Les 38èmes Régates Royales de Cannes-Trophée Panerai ont honoré les voiliers de tradition qui fêtaient leurs moult décades à l’image de Nan of Fife et Eva qui annonçaient leurs 120ème et 110ème printemps ou des deux New York 40, Chinook et Rowdy désormais centenaires… Mais cette troisième journée pour les yachts classiques n’a pas été facile à négocier avec la belle brise de secteur Sud-Est en baie de La Napoule quand les Dragon et les 5.5mJI ont dû composer avec un vent plus soutenu dans le golfe Juan.

Les jeux ne sont pas faits et rien ne va plus… chez les Dragon qui ont enchaîné déjà huit manches depuis lundi dernier, dont trois régates à suivre ce jeudi dans une belle brise de secteur Sud-Est qui avait tendance à tourner avec le soleil vers le Sud, en se renforçant au fil de l’après-midi avant de s’effilocher en début de soirée. Mais avec huit rounds et une seule et ultime journée vendredi, la hiérarchie commence à s’établir plus clairement parmi les monotypes dessinés par Johan Anker ! Car désormais, la lutte semble tourner au duel pour la victoire finale entre l’Allemand Smaug et le Russe Annapurna, même si quelques Dragon créent la surprise à l’arrivée des manches à l’image de l’Estonien Vitamin-One, vainqueur du premier match du jour alors qu’il avait très mal débuté les Régates Royales…

Et dans le deuxième round du jour, le Russe Anatoly Loginov ne faisait pas de quartier en s’imposant aisément devant l’Allemand Powwow qui ne figurait pas parmi les favoris ! Annapurna faisait donc le break avant la dernière manche du jour car l’Allemand Smaug s’était enferré tout comme le Russe Even Better… Le bon coup de cette mi-journée était frappé par le Britannique Storm, 3ème au classement cumulé ! On connaîtra dans la soirée le classement général cumulé provisoire sur huit manches avant l’ultime confrontation de vendredi…

Maîtres du Métrique

Du côté de la pointe de la Croisette, les 5.5mJI ont bénéficié d’une superbe journée avec trois manches à suivre et un vent de Sud-Est peu perturbé par les îles de Lérins. Toutefois, il fallait jouer avec les bascules et les risées qui ridaient le plan d’eau et l’Allemand Prettynama qui s’était imposé lors du préliminaire de la Régate en Mer de la Société Nautique de Genève (dimanche et lundi), démontrait qu’il était plus à l’aise dans la brise établie. Tout comme ses confrères germaniques Atari et Silver Fox qui s’attribuaient respectivement la 2ème et la 7ème place de la première manche du jour. S’en suivait une belle bagarre dans un vent de Sud-Est désormais bien établi à une quinzaine d nœuds et le trio Hannes Waimer-Markus Koy-Diego Negri (Atari) se hissait en tête de la manche et du classement général ! Avant d’intégrer la troisième manche du jour, quatre équipages étaient ainsi au coude à coude : Atari (GER-6 points), Société Nautique de Genève (SUI-7 points), Feng Shui (NED-8 points) et Prettynama (GER-8 points). La dernière journée de vendredi s’annonce chaude…

Houle sentimentale

Pour une fois, les petits devancent les grands ! Car le vent qu’on attendait mollasson ce jeudi en baie de La Napoule s’est finalement décidé à prendre des tours : douze à quinze nœuds de brise après un départ retardé, voilà de quoi avaler le parcours triangulaire d’un tour, plus rapidement que les « Big Boat » qui en avaient deux au programme… Malheureusement peu après le départ des « Classiques », le voilier britannique Outlaw et l’espagnol Giraldilla se percutaient sans que personne ne soit touché à bord, mais les deux bateaux rentraient au port de Cannes pour évaluer les dégâts collatéraux de cet abordage. Et une nouvelle fois, le 12mJI France était devancé par son sparring-partner de la Coupe de l’America 1970 ! Sovereign réussissait en effet à se glisser à l’intérieur de la bouée sous le vent, quasiment à la fin du parcours après avoir été mené contre le vent. Une nouvelle victoire qui offre à l’équipage de Claude Perdriel une avance que ses deux compagnons d’armes auront du mal à combler d’ici samedi…

