IDEC passe à l’Ouest
Le maxi trimaran IDEC SPORT a franchi aujourd’hui à la mi-journée l’antéméridien (Le Méridien de changement d’heure), faisant ainsi son retour dans les longitudes Ouest. La Nouvelle Zélande, parée ce week end, n’est plus qu’un souvenir brumeux et froid, alors que Joyon et ses hommes laissent un instant leur imaginaire vagabonder vers les îles Antipodes et Bounty toutes proches. Encore haletant de leur incroyable sprint lancé sous l’Australie, l’équipage reste concentré sur l’analyse des pièges tendus à leur approche par un Océan Pacifique visiblement décidé à se montrer peu coopératif.
IDEC SPORT a franchi aujourd’hui le fameux antiméridien, ce demi-cercle imaginaire qui passe par les deux pôles, opposé du Méridien de Greenwich. Les répétiteurs du bord entament un décompte des degrés en longitude ouest, synonyme déjà, pour les 6 marins du bord, d’un retour vers la maison. Les hommes de IDEC SPORT ont perçu ce matin l’écho radar d’un adversaire bien réel, celui du Maxi trimaran Spindrift 2 lancé lui aussi dans la quête du Trophée Jules Verne. Un bord à bord des plus improbables après plus de 14 000 milles parcourus sur le fond, et qui a ravi l’équipage, heureux de tenir la dragée haute au bateau détenteur du record et ses 14 hommes (et femme) d’équipage.
Satisfaction
L’apparition ce matin d’un écho radar vite identifié comme étant celui du maxi trimaran Spindrift 2, anciennement connu sous le nom de Banque Populaire V, l’actuel détenteur du Trophée Jules Verne, a été vécu comme une récompense pour l’équipage de IDEC SPORT. Au terme d’une huitaine exceptionnelle, marquée par deux records intermédiaires, celui de l’Océan Indien et celui entre le cap des Aiguilles et le cap Leeuwin, Francis Joyon commente : « Nous avons connu une nuit assez difficile, avec un passage dans la mer « douloureux » pour le bateau. C’était brutal. Découvrir ainsi Spindrift 2 si proche, a été une belle satisfaction. Il arrivait tribord, et nous bâbord dans la brume. Les bateaux sont très différents. Parfois Spindrift va mieux que nous, et parfois c’est l’inverse. Idec Sport aime bien le vent fort, car il est léger, avec un centre de voilure plus bas, plus ramassé. »
Pas de soleil depuis 9 jours
« Nous n’avons pas vu le soleil depuis 9 jours! Je crois que cela ne m’était jamais arrivé lors de mes tours du monde précédents!» expliquait Francis Joyon à la vacation radio de ce matin. Détenteur avec Idec du record du tour du monde en solitaire, Francis jette un regard toujours aussi chargé d’étonnement sur le spectacle de ses incroyables aventures. « Depuis Heard et les Kerguelen, nous passons en revue les îles les plus éloignées de la civilisation, avec les îles Antipodes et Bounty aujourd’hui. Pourtant, nous n’en percevons rien tant le brouillard intense nous accompagne avec insistance. » Les conditions de vie à bord du trimaran IDEC SPORT toujours lancé à plus de 30 noeuds ne se sont guère améliorées avec la remontée au delà des 48 degrés de latitude sud. « A bord, c’est toujours régime bonnet-gants » précise-t-il. « Nous n’actionnons plus le chauffage intérieur, pour économiser l’énergie. »
La longue route vers le Horn
En échange permanent avec son routeur météo à terre Marcel van Triest, Francis Joyon et ses compagnons abordent l’Océan Pacifique avec circonspection ; « Il y a plusieurs routes possibles pour rejoindre le Cap Horn, l’ortho, en restant sur le nord des dépressions, ou une route plus courte, plus rapide, mais qui plonge dans les glaces. On hésite… » Un vaste anticyclone au déplacement incertain réduit en effet la stratégie au plus court terme, et c’est la négociation de deux petites dépressions en circulation vers l’est qui mobilise pour l’heure l’attention des hommes de IDEC SPORT. « Deux grandes options s’offrent théoriquement à nous » précise Francis, « entre le contournement de l‘anticyclone par le nord, avec la problématique de plonger à un moment donné vers le sud pour parer le Horn qui se situe par 55 degrés Sud, ou de tenter le diable en passant par le sud, au ras de l’antarctique ». Rien de bien réjouissant ni rationnel en vue donc, et la patience semble être la meilleure attitude à observer, dans l’attente d’une évolution espérée favorable de la situation, les petites dépressions à gérer aujourd’hui et demain pouvant autoriser un retour vers la route directe.