« Je suis transi de froid là, j’étais à l’intérieur en train de dormir et je suis trempé ». C’est Yoann Richomme qui nous parle ce matin à 5h00 alors que Skipper Macif, au sud de la flotte, mène toujours la danse dans le golfe de Gascogne, au grand large de la Vendée. Une danse chaloupée – et c’est un euphémisme –dans une houle traversière de 2 mètres qui provoque des embardées, le bateau couché, les chandeliers dans l’eau. Yoann, Adrien Hardy (Agir Recouvrement) et Gildas Morvan (Cercle Vert), les trois marins joints à la vacation ce matin, nous dépeignaient tous le même tableau : humidité, froid et mer tapageuse.

Difficile de se tenir à l’intérieur et de trouver un sommeil réparateur, tandis que sur le pont, c’est aussi un exercice d’équilibriste. Le front est passé hier soir, prodiguant un vent de 30/35 nœuds, obligeant les équipages à réduire la voilure. La flotte a viré hier aux alentours de 23 heures et progresse maintenant vers le cap Finisterre au près, tribord amure, dans un vent de sud-ouest d’une vingtaine de nœuds et une mer toujours très désagréable.

Dès hier soir, chacun s’était placé pour aborder la difficulté et la grosse incertitude de ce lundi : le franchissement d’une zone dépressionnaire sans vent. Résultat, les Figaro-Bénéteau 2 sont étalés sur une bonne vingtaine du nord-ouest au sud-est, si bien que la plupart se sont perdus de vue à l’AIS (Automatic Identification System) et naviguent « en aveugle ». Skipper Macif, le leader du moment, est positionné à l’extrême sud, proche de la route directe, non loin de Bellocq Paysages-Saveurs de Cornouaille. Au nord, de l’autre côté du spectre, deux bateaux ont une idée radicalement opposée des évènements météo à venir : Agir Recouvrement et Generali. Entre ces deux options tranchées, une multitude de choix.

Ce n’est qu’au terme de ce premier jour de mer, alors que le vent va mollir et devenir instable, que l’on connaîtra le résultat de ces stratégies. Une journée pleine de suspense s’annonce dans le golfe de Gascogne.

ILS ONT DIT

Skippers MACIF / Yoann Richomme :

« Nous venons de passer le front vers 23h TU. Tranquillement, nous étions les premiers à virer puis on a fait cap au sud pour échapper à une molle. La nuit s’est bien passée, le vent est monté jusqu’à 30 35 nœuds mais jamais très longtemps. Nous avons quand même pris des ris. C’était assez maniable mais nous avions une grosse mer.
Ce n’était pas très agréable, on n’a pas réussi à manger. Tout va bien à bord. J’étais en train de dormir, je suis trempé, j’ai froid. C’est la seule nuit où il va faire aussi froid. On a 22 nœuds de vent et deux mètres de houle assez cassante, ça tape beaucoup. La nuit est noire. Nous avons croisé quelques bateaux. Le vent est actuellement au 240. J’ai l’impression que ça commence à se calmer au niveau des paquets de mer. Comme il y a beaucoup de houle, le bateau se couche pas mal. On a les chandeliers dans l’eau. Nous sommes en mode escalade dans le cockpit. Mais le plus gros est passé.
Les fichiers donnent une zone très perturbée à venir, très molle voire même sans vent. Du coup, il y a plusieurs options. On ne sait pas ce qu’ont fait les autres. Nous avons décidé de contourner cette zone par le sud et nous pensons qu’il y avait aussi la possibilité de la contourner par le nord ouest. Donc les options sont assez tranchées. Nous sommes contents de notre position. On a fait du bon travail, on a eu Gedimat pendant longtemps pas loin de nous, ça nous a bien servi de lièvre.
Nous sommes partis sur des routes un peu différentes cette nuit. Je vais aller remplacer Charlie sur le pont et on attend le prochain fichier avec impatience car la situation est très instable et on n’est pas très sûrs de notre position. »

Agir Recouvrement / Adrien Hardy :

« La nuit on est en plein dedans, comme prévu pas si facile que ça avec des grosses bascules de vent en direction depuis Penmarc’h. Il fallait être au réglage et nous avions un virement à placer. Nous avons choisi de virer vers 23h. On est en tribord, en route vers le Cap Finisterre. C’est sympa, le bateau tape beaucoup. On est trempé. On a un peu froid tous les deux. Au début, nous étions au rappel et là on a arrêté le rappel. Celui qui ne barre pas se repose à l’intérieur. Nous avons un léger décalage dans l’ouest. Finalement, il va se passer des choses importantes dans quatre cinq heures car le vent va mollir et tourner au nord. Il y a cette zone de transition à franchir. On est content. On a un bon lièvre à notre vent avec Generali. Le moral est bon, ça va impeccable. C’est agréable de naviguer avec Vincent, je suis vraiment content. On va faire une belle transat. J’ai dormi une bonne heure et j’étais en train de prendre la météo. Je ne vais pas tarder à ressortir pour que Vincent puisse se reposer un peu. »

Cercle Vert / Gildas Morvan :

« Ça va. Je faisais une petite sieste. Cette nuit, c’était saute-mouton, on a sauté les vagues. Nous avons eu jusqu’à 30 nœuds. Ça cogne encore là. De temps en temps, le bateau monte bien. Il y a encore 20 nœuds. On fait du 200, nous sommes à 20° de la route. On a fait des relais toutes les deux heures car c’était compliqué pour celui qui ne barrait pas de rester sur le pont. Ce n’était pas facile de se tenir. On a mangé hier soir des paupiettes. On est en forme car on a bien mangé et on a dormi régulièrement. Les modèles météo que l’on reçoit ne sont pas d’accord sur les conditions à venir pour les prochains jours. Ça devrait mollir dans quelques heures. On est à peu près là où on voulait être donc c’est bien. Il fait froid là ! »

CLASSEMENT DU 04/04/2016 A 5H

  1. SKIPPER MACIF (Charlie Darlin / Yoann Richomme) à 3761,88 milles de l’arrivée
  2. GEDIMAT (Thierry Chabagny-Erwan Tabarly) à 0,23 milles du premier
  3. BRETAGNE-CMB PERFORMANCE (Sebastien Simon-Xavier Macaire) à 0,88
  4. CERCLE VERT (Gildas Morvan-Alexis Loison) à 1,20
  5. BELLOCQ PAYSAGES SAVEURS DE CORNOUAILLE (Martin Le Pape-Eric Péron) à 1,48

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