Une volée d’anniversaires

S’ils sont pour cette 38ème édition des Régates Royales, dix-huit centenaires présents à Cannes, nombre de voiliers fêtaient leurs décades anniversaires à l’occasion de ce dernier rassemblement de la saison du Trophée Panerai ! Et parmi les plus anciens, Marigold le plan de Charles Nicholson construit à Gosport chez Camper & Nicholson en 1892 restant le doyen de la flotte, Nan of Fife fêtait ses 120 ans à Cannes… Conçu par William Fife III en 1896, ce cotre aurique à flèche, très proche dans ses lignes du Pen Duick d’Éric Tabarly construit deux années plus tard, fut après bien des changements de main, la propriété du père de Philippe Menhinick jusqu’en 1952 : celui-ci le redécouvrit à Port-Camargue à la fin du siècle dernier et Nan fut totalement révisé à Saint-Malo avant de rejoindre la Méditerranée en 2001.

Quant à Eva, il alignait ses 110 ans en baie de La Napoule… Ce plan n°505 de William Fife III fut construit selon les règles de la Linear Rating Rule, mais lancé l’année de la création de l’IYRU qui adopta cette nouvelle Jauge Internationale. Il est donc très semblable aux 8mJI dans ses caractéristiques mais c’était en fait le troisième exemplaire d’un même plan de l’architecte qui en était tellement satisfait qu’il fut réalisé avant même d’avoir une commande ferme qu’un client ! Rebaptisé Valona en 1913, il resta la propriété d’un membre du Royal Clyde Yacht Club jusqu’en 1938 avant de rallier l’Espagne. Quasiment entièrement « refité » par Fairlie Restorations en 2001, il ne reste que la pièce de quille en chêne d’origine mais Eva respecte totalement le plan d’origine.

Et les cent ans d’âge reviennent aux deux sisterships du New York Yacht Club : Chinook (NY48) et Rowdy (NY49) font partie des quatorze monotypes conçus par Nathanaël Herreshoff en 1916. Ces Fighting Forties restent de redoutables adversaires lors des Régates Royales, aussi à l’aise dans les petits airs que dans la brise grâce à leur grande largeur au pont.

Plus jeune de dix ans, Hallowe’en est représentatif de l’évolution des gréements avec l’adoption de la voile Marconi. Très inspiré par les carènes des 15mJI, ce cotre dessiné par William Fife en 1926 et construit à Fairlie dans la Clyde remporta la célèbre Fastnet Race lors de sa deuxième édition, l’année même de sa mise à l’eau !

Et puis Eilean symbole de l’engagement de Panerai auprès des yachts classiques depuis 2005, est l’un des derniers plans de la dynastie William Fife, construit en 1936 à Fairlie. Ce yawl aux lignes très épurées fut aussi la vedette du clip du groupe Duran Duran en 1982 et depuis qu’il porte les couleurs de l’Officine horlogère italienne, il a traversé plusieurs fois l’Atlantique. À quelques encablures le long du quai Laubeuf, Comet représente bien l’évolution architecturale d’après-guerre : ce plan Sparkman & Stephens de 1946 est un quasi sistership de Stormy Weather et de Skylark qui ont mis en avant le cabinet new yorkais. Enfin Paulena et Jalina fêtaient aussi un bel anniversaire : un demi siècle ! Le premier, un yawl Marconi signé Cesare Sangermani, a sillonné le monde entier et le second, un plan Eugène Cornu remportait l’année suivant sa mise à l’eau, la classique course Cowes-Dinard et trois saisons de suite la Giraglia en Méditerranée !

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