C’est avec une précision horlogère que l’équipage du maxi-trimaran IDEC SPORT a mis en oeuvre la stratégie de route imaginée conjointement par Marcel van Triest depuis la terre et Francis Joyon depuis sa table à carte, pour s’extirper sans trop de mal de deux terribles pièges météos jetés sur leur route au coeur de l’océan Pacifique. Le contournement d’un premier centre dépressionnaire se sera au final révélé un poil plus pénalisant que prévu, tandis que la traversée d’une dorsale anticyclonique cette nuit aura légèrement moins freiné le multicoque géant qu’initialement estimé. Joyon et son commando de 5 hommes sont désormais calés sur une autoroute, certes mal pavée, mais qui conduit tout droit, et sans trop de manoeuvres lourdes à effectuer, directement vers la marque rêvée et fantasmée par tous les marins du globe, le célèbre cap Horn.

Sur les talons de Banque Populaire V

« Comme prévu, nous accélérons progressivement » explique Bernard Stamm. « Ce n’est pas encore l’heure des longues glissades. Le vent souffle plutôt en travers du bateau, et il oscille beaucoup en force, entre 10 et 20 noeuds. A chaque survente, le bateau « lève la patte », et grimpe sur un patin. Il faut être très vigilant à la barre et aux écoutes! C’est sportif, mais on ne se plaint pas après les deux jours de petits temps que nous venons de traverser. »

Même écho chez Clément Surtel, l’homme qui connait peut-être le mieux le maxi trimaran IDEC SPORT pour avoir participé à son avènement sous le nom de Groupama IV.

« Au moins, le petit temps m’a-t’il permis de bricoler à droite et à gauche sur le bateau » raconte Clément qui s’apprête avec un plaisir non dissimulé à vivre son premier Horn. « Cela revêt une signification particulière bien sûr. C’est un rêve et un aboutissement… On y pense, on en parle, avec Bernard et Francis qui se remémorent des anecdotes…»

IDEC SPORT va allonger progressivement la foulée avec la rotation du vent au sud-ouest. Un passage à la marque hautement symbolique du Horn dans les temps du record est toujours dans les cordes du bateau. Banque Populaire V, détenteur du Trophée, en son 28ème jour de course, avait connu une de ses plus calamiteuses journées avec un peu plus de 200 milles gagnés sur la route. Les 6 hommes d’IDEC SPORT piaffent d’impatience à l’idée de renouer avec l’ivresse et l’adrénaline des étonnantes performances déjà affichées par le maxi-trimaran dans l’Indien. « On a tenu durant des heures des vitesses à plus de 40 noeuds! Ce bateau est époustouflant et capable de tout! » résume Surtel.

Noêl en Atlantique

Le décor change ainsi au rythme des quarts scrupuleusement respectés par les Joyon boys! « Avec le froid, le temps de barre est réduit à 30 minutes » explique Francis. « Le vent que crée le bateau est piquant depuis ce matin. On a remis gants, bonnets et polaires, et rallumé le chauffage dans la penderie à cirés. » On dirait le sud, avec ces drôles de nuages ouatés, laiteux, et une mer toujours aussi propice à la glisse. IDEC SPORT va s’y enfoncer aussi loin que la surveillance aux glaces le permettra, « peut-être jusqu’à 59, 60 degré de latitude sud » précise Joyon. Un atterrissage à la pointe la plus australe du continent américain mardi prochain est ainsi envisageable, histoire de fêter Noêl en Atlantique!

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