Mi-figue mi-raisin à mi parcours
Ralentissement sur la route d’Itajaí ! La flotte de la 12e édition de la Transat Jacques Vabre se compresse par devant. Les trois premiers IMOCA (Banque Populaire VIII, PRB et Queguiner-Leucémie Espoir) ne sont plus qu’à 250 milles de Sobedo Ultim’ et MACIF, empêtrés dans le Pot au Noir. Derrière, si les Multi50 continuent d’allonger la foulée, les Class40 entre l’île de Madère et l’archipel des Canaries tentent de fuir une dorsale qui se dirige sur leur chemin. Deux phénomènes météorologiques qui vont donner encore plus de piment au match géant qui se déroule en ce moment sur l’Atlantique…
Trimaran SODEBO ULTIM’
Encore 2 300 milles à courir pour les Ultimes, 2 500 pour les IMOCA, 2 700 pour les Multi50 et 3 600 pour les Class40. On vous l’avait dit : la Transat Jacques Vabre a la particularité d’être la plus longue des transats qui n’est jamais existée : 5 400 milles, soit 10 000 km ! Autant dire qu’à mi-parcours, les marins accusent le coup. Jean-Luc Nélias (Sodebo Ultim’) avait une petite voix ce matin à la vacation : « Ca commence à faire grincer les dents, nous sommes fatigués, nous aimerions que ça s’arrête ce Pot au Noir. ». Englués dans le pot pourri, adjectif adopté par les skippers pour parler de la Zone de Convergence Intertropicale, les équipages de Sodebo Ultim’ et MACIF sont sur le pont, à manœuvrer et à barrer pour parer ces changements incessants de direction de vent. Epuisant. Les deux trimarans géants s’observent, se contrôlent même si, comme le dit Jean-Luc Nélias, « c’est la loterie internationale ! » Ce soir, les conditions devraient devenir meilleures. Ce sera alors un grand sprint vers le Brésil…
Vers un nouveau départ dans le Pot en IMOCA
Ca glisse encore pour les monocoques de 60 pieds, mais le trio de tête s’apprête à vivre un grand coup de frein dès ce soir. Banque Populaire VIII, PRB et Queguiner-Leucémie Espoir se tiennent en 26 milles… Un écart qui sera bientôt réduit à une peau de chagrin. Et cela plaît au deux poursuivants du tandem Le Cléac’h/Tabarly, qui naviguent avec l’espoir de sortir en tête du Pot ! « Pour les trois bateaux de tête, le Pot au Noir risque d’être un nouveau départ, il va y avoir un regroupement, il va falloir être habile, c’est une nouvelle course qui commence ! » expliquait ce matin Vincent Riou (skipper de PRB) à la vacation. Dans le sillage des premiers IMOCA 60’, le Multi50 FenêtréA Prysmian déboule à plus 20 nœuds tout en affinant sa stratégie d’entrée de Pot, bien content qu’il y ait du monde devant…
Class40 : chamboulement imminent !
Elle se déplace vite et pile sur leur route… La dorsale va sans doute piéger une partie de la flotte des monocoques de 12 mètres. Si Le Conservateur (Yannick Bestaven/Pierre Brasseur) semble bien loti, derrière l’angoisse envahit les cockpit. V and B, Carac-Advanced Energies, Solidaires en Peloton ASERP et Teamwork 40 pourraient bien être très ralentis. Il ne fait aucun doute que les cartes vont être redistribuées la nuit prochaine. Le bateau brésilien Zetra a choisi de piquer au milieu des Canaries pour réparer en mer un problème d’étai. Ils seront probablement les seuls à apprécier cette période de vents calmes…
Le point sur les arrêts au stand :
- Le Class40 SNBSM – Espoir Compétition (Valentin Lemarchand/Arthur Hubert) est reparti ce jour de Madère à 15h34 (heure française). Les deux marins sont parvenus à réparer leur rail de grand-voile sur le mât qui s’était arraché.
- Le Class40 Creno-Moustache Solidaire fait relâche à Vigo depuis ce matin (4h00 heure française) où son équipe technique est sur place pour réparer une barre de flèche cassée. Thibault Hector et Morgan Launay sont dans l’état d’esprit de repartir en course le plus rapidement possible.
