Iceberg frôlé et hautes vitesses
IDEC SPORT a repris 200 milles en 24 heures ! Les Cinquantièmes Hurlants poussent le grand trimaran rouge à grande vitesse dans l’Océan Indien. Mais gare aux icebergs. Hier, l’équipage de Francis Joyon a frôlé un de ces monstres de glace « grand comme un cargo », à moins d’un mille…
Les joies du Grand Sud, on y est. « Hier dans la journée, nous étions totalement dans la brume et nous sommes passés à moins d’un mille d’un iceberg, ça nous a un peu refroidis.» Refroidi n’est peut-être pas le mot le plus approprié eu égard aux températures déjà glaciales par 52 degrés Sud, au cœur de l’océan Indien. Toujours est-il que Francis Joyon, Bernard Stamm, Alex Pella, Clément Surtel, Gwénolé Gahinet et Boris Herrmann ont connu le frisson des glaces hier en fin d’après midi. « Il n’y avait aucune visibilité on voyait environ à 30 mètres (une longueur de bateau, ndr ) » explique Francis Joyon. « On l’a repéré au radar, impossible de percer la brume même aux jumelles. On est passé à côté de cet énorme iceberg sans le voir, à environ un mille. D’après la taille de l’écho sur le radar, il faisait environ 150 mètres, la longueur d’un cargo… »
Un iceberg d’environ 150 mètres
Cette frayeur passée, la bonne nouvelle est venue du renforcement du vent portant. Dans la nuit, un judicieux petit bord de recadrage d’une quarantaine de milles vers le Sud a été très payant. En remettant le cap vers l’Est après cette courte plongée plein sud, IDEC SPORT a retrouvé des vitesses supérieures à 30 nœuds. « Je regarde l’anémo, et là il y a plus de 30/ 31 nœuds de vent réel qui monte à 37/38 nœuds par moments. Du coup, le bateau cavale bien, on est à plus de 30 nœuds en permanence avec des pointes à plus de 35. On est contents. Effectivement, on savait qu’en descendant un peu vers le Sud on retrouverait un peu plus de vent. Nous sommes déjà très bas mais toute notre route dans l’océan Indien va se faire très sud. On imagine descendre peut-être jusqu’à 54 degrés sud.»
Stamm en vidéo : « on est à 39 nœuds… »
On a bien lu. Cinquante quatre degrés Sud c’est très « bas » sur les cartes. Les Cinquantièmes Hurlants nécessitent une veille de tous les instants. « On se relaie toutes les demi-heures à la barre maintenant », témoigne Francis. Car il faut lutter contre le froid polaire qui engourdit les membres et fait geler les visages des six marins d’IDEC SPORT. « Dans l’habitacle heureusement on a un petit système de chauffage qui sert à sécher les cirés et donc à réchauffer un peu la température. Il fait 11 degrés à l’intérieur ».
Sur une vidéo envoyée ce lundi midi, on voit Bernard Stamm, casqué, ganté et emmitouflé dans sa grosse veste de quart qui témoigne tout en barrant le grand trimaran rouge : « là, on est à 39 nœuds et on descend dans le lit du vent. Il faut être vigilant car devant il y a potentiellement de la glace, voilà». Dans l’ombre caractéristique des latitudes australes, IDEC SPORT fonce vers les Kerguelen. L’univers est hostile, humide, glacial… mais les milles défilent de nouveau dans le bon sens.
215 milles repris en 24 heures
La preuve : IDEC SPORT a repris 215 milles sur le chrono à battre ces dernières 24 heures ! L’écart négatif est ainsi passé de près de 800 milles hier à la même heure à 585 milles cet après midi ! Un quart du débours refait en une seule journée…On comprend mieux l’excellente ambiance du bord et pourquoi l’équipage ne s’affole pas. A ces hautes vitesses, tout change très vite et IDEC SPORT devrait signer une journée à environ 700 milles parcourus. « C’est très bon pour le moral » convient Francis Joyon, avant d’expliquer que la prochaine échéance est la négociation d’une dépression tropicale qui se forme dans le sud de Madagascar. Comme toujours, il faudra anticiper. « Je pense que nous aurons une décision à prendre sur le sujet demain soir » estime le chef de bord d’un IDEC SPORT lancé à pleine vitesse. A fond, à travers les limbes glacées d’un Océan Indien enfin coopératif.