Récent lauréat de l’Artemis Challenge et surtout de la Rolex Fastnet Race en IMOCA, Vincent Riou est au top de sa forme. De bon augure pour le skipper de PRB qui participera en 2016 à son quatrième Vendée Globe consécutif, douze ans après sa victoire dans le tour du monde en solo. D’ici-là, associé à Sébastien Col, il visera un autre doublé dans la Transat Jacques Vabre, dont le départ sera donné le 25 octobre prochain du Havre. Entretien.

Une victoire dans l’Artemis Challenge, un troisième sacre sur la Fastnet Race : ta semaine britannique a été fructueuse !

Vincent Riou : « Oui, ça valait le coup de se déplacer, c’est le petit plaisir de l’été. Je suis d’autant plus satisfait de ces victoires qu’il s’agissait d’une reprise pour moi : je n’avais navigué que trois jours en IMOCA en 2015, en juin lors d’un stage d’entraînement à Port-la-Forêt. L’Artemis Challenge, un tour de l’île de Wight en équipage, a été une bonne mise en jambe avant l’objectif principal qui était bien la Fastnet Race, une vraie course offshore qui se dispute en double. Les conditions ont été très variables avec des tous petits airs au début puis une bonne brise sur la fin. Et nous avons navigué à toutes les allures. C’était notre première régate ensemble avec Sébastien Col. L’emporter devant neuf autres 60 pieds IMOCA est bon pour la confiance, surtout qu’il y avait de sacrés clients en face comme SMA (ex Macif, Paul Meilhat/Michel Desjoyeaux, NDR), Quéguiner-Leucémie Espoir (ancien Safran, Yann Eliès/Charlie Dalin), Safran (Morgan Lagravière/Nicolas Lunven) et Banque Populaire (Armel Le Cléac’h/Erwan Tabarly). »

La Fastnet Race constituait la première véritable confrontation entre des nouveaux bateaux à foils (Safran et Banque Populaire) et certains des 60 pieds de la génération du Vendée Globe 2012-2013 les plus optimisés, dont fait partie ton PRB. Quel bilan tires-tu ?

« Le bilan est forcément positif pour nous. Je trouve audacieux le choix d’installer des foils. Mais c’est le jeu du prototype d’oser et de prendre des risques. En début de course, Safran et Banque Populaire ont été rapidement distancés au louvoyage dans le petit temps. Tout le monde était au courant qu’ils seraient en difficulté dans ces conditions. Ensuite, aux allures portantes, l’apport des foils n’a pas été flagrant, loin de là. Finalement, nous ne sommes pas tellement plus avancés après cette Fastnet Race. Ce qui est certain, c’est que les bateaux de dernière génération ne sont pas très polyvalents. »

« Les foils ne me font pas rêver. »

L’installation des foils sur PRB n’est donc pas pour tout de suite…

« Non, ça ne me fait pas rêver pour le moment. Il n’y a pas de raison de bouger. Mais nous continuerons à scruter cela de très près. Si on décèle un vrai avantage, nous irons de l’avant. Cela peut arriver plus vite qu’on ne le croit. En rentrant de la Transat Jacques Vabre et de la Transat BtoB (Saint Barthélemy-Roscoff, départ le 6 décembre, NDR), tout le monde sera fixé pour le prochain Vendée Globe. Chacun devra être capable de s’adapter avec le timing et le budget dont il disposera. Aujourd’hui, je suis très content d’être là avec mon PRB. Ce bateau a toujours été rapide et nous l’avons beaucoup optimisé depuis son lancement, notamment l’an dernier lors d’un grand chantier pour passer à la nouvelle jauge et changer les dérives. Il nous a fallu plusieurs années pour avoir un 60 pieds abouti, à la fois rapide et fiable. Tout n’a pas toujours été rose et nous avons payé pour apprendre, subi plusieurs casses. Nous récoltons les fruits du travail d’une équipe qui s’est un peu acharnée. Je connais parfaitement mon bateau, j’ai de vrais repères à bord. Aux autres de bosser maintenant ! »

En début d’été, tu as participé au Tour de France à la Voile en Diam 24. Que retires-tu de cette expérience très différente de la navigation en IMOCA ?

