Malgré son avarie de foil, Alex Thomson continue à imprimer un bon rythme en tête de la flotte du Vendée Globe. Les sept premiers (d’Alex Thomson à Jérémie Beyou) continuent de filer à plus de 20 nœuds en avant d’une dépression qui devrait les propulser jusqu’au cap de Bonne Espérance. Le break est fait avec les poursuivants qui doivent prendre des décisions stratégiques importantes…

C’était à prévoir : suite à l’avarie de foil tribord à bord d’Hugo Boss, Alex Thomson perd du terrain sur ses poursuivants. Malgré des vitesses moyennes toujours très élevées, le leader britannique a, en 24 heures, rendu 34 milles à Armel Le Cléac’h (Banque Populaire VIII), 36 milles à Sébastien Josse (Edmond de Rothschild) et 23 milles à Vincent Riou (PRB) qui tient toujours la cadence imposée par les foilers.

Alex Thomson : « Dans le Vendée Globe, il faut s’attendre à l’inattendu »

Ce dimanche, le skipper d’Hugo Boss est revenu sur la casse de son foil et a livré son sentiment sur la suite de la course. Alex Thomson : « Hier j’ai forcément eu une baisse de moral quand le foil a cassé. Aujourd’hui ça va mieux. J’ai toujours un morceau de foil qui sort du bateau et qui me ralentit. Mais je ne peux rien faire, je n’arrive pas à le rétracter davantage. Quand les conditions se calmeront, je plongerai pour couper ce bout qui dépasse. Le bateau marche bien quand même à ces allures, et l’autre foil est intact. Evidemment c’est une déception mais à part cela, tout va bien à bord du bateau. Je m’habitue à mener un IMOCA plus classique plutôt qu’un foiler ! Je suis en forme et je mène toujours la course. Je vais travailler dur, pousser le bateau autant que je peux et rester dans le match. Tout n’est pas perdu. Je vais prier pour que le reste de la course puisse se faire tribord amures… »

Derrière l’animal blessé, la meute est lancée

Toujours bien calés en avant d’une dépression active, Armel Le Cléac’h et Sébastien Josse sont revenus fort même si les écarts ont tendance à se stabiliser dans les derniers pointages. A 18h, ils étaient respectivement à 86 milles et 89 milles de Thomson. Tout l’enjeu réside dans la capacité à pousser le bateau sans prendre trop de risques, à trouver l’indispensable compromis entre performance et préservation de la machine et du marin. Armel Le Cléac’h : « Il faut ménager le bateau pour la suite de la course Je gère mon rythme à bord, selon mes polaires et l’état de la mer, pas en fonction des performances des autres. Je suis à l’écoute de mon bateau. De temps en temps, certains vont plus vite que d’autres mais le plus important est de tenir une bonne moyenne. Il ne sert à rien de se mettre dans le rouge pour récupérer la tête maintenant. »
Le groupe des sept leaders – d’Alex Thomson à Jérémie Beyou (Maître CoQ) – a fait le break sur Yann Eliès (Quéguiner-Leucémie Espoir), relégué à plus de 650 milles de la tête de flotte. Ce paquet de tête navigue dans des conditions de record et pourrait franchir le cap de Bonne Espérance d’ici cinq jours, le vendredi 25 novembre, avec plusieurs jours d’avance sur le temps de référence détenu depuis quatre ans par Armel Le Cléac’h (22 jours, 23 heures et 46 minutes).

L’heure des (bons) choix stratégiques pour le deuxième groupe

Yann Eliès est donc le premier à avoir manqué le TGV qui mène à Bonne-Espérance. Yann et tous les skippers qui le suivent se posent désormais la question de savoir comment se positionner pour la suite, et ainsi trouver comment ouvrir la porte qui mène vers les mers du Sud. Jean-Pierre Dick (StMichel-Virbac) et Jean Le Cam (Finistère Mer Vent) font face à un dilemme : faut-il poursuivre le plus longtemps possible en avant du front suivi par les leaders, qui est moins actif dans le Nord, ou faut-il déjà se positionner pour accrocher la dépression suivante qui arrive rapidement par l’Ouest ?

Toujours en 12e position, Kito de Pavant s’arrache lui aussi les cheveux : « Ce n’est pas une mais deux barrières anticycloniques à traverser ou à contourner ou une autre solution, mais que je n’ai pas encore trouvée. Je vais sans doute être parmi ceux qui vont le plus souffrir de cette situation. Malheureusement, il m’est impossible de l’éviter… J’ai juste le mauvais timing. » Tout ses poursuivants sont dans la même incertitude, les cerveaux et les ordinateurs de bord vont mouliner dans les heures et les jours qui viennent !

Seuls ou accompagnés

Deux semaines après le départ des Sables d’Olonne, certains doivent se sentir plus seuls que d’autres, n’ayant pas de concurrents à proximité immédiate. C’est notamment le cas de Yann Eliès (8e), Thomas Ruyant (Le Souffle du Nord pour le Projet Imagine, 11e), Kito de Pavant (12e) ou encore Enda O’Coineen (Kilcullen Voyager-Team Ireland, 25e), Sébastien Destremau (TechnoFirst-faceOcean, 26e) et Didac Costa (One Planet One Ocean, 27e).

D’autres régatent au contact, parfois à vue comme Jean-Pierre Dick et Jean Le Cam qui ont pu échanger par VHF hier et restent très proches aujourd’hui (6 milles d’écart à 18h).
Il y a d’autres matchs dans le match plus en arrière. Un groupe de six bateaux – d’Arnaud Boissières (La Mie Câline, 14e) à Nandor Fa (Spirit of Hungary, 19e) – se tient en moins de 100 milles. Plus loin, un duel s’organise entre Romain Attanasio (Famille Mary-Etamine du Lys, 21e) et Eric Bellion (CommeUnSeulHomme, 22e) qui se tiennent en moins de 6 milles. Sur la cartographie du Vendée Globe, il faut zoomer au maximum pour réussir à différencier les deux bateaux qui ont en ligne de mire Rich Wilson (Great American IV). Naviguer au contact est forcément un plus pour garder le rythme. Mais attention à ne pas se laisser griser comme l’explique Eric Bellion : « Je ne veux pas jouer à prendre le rythme d’un autre, je ne veux pas me prendre pour quelqu’un que je ne suis pas donc je continue MA course, je ne vais surtout pas me coller le rythme de Romain. Il a un bateau plus vieux et moins performant que le mien mais c’est un bien meilleur marin donc ce ne serait pas raisonnable de le suivre. »

Tanguy de Lamotte (Initiatives-Cœur), lui, est bel et bien seul : en bon marin, il ramène son bateau endommagé aux Sables d’Olonne, où il devrait arriver le week-end prochain. « Je suis à 1200 milles des Sables et je vais avoir du vent dans les jours à venir », disait-il à 15h ce dimanche. « Ce n’est pas habituel de mener un tel bateau en mode croisière et sans les préoccupations de la course. Normalement c’est plutôt la suractivité à bord. La déception reste présente, mais je suis content de me rapprocher des Sables d’Olonne où je vais ramener mon bateau à bon port. »

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