Moins de 1000 milles
Encore cinq jours de course pour cinq prétendants à la victoire que rien ne semble pouvoir départager. Dans cette guerre d’usure entamée après le passage du cap Vert, aucun de ces équipages n’a l’intention de capituler. Et même s’il s’agit de remporter une micro bataille, les offensives continuent de se multiplier. Deux attaques sont remarquables en ce 17e jour de mer : celle de Bretagne- CMB Performance qui fond sur le tableau arrière d’Agir Recouvrement. Et celle de Gedimat, l’échappé du sud.
Ça accélère à moins de 1000 milles du but. Pour la première fois depuis l’entrée dans l’archipel du cap Vert, les monotypes atteignent des vitesses à 2 chiffres. Le vent a tourné au nord-est offrant aux équipages un angle plus favorable à la vitesse. Il faut donc s’attendre à une journée sans empannage, sur un seul bord tribord, une course de vitesse sous spi à peine contrariée par les grains. Il faut en profiter car ces jolies moyennes pourraient n’être demain qu’un lointain souvenir. Selon Météo Consult, la présence de petites dépressions secondaires au nord de la flotte va affaiblir et perturber le vent. Ce sera beaucoup plus lent et plus douloureux au fil de l’approche vers l’arc antillais.
Cercle Vert garde l’avantage mais pour combien de temps ?
Le quintet de tête est toujours dispatché sur une ligne nord-sud de 90 milles. Au nord, Cercle Vert est logiquement classé premier car plus proche de la route directe. Mais Gildas Morvan et Alexis Loison savent qu’ils progressent sur une même ligne d’avantages que leurs quatre rivaux plus au sud. Lesquels ne lâchent rien, même si c’est pour remporter une victoire éphémère. Mettre les bouchées doubles en vitesse ou tenter un décalage stratégique, telles sont les armes à la portée de ces combattants.
Bretagne-CMB Performance dans les rétroviseurs d’Agir Recouvrement
Sébastien Simon et Xavier Macaire sont-ils prêts à mettre le clignotant ? Collés à la roue d’Agir Recouvrement (2e) depuis hier soir et désormais décalés légèrement sous leur vent, les hommes de Bretagne-CMB Performance (3e) sont rapides, très rapides. Leur vélocité en ligne droite sous spi : c’est leur point fort dans cette course. Il y a 48 heures, ils accusaient encore 10 milles de retard sur Adrien Hardy et Vincent Biarnès. Ces derniers ne jouissent désormais plus que d’une marge réduite de 2 milles.
Sud record pour Gedimat
Thierry Chabagny et Erwan Tabarly vont marquer cette édition d’une pierre blanche en étant les hommes les plus sud de toute l’histoire de la Transat AG2R LA MONDIALE. Cette plongée stratégique les écarte de la route directe et de leurs proches concurrents. Pour pouvoir combler ce détour d’une soixantaine de milles, il leur faudrait progresser environ 0,5 noeud plus vite en moyenne sur les 5 prochains jours. Un objectif à leur portée, à condition que le vent soit plus fort et/ou que leur angle de remontée vers les Antilles soit plus favorable. Aujourd’hui, en tout cas, ils étaient les plus rapides de tous.
Chaleurs infernales
Ce travail titanesque pour récolter quelques miettes de vitesse se déroule dans une atmosphère torride. Les images envoyées du bord montrent des marins emmaillotés comme des Touaregs pour se protéger du soleil ou en train de s’asperger d’eau de mer, en simple tenue d’Adam sur le pont. « C’est l’enfer cette chaleur » nous dit Gildas Morvan. « Un vrai sauna » observent les Anglais Sam Matson et Robin Elsey. Pour Xavier Macaire, le plus désagréable, c’est la moiteur permanente, les habits définitivement imprégnés de sel et d’humidité.
Encore cinq jours à transpirer à grosses gouttes sous le soleil…
LA PHRASE DU JOUR
« De la terre ferme, la course est très intéressante à suivre ! On voit qu’ils se positionnent tous pour l’arrivée mais elle ne s’annonce pas simple avec des orages et des zones sans vent. Les derniers routages donnaient 15 minutes de différence entre les 4 premiers ! Ça promet une superbe régate jusqu’à St Barthélémy ! »
Yoann Richomme, Skipper Macif depuis la terre ferme. Yoann et Charlie Dalin seront présents à l’arrivée pour accueillir les tandems.