- Le Multi50, Ciela Village (Thierry Bouachard/Oliver Krauss) est en escale à Mindelo au Cap Vert. Les réparations sur le balcon avant et le pont ont débuté ce matin. L’équipage est plus que jamais motivé pour repartir et arriver à Itajaí.
- O Canada (IMOCA) est à La Corogne depuis samedi dernier 2h00 du matin. Eric Holden et Morgen Watson tentent de réparer le rail de grand-voile arraché en tête de mât.
Ils ont dit en mer :
Renato Araújo, co-skipper de Zetra (Class40)
« On va attendre d’avoir une mer plus calme pour faire la réparation de la fixation du génois, parce que c’est un peu compliqué quand ça bouge, c’est à l’étrave. Nous devons mettre de la résine et du tissu. Ce n’est pas si compliqué, mais nous avons besoin d’avoir de bonnes conditions météo pour finir le boulot. Nous n’avons pas besoin de cette voile en ce moment, donc ce n’est pas grave ! Mais nous en aurons besoin plus tard le long des côtes du Brésil et même avant en approche de Fernando de Noronha. »
Giancarlo Pedote, co-skipper de FenêtréA Prysmian (Multi50)
« Notre vitesse moyenne en ce moment est de 20-22 nœuds. Ce sont des conditions vraiment sympas et avec cette mer calme, on a repris de l’énergie et on check le bateau. Nous sommes prêts pour attaquer la suite du parcours. Le passage du Pot au Noir risque d’être intense, ça va être intéressant. Nous y serons probablement demain en début de matinée, ça dépend si le vent reste stable ou pas jusque-là. Nous regardons la trajectoire des IMOCA, on est dessus et du coup cela nous aide à avoir des infos et à préparer notre arrivée dans le Pot. Il y a beaucoup de poissons volants. Je libère tous les poissons volants qui se prennent dans les filets. Je mets le bateau sous pilote et je vais les libérer du trampoline. »
Vincent Riou, skipper de PRB (IMOCA)
« Tout va bien sur PRB, c’est plus cool aujourd’hui, c’est plus reposant. C’est le 1er jour où la vie est un peu plus calme, où on ne navigue pas sous des trombes d’eau. En revanche, nous avons des arrêts fréquents parce que nous sommes entourés de sargasses. On ralentit, on remonte les safrans, il doit également y en avoir dans la quille, mais on ne peut rien y faire. Le Pot au Noir, ce sera pour demain matin, c’est difficile à dire, l’approche a été rapide, je pensais que l’on aurait été ralentis avant. J’ai du mal à me faire une idée pour y rentrer. On sait que les Ultimes ont des difficultés en ce moment. Il reste encore 2600 mille de course, on est à mi-course, et il va se passer encore des choses. Ca va être une fin intéressante. Ca va être beau match, c’est sympa. Pour les trois bateaux de tête, le Pot au Noir risque d’être un nouveau départ, il va y avoir un regroupement, il va falloir être habile, c’est une nouvelle course qui commence. »
Jean-Luc Nélias, co-skipper Sodebo Ultim’ (Ultime)
« Tout va bien à bord ! C’est plutôt studieux et laborieux depuis hier matin. Nous essayons de nous extirper de ce Pot au Noir gigantesque qui nous barre la route de la caïpirinha. Hier, c’était tout bleu, avec pas de vent et une mer d’huile. Cette nuit, ça s’est chargé en nuages mais toujours sur une mer d’huile et depuis ce matin, il y a des orages et de la pluie qui circulent du sud-est vers le nord-ouest, on tourne, on change de voiles. Cette nuit, on a du faire une quinzaine de virements de bord. Le vent reste faible, et tourne comme une girouette. La réalité ne correspond pas à la vision numérique du vent. Ca se passe à 100% sur le pont. Nous sommes fatigués, ça commence à faire grincer les dents, on aimerait que ça s’arrête pour se reposer. Nous barrons 100% du temps, car cela permet aussi d’observer tout ce qui se passe. Avec Macif, on verra à la fin de la foire, c’est la loterie nationale ! »