« Je voulais d’abord garder le contact avec le haut niveau. Il n’y avait pas de course programmée en IMOCA et il n’était pas question de rester à quai. J’avais par ailleurs besoin de changer d’air et je suis allé chercher de la fraîcheur. J’ai appris des choses sur ce nouveau circuit, rencontré des jeunes. J’ai par exemple navigué avec Billy Besson, l’un des meilleurs spécialistes mondiaux du Nacra 17. Comme je connais très bien mon 60 pieds, cela ne pose pas de problème d’aller faire autre chose. Je ne suis pas le seul skipper du prochain Vendée Globe à être dans cette démarche. Sur le Tour, il y avait aussi Kito de Pavant et Jérémie Beyou. Jérémie qui avait auparavant participé à la Solitaire du Figaro, tout comme Yann Eliès. Multiplier les supports est toujours instructif. »

Tu défendras cet automne ton titre dans la Transat Jacques Vabre, acquis en 2013 avec Jean Le Cam. Pourquoi as-tu choisi Seb Col, un spécialiste du match racing, pour t’accompagner ?

« Car il cumule beaucoup de qualités. C’est un excellent marin et un metteur au point hors pair. Il est très pointilleux et j’attends de lui qu’il trouve des solutions pour que mon bateau aille encore plus vite. La course au large n’est pas sa spécialité mais il a déjà participé à deux Transat Jacques Vabre (6e en 2007 avec Kito de Pavant, 4e en 2011 avec François Gabart, NDR) et il connaît bien les IMOCA. La Fastnet Race était notre première course… et notre première victoire ! Je pense qu’on s’est bien trouvés. »

Réaliser le doublé ne sera toutefois pas simple face à d’autres marins de qualité…

« Oui, le défi s’annonce relevé. Il y aura probablement plus de 20 bateaux au départ. C’est première fois qu’une transatlantique en IMOCA réunit autant de monde. La Transat Jacques Vabre puis la Transat BtoB nous permettront de nous positionner par rapport à la concurrence avant la dernière ligne droite vers le Vendée Globe. Nous nous côtoyons beaucoup avec nos concurrents à Port-la-Forêt mais nous avons besoin de vraies courses sur de longues distances pour voir ce que nous valons vraiment. Sur ces deux transatlantiques, je vise la victoire et j’ai les moyens de mes ambitions. C’est une chance d’être dans cette position. »

« L’équation à résoudre est tellement complexe pour remporter le Vendée Globe… »

Et l’an prochain, pour le Vendée Globe, on te voit mal jouer autre chose que la gagne…

« Je ne conçois de venir en tant que figurant. J’ai hésité avant de m’engager une quatrième fois. Je voulais être certain d’avoir une chance de l’emporter. C’est le cas, donc je serai là. »

Victoire en 2004, sauvetage de Jean Le Cam en 2008, abandon en 2012. Tu as tout connu sur cette course !

« En trois participations, je suis passé par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. J’espère retrouver la plus belle. Je m’engage avec beaucoup de détachement : l’équation à résoudre est tellement complexe pour remporter le Vendée Globe, il y a tant de conditions à réunir… »

Pour ne rien simplifier, le plateau sera particulièrement dense pour cette huitième édition…

« Oui, et cela me fait plaisir ! Avec 25 à 30 bateaux au départ, on retrouvera un plateau similaire à celui du Vendée Globe 2008-2009. L’épreuve reste attractive, ça redémarre, tout le monde ne voit pas les choses tout en noir. Toutes les conditions sont réunies pour avoir une compétition passionnante. J’espère que les skippers et les teams des nouveaux bateaux trouveront des solutions pour être performants. »

Quel sera ton programme dans les semaines qui viennent, d’ici à la Transat Jacques Vabre ?

« Il y aura déjà trois stages d’entraînement au Pôle Finistère de Course au Large à Port-la-Forêt. Côté course, nous serons au départ du Défi Azimut à Lorient fin septembre. J’ai depuis peu un Moth à foil et dès que j’ai du temps je pars m’éclater sur ce support. Je fais aussi du sport tous les jours, d’ailleurs je rentre d’un gros footing là. La Transat Jacques Vabre va arriver très vite, c’est un peu la course… »

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