TROPHEE DE LA PERFORMANCE
Le Trophée de la Performance du mercredi 20 avril est remporté par Cuisines Ixina (Tanguy le Turquais et Hervé Aubry) avec 207,4 milles parcourus en 24H
ILS ONT DIT OU ECRIT
Xavier Macaire, Bretagne – CMB performance
« On a 20 nœuds de vent d’est-nord-est, une mer relativement calme, assez plate. Il y a 10 nœuds au compteur, parfois ça surfe à 11 nœuds. Ce sont des conditions de glisse sympas. On fait notre tactique à nous en fonction des bascules de vent, on gère les adonnantes et les refusantes, et on se retrouve juste derrière Agir Recouvrement depuis hier soir. On est contents de le retrouver, c’est top pour nous de l’avoir en visu sur l’écran de l’ordinateur avec ses relevés de vitesse et ses caps, c’est top. On s’attaque à lui en vitesse… On doute parfois de la nôtre, on se pose des questions, on se compare, on reste sur les réglages, on cherche sans cesse à s’améliorer. Question forme physique, il y a des hauts et des bas. Il y a des coups de barre parfois mais aussi des moments de grande forme… On est contents de voir que l’arrivée se rapproche, c’est plaisant de se dire qu’on se rapproche vraiment, ça remonte le moral.
En ce qui concerne la chaleur : « Ce qui me gêne le plus, c’est la moiteur. Tout ce qui est à bord est moite. Je n’ai plus de t-shirt propre, mes t-shirts sont moites, plein de sel, ça ne sèche jamais. Ce n’est pas très agréable de ne pas pouvoir se laver. Chapeaux, lunettes, manches longues, crème solaire, on se protège au maximum.
Yannig Livory, Lorientreprendre
« On a 18 nœuds de vent, on avance doucement. L’objectif est d’avancer et d’aller le plus vite possible. C’est quand même un peu dur à vivre, un peu long… On en profite malgré tout, on a signé pour être en mer, mais sportivement, c’est moins marrant, c’est difficile depuis dix jours. C’est ce qu’on voulait faire, donc on le fait… On discute de plein de choses, on fait le point sur plein de trucs. Ca ne va pas être très fort, ça risque de mollir un peu, ce ne sont pas des alizés très forts. »
Gildas Morvan, Cercle Vert
« Depuis une semaine, cela ne se passe pas trop mal. Depuis le Cap Vert, l’opération de couper le fromage s’est plutôt bien déroulée, car ce n’est pas encore payant pour les gens du sud, mais cela peut changer… On est dans le match, on s’applique sur le bateau, on va se bagarrer jusqu’au bout. Pour la fin, dans les îles, on a regardé et ça n’a pas l’air jojo ! Il y a des dépressions orageuses, un anticyclone bas, donc ce sera plutôt des conditions faibles, il n’y aura pas vraiment d’alizés. A propos de la chaleur : la nuit c’est agréable, mais la journée, c’est l’enfer, c’est très très dur de tenir. Du coup, on fait des petits quarts, et surtout on se mouille régulièrement. On prend un seau pour s’asperger, on en met dans le chapeau, on tient comme ça… On est salé, mais on transpire, donc le sel s’évacue. Nous avons tout ce qu’il faut en eau et nourriture. L’important c’est de dormir régulièrement et nous sommes plutôt en forme. On se dit qu’il faut être frais pour le final surtout s’il y a de la pétole. »
Arthur Bouwyn, Guadeloupe
« On tient le coup ! On essaye de finir la course, mais on trouve le temps un peu long… On a fait un décompte des jours qu’il nous reste, soit 9 jours. Pour faire passer le temps plus vite, on change un peu les quarts, on essaye de varier quelques trucs. C’est surtout que nous sommes tout seuls, le dernier bateau que l’on a croisé, c’était il y a trois jours, c’est le désert ici ! Nous regardons aussi les réserves d’eau et de nourriture pour s’empêcher de piocher sans faire gaffe. On ne manquera pas, il faut juste faire attention. On s’attendait à ce genre de choses intenses et très poussées physiquement. Mais c’est plus long que prévu, je ne m’attendais pas à trouver le temps long. Nous avons hâte d’arriver… »
Message envoyé cet après-midi par Artemis
« Salut à tous. Tout va bien à bord d’Artemis. Aujourd’hui il fait très chaud, c’est comme être dans un sauna toute la journée, mais les Scandinaves disent que c’est bon pour la santé donc c’est que ça doit l’être. On est au nord de la flotte, nous sommes contents d’être dans cette position, on fait marcher, et on attend de voir si cette tactique paye et comment on pourra maximiser nos gains d’ici l’arrivée.
L’arrivée est dans 4 jours maintenant et on commence déjà à penser à ce qu’on va manger. Pour ma part, je suis à la recherche d’un immense steak pour passer des heures à le manger ! Sam partirait plus sur un curry indien même si je ne pense pas qu’il le trouvera là-bas. Pas grand-chose de plus à raconter si ce n’est que nos estomacs commencent à gargouiller ! Robin and Sam ».
LE CLASSEMENT DU 20 AVRIL 16H00
- CERCLE VERT (Gildas Morvan-Alexis Loison) à 959,16 milles de l’arrivée
- AGIR RECOUVREMENT (Adrien Hardy-Vincent Biarnes) à 961,96 milles du premier
- BRETAGNE-CMB PERFORMANCE (Sebastien Simon-Xavier Macaire) à 966,26 milles
- GENERALI (Nicolas Lunven-Gildas Mahe) à 979,46 milles
- GEDIMAT (Thierry Chabagny-Erwan Tabarly) à 981,31 milles
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