Avec l’arrivée à quelques heures de décalage du premier Multi50 et du premier monocoque IMOCA 60 au Brésil, la Transat Jacques Vabre célèbre aussi le doublé à Itajaí d’Erwan Le Roux (cette fois associé à l’Italien Giancarlo Pedote) et de Vincent Riou (avec Sébastien Col) puisque ces deux skippers étaient aussi tenants du titre lors de la dernière édition en 2013… Ces deux duos vainqueurs dans leur classe cumulent plusieurs heures d’avance sur leurs poursuivants immédiats, la brise s’écroulant à l’approche de la ligne d’arrivée.

Multi 50 Fenetrea Prysmian, skippers Erwan Le Roux (FRA) and Giancarlo Pedote (ITA), winner in Multi 50 category in 16d 22h 29mnIMOCA PRB, skippers Vincent Riou (FRA) and Sebastien Col (FRA), winner in IMOCA category in 17d 00h 22mn 24sec, celebration with

Il avait déjà gagné la Transat Jacques Vabre en 2009 comme équipier de Franck-Yves Escoffier sur le même bateau, celui dont il avait supervisé la construction au chantier CDK Composites de Port-la-Forêt. Puis il avait repris ce trimaran de 50 pieds à son compte pour la Transat Jacques Vabre 2013 où il embarquait Yann Eliès comme co-équipier. Puis il s’était élancé sur la Route du Rhum 2014 avant de revenir sur le parcours Le Havre-Itajaí cet automne accompagné de l’Italien Giancarlo Pedote.

Troisième victoire !

Erwan Le Roux a gagné toutes ces courses avec ce même trimaran, dessiné par VPLP et superbement entretenu par son skipper. Trois victoires donc sur la Transat Jacques Vabre pour le Breton reconnu pour sa ténacité sur l’eau et sa disponibilité à terre. FenêtréA Prysmian est aussi le seul voilier à cumuler autant de victoires sur cette épreuve !

Arrivés à 11h 59’ 13’’ (heure française), Erwan Le Roux et Giancarlo Pedote n’ont pourtant pas été épargnés par les soucis techniques puisqu’ils ont dû œuvrer des heures durant pour réparer leur grand-voile déchirée au large de Salvador de Bahia. Le Multi50 avait alors nettement levé le pied pour préserver ses acquis afin de s’assurer la victoire à Itajaí, largement devant ses deux concurrents, Ciela Village ayant dû s’arrêter au Cap Vert pour réparer son étrave tandis que Arkema effectuait une escale technique à Salvador de Bahia pour renforcer sa coque centrale. FenêtréA Prysmian en termine avec plus de 250 milles de marge sur Thierry Bouchard et Oliver Krauss, en 16 jours 22 heures 29 minutes et 13 secondes à la vitesse moyenne sur l’eau de 15,06 nœuds.

Le doublé pour PRB

Pour Vincent Riou et Sébastien Col, le challenge était non seulement de renouveler une victoire arrachée en 2013, mais aussi de démontrer que les nouveaux prototypes équipés de foils pouvaient être tenus à distance avec un bateau de 2010. Démonstration concluante puisque PRB en termine à Itajaí avec plus de 60 milles de marge sur le seul « foiler » ayant réussi à réaliser le parcours de 5 400 milles dans des conditions très variées. Si à la sortie de la Manche, ces nouveaux appendices apparaissaient apporter un net bonus au vent de travers dans la brise, les déficits dans certaines conditions mais surtout le potentiel de PRB remarquablement optimisé au fil des saisons, laissent entendre que les interrogations sur les foils ne sont pas closes…

Car Vincent Riou et Sébastien Col ont parfaitement géré leur course et leur trajectoire, malgré des problèmes redondants d’électronique : dépassés en vitesse pure au vent de travers dans la brise, ils ont joué la stratégie à moyen terme en se déportant au Sud pour passer la première dépression, ont mis du charbon pour dépasser Yann Eliès et Charlie Dalin (Queguiner – Leucémie Espoir) avant les Açores, ont contenu le potentiel de Banque Populaire VIII dans les alizés, tant au Nord que dans l’hémisphère Sud et surtout ont parfaitement négocié un Pot au Noir très long et très gluant…

En 17 jours 22 minutes et 24 secondes, PRB a été 4,45% plus rapide que lors de la précédente édition qui pourtant avait bénéficié de conditions météo idéales. Avec 6 034 milles avalés sur l’eau à la vitesse moyenne de 14,78 nœuds, Vincent Riou et Sébastien Col ont été légèrement plus rapides qu’il y a deux ans en parcourant plus de milles !

