De tout petits riens
Pas de dimanche, pas de nuit entière dans les bras de Morphée, pas de répit. Alors que les deux Ultime Macif et Sodebo Ultim’ sont amarrés au cœur de la nouvelle Marina d’Itajaí, 23 bateaux bataillent encore entre la latitude de Gibraltar (le Class40 Creno – Moustache Solidaire) et Salvador de Bahia (l’IMOCA 60 PRB). En ce 13e jour de course, la compétition reste plus que jamais ancrée dans les esprits, mais les marins avouent avoir de plus en plus de mal à se lever de leur bannette. La route est bien longue sur la Transat Jacques Vabre, et c’est ce qui rend la régate si belle…
« Il n’y a rien. Pas un souffle d’air. Il y a 0,00 nœud de vent. » racontait Yannick Bestaven (Le Conservateur) à la vacation ce matin. Depuis trois heures, le binôme en tête des Class40 regarde le temps passer, tandis que les poursuivants Carac/Advanced Energies et VandB continuent de progresser à 8 nœuds. Même si leur avance est conséquente (220 milles), Yannick Bestaven et Pierre Brasseur ne sont pas sereins. La bulle sans vent progresse vers le Sud et semble vouloir les emprisonner. Le Pot au Noir dans toute sa splendeur… Lundi sera probablement le jour de la délivrance et des alizés de Sud-Est. En queue de flotte, Creno – Moustache Solidaire doit contourner la dorsale autour de Madère. Près de 1 900 milles séparent le premier du dernier Class40…
IMOCA 60 et Multi50 : grande concentration
« On est focus. On travaille beaucoup sur le moindre réglage, le plus petit décalage de trajectoire, ce sont de tout petits riens. » expliquait Sébastien Col à la vacation. Le couple de « guerriers » sur PRB reste ultra concentré, se croise lors des quarts, travaille sur le pont et à la météo, ne pense qu’à conserver sa place en tête des petits camarades de jeu. La fatigue est bien là, mais peu importe, il faut garder le rythme et s’y tenir. Car si PRB conserve 30 milles d’avance sur Banque Populaire VIII, il pourrait y avoir du grabuge quand le vent prendra un peu de Nord dans son Est. Comprenez que le bateau bleu et blanc devrait accélérer sur ses foils. Mais, le tandem Le Cléac’h/Tabarly ne donne pas beaucoup de nouvelles depuis quelques jours…
Du côté des Multi50, FenêtréA Prysmian fonce à 17 nœuds devant les premiers IMOCA et conserve son avance de 360 milles sur Arkema. Lalou Roucayrol, joint à la vacation ce matin, contrôle Ciela Village à 60 milles dans son sillage. L’homme aux 7 participations à la Transat Jacques Vabre sait aussi que tout peut arriver tant que la ligne d’arrivée n’est pas franchie. Alors il donne tout sur le dernier sprint…
Ils ont dit
Yannick Bestaven, skipper Le Conservateur (CLASS40)
« Cette nuit, c’est grand ciel étoilé mais pas de vent depuis deux ou trois heures donc on prend notre mal en patience et on attend. Nous sommes rentrés dans le Pot depuis hier soir, on avançait à 5-6 nœuds, là il n’y a plus rien du tout et la zone s’agrandit. J’ai peur que ça dure longtemps… Nous nous relayons pour dormir, c’est calme, c’est parfait. On va presque regretter la première semaine ! Notre avance risque de fondre très vite quand on est à 0 nœuds et que les autres continuent… Car derrière le Pot au Noir, ça sera un peu moins compliqué pour eux apparemment. »
Lalou Roucayrol, skipper d’Arkema (MULTI50)
« Nous sommes au reaching entre 20 et 24 nœuds sous un ciel dégagé et une mer plate. On a choisi de se décaler pour ne pas coller à la baie de Rio et rester à l’extérieur mais nous verrons ça demain plus précisément avec les nouveaux fichiers météo. Ca glisse bien en ce moment, notre objectif est de continuer à garder le contrôle sur nos amis de Ciela Village et d’essayer de grappiller des milles à Erwan. Nous restons motivés et à l’attaque, la course n’est pas jouée tant que la ligne n’est pas franchie. Ce qui est pénible sur un 50 pieds, c’est qu’il n’y a pas d’endroit où tu peux vraiment te reposer, et c’est ça qui épuise à la longue. Nous sommes réguliers dans nos quarts donc hormis la fatigue physique accumulée depuis 15 jours, ça va plutôt pas mal… »
Sébastien Col, co-skipper de PRB (IMOCA)
« Ca glisse bien sous une superbe nuit. Nous sommes un peu plus au large, nous avons choisi cette option en passant devant Recife pour bénéficier d’un vent plus stable et nous arrivons à bien tenir la cadence. On a vu que FenêtréA n’était pas loin mais on ne l’a pas eu en VHF. Nous sommes vraiment concentrés sur notre course et la bataille que l’on mène avec Banque Populaire. L’écart reste stable dans des conditions où l’on pensait avoir un peu plus de mal, donc nous sommes plutôt satisfaits. La fatigue s’est installée depuis un moment, mais on arrive à garder notre rythme, ça sera plus compliqué à l’arrivée avec pas mal de manœuvres. Ca va se jouer sur des petits degrés d’angles et des petits réglages. Nous nous complétons pas mal avec Vincent, lui est plutôt sur la météo et il a fait un joli coup en nous amenant plus au large. »