d’être là, en embuscade. Parce que selon ce qu’il va se passer dans l’Atlantique Nord, il y aura peut-être des ouvertures pour revenir » souligne le skipper de Maître CoQ qui observe également ce Pot Au Noir qui se déplace vers le Nord donc qui le ralentira plus tard et peut-être moins longtemps. Les trois Mousquetaires encore aux prises avec l’anticyclone de Sainte-Hélène rêvent également de conditions meilleures : « J’espère qu’on va revenir sur les leaders, qu’ils vont bien galérer dans le Pot au Noir et que nous, on aura une trajectoire tranquille. » confiait le skipper de Quéguiner-Leucémie Espoir ce midi au Vendée Live. Jean-Pierre Dick sur son StMichel-Virbac semble enfin reprendre du terrain à ses poursuivants toujours au coude à coude et qui se voyaient même tout à l’heure sur l’eau !

Trois matches se dessinent dans le Pacifique

Eric Bellion (CommeUnSeulHomme) semble transcendé par les dépressions successives qu’il a négocié de main de maître. Le voilà à 52 milles du tableau arrière de Conrad Colman (Foresight Natural Energy) dans un tout autre système météo que ses poursuivants ! Joli duel à surveiller… Derrière, Arnaud Boissières (La Mie Câline), Fabrice Amedeo (Newrest-Matmut) et Alan Roura (La Fabrique) se tiennent en 126 milles le long de la barrière des glaces. Tout trois ont pris le temps de se reposer et de réparer les bricoles sur leur bateau : ils sont prêts à attaquer !
Enfin, Romain Attanasio (Famille Mary-Etamine du Lys) ne cache pas son envie de croquer l’Espagnol Didac Costa (One Planet One Ocean) à 40 milles de son étrave. On est Figariste ou on ne l’est pas !

Alan Roura, La Fabrique

« C’est cool parce que je me rapproche de Fabrice (Amedeo). Ça fait du bien au moral. Je suis de retour et à l’attaque, on ne lâche rien! L’avarie est arrivée un peu brutalement. Ça a été dur mentalement mais surtout physiquement. C’était une longue bataille pour changer le safran dans des conditions aussi extrêmes. Je ne m’en remets que maintenant. Il fallait aussi réparer le bateau car il y avait pas mal de dégâts. Je le prends comme du positif. J’ai eu la totale avec mon bateau, qui a presque coulé mais j’ai encore plus l’envie de m’arracher pour remonter la flotte et finir ce Vendée Globe en beauté. »

Yann Eliès, Queguiner-Leucémie Espoir

« C’est clair que ça fait quelques milliers de milles qu’on est à touche touche avec Jean. Ce n’est pas déplaisant. Ces dernières 48 heures j’ai eu du mal à aller aussi vite que lui. Je le vois sous mon vent. Malheureusement on ne peut pas se parler car sa HF ne fonctionne plus mais on se voit. C’est déjà pas mal. On a des bateaux qui ont des performances similaires. Chacun a ses petits avantages. Je pense qu’on va aller jusqu’à l’équateur ensemble. C’est sûr que ça apporte tout de suite un peu de vie à bord. Parfois on se sent seuls, en tête à tête avec notre machine et notre ordinateur. On a l’impression d’être sur une solitaire du Figaro. »

Rich Wilson, Great American IV

« Je vais bien. Le bateau va bien. Nous avons une bonne vitesse aujourd’hui. J’avance à 15 nœuds en moyenne avec 25 nœuds de vent. Il ne fait pas encore trop froid mais je pense que dans deux ou trois jours les températures vont descendre. Je ne sais pas quand je vais passer le cap Horn. Peut-être dans 10 jours. Ça sera la quatrième fois pour moi. Je l’ai passé deux fois à la voile et une fois sur un cargo après un chavirage en 1990. J’étais très fatigué ces derniers jours suite à la grosse tempête. J’ai bien dormi cette nuit et ça va maintenant. »

Romain Attanasio, Famille Mary-Etamine du Lys

« C’est tonique là. Je peux vous dire que ça va vite. Je suis à 23 nœuds. J’ai perdu une semaine avec mes problèmes de safran, mais j’ai une formation de Figariste donc j’essaye de prendre les classements avant qu’ils ne tombent. J’essaye de revenir sur Didac (Costa). J’ai envie de rentrer maintenant, donc j’essaye d’aller vite. Je prends morceau par morceau la course. »

Alex Thomson, Hugo Boss

« J’imagine qu’au cours des jours à venir, Armel va être ralenti ce qui me permettra de réduire l’écart. Puis il sortira du Pot au Noir et creusera de nouveau son avance. Je ne m’attends pas à voir une évolution fulgurante, mais il y a toujours un élément de chance par ici. Au cours des deux journées à venir, on aura beaucoup de travail pour sortir de cette zone. Dans l’Atlantique Nord, la situation a l’air complexe, mais les modèles sont désormais d’accord. Est-ce que je peux rattraper Armel ? Peut-être. On verra. Je reste motivé et fais de mon mieux pour obtenir la victoire. Ce serait bien si la bagarre se poursuivait jusqu’à la ligne d’arrivée et je vais faire tout mon possible. »

Conrad Colman, Foresight Natural Energy

« C’est vraiment bien de progresser de nouveau vers l’Est avec le gréement bien en place, les voiles qui me permettent d’avancer et la quille bien positionnée en bas. Cela fait du bien de ne plus être au milieu de nulle part, surtout parce que j’ai pu bénéficier de vents faibles et du soleil pour réparer la grand-voile. J’ai des bleus, des coupures sur les mains et une côte déplacée. Il me faudra quelques journées pour me rétablir. Maintenant que le bateau est prêt, j’ai des vents plus forts qui arrivent du Sud ce qui me permettra d’avancer rapidement vers le cap Horn. »

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