Les prochains duos attendus à Itajaí sont deux autres monocoques IMOCA, Banque Populaire VIII (prévu en milieu de nuit française) et Quéguiner-Leucémie Espoir (deux à trois heures plus tard), puis le Multi50 Ciela Village demain jeudi en milieu de journée avec quelques heures d’avance sur les monocoques IMOCA Le Souffle du Nord et Initiatives-Cœur.

Erwan Le Roux, skipper de FenêtréA Prysmian (Multi50)

« Chaque victoire est différente, celle-là a une saveur particulière. C’est trois victoires sur ce bateau. Ça m’a fait remonter beaucoup d’émotions. J’ai pensé à Hubert Desjoyeaux qui m’a accueilli pour construire le bateau avec Franck-Yves (Escoffier). C’est un bel hommage que je veux leur rendre aujourd’hui, c’est grâce à eux tout ça. Le plus bel hommage, c’est de gagner des courses. Je dédie à Hubert cette victoire, c’était un grand homme et un grand constructeur de bateau. Cette arrivée est pleine d’émotions. Ça n’a pas été facile, on a eu des moments difficiles, les 5-6 premiers jours… Nous vivions à plat ventre. Les conditions n’étaient pas forcément dures, mais c’était long. Cinq jours dans une machine à laver, c’est dur. Avec Giancarlo, nous avons réussi notre objectif. Il y avait une belle histoire à construire dès le début. On a cultivé la victoire, on a gagné toutes les courses de la catégorie Multi50. Notre objectif de duo gagnant est atteint ! »

Giancarlo Pedote, co-skipper FenêtréA Prysmian

« C’est magique, je rêvais de cette course depuis 2001. J’étais préparateur sur la course. Tous les soirs, je rêvais sur les quais d’être au départ un jour. Et quatorze ans plus tard, je réalise mon rêve, et en plus de la gagner c’est beaucoup d’émotions. L’arrivée de ma première transat était également au Brésil, donc le mélange de tout ça m’a touché ces derniers 10 milles de course. On a échangé nos sentiments avec Erwan, c’était un bel échange, un beau moment. »

Vincent Riou, skipper de PRB (IMOCA60)

« On savait qu’on partait sur une course engagée, avec dans l’esprit une première partie essentielle, c’est-à-dire de réussir à passer sans encombre et à être dans le paquet de tête au niveau des Açores. Ce qu’on a réussi à faire. Ce fut un beau match, derrière, ils ne nous ont pas laissé beaucoup de répit. Avant hier matin, il n’y a jamais eu plus de 35 milles d’écart entre le premier et le deuxième. Sur une course de 5 400 milles, je trouve que c’est engagé. La Transat Jacques Vabre est pour moi aujourd’hui une grande classique de la voile française. Elle mérite d’être considérée en tant que telle. Nous étions venus clairement pour gagner la course. Ce fut une course éprouvante. Dès la première nuit, nous sommes tombés en panne de centrale de navigation. On a tout fait avec comme seul affichage, la route fond et la vitesse fond. Jamais ni la force, ni la direction, ni l’angle du vent. Nous avons fait tout sans assistance électronique. On me l’aurait dit avant le départ, j’aurais dit non pas question ! Ca ne peut pas marcher. Il faut aiguiser ses sens et se mettre au boulot. Avec le peu de repères, ce n’est pas évident de trouver les bons réglages. »

Sébastien Col, co-skipper de PRB

« Au final, cette avarie d’électronique, c’est une bonne leçon, on se rend compte qu’on est de plus en plus assisté dans la vie en général. L’être humain est capable de faire de grandes choses, de sentir les choses. C’est une belle leçon pour une performance qui est supérieure quelque part. Je me suis rendu compte également à quel point il faut être complet pour naviguer en IMOCA. C’était un plaisir, c’était impressionnant de voir fonctionner Vincent. C’est une chance que j’ai eue de naviguer avec lui. »

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