Parcours en stade nautique, acte 1, scène 2
Deuxième épreuve de l’Acte 1 du Tour de France à la voile, dimanche, à partir de 11h30 à Dunkerque. Après le raid côtier, vendredi, place aux parcours en stade nautique devant la plage de Malo-les-Bains, dans un vent qui s’annonce d’ouest et de faible à modéré. Un exercice tonique, intense, express, où vont s’opposer les différences culturelles des équipages. Show devant !
La nouvelle formule du Tour de France à la Voile combine, dans chaque ville étape, un raid côtier d’une cinquantaine de milles le premier jour de course, et des parcours en stade nautique le second jour. Ou comment passer d’un exercice de régate classique à des empoignades d’une vingtaine de minutes au contact et dans lesquelles le sens tactique, mais aussi les petits nerfs, sont particulièrement sollicités.
Aujourd’hui samedi, lors des régates d’exhibition courues en stade nautique, l’heure était au questionnement pour tous les équipages, diversement armés. Certains tacticiens sont issus de l’olympisme, d’autres du match racing, d’autres encore sont de purs régatiers quand ils ne sont pas coureurs au large. Tous, avec leurs compétences et leurs (relatives) faiblesses, vont avoir à se croiser sur la ligne de départ, plus décisive que jamais puisque les parcours seront avalés en à peine vingt minutes.
Pour Fabien Henry (Beijaflore Sailing), pur régatier cinq fois vainqueur du Tour de France à la Voile (2001, 2005, 2007, 2012, 2013),
« le départ, c’est au moins 50% de la performance du jour. Je vois bien le schéma des départs de la façon suivante : Les spécialistes du multicoque connaissent la capacité de lancement du bateau sur la ligne, où ils sont à l’aise, tandis que le match racer jouera plus avec les règles de course et le contact. La difficulté, c’est de rester à l’intérieur des parcours et de bien jouer avec les laylines (les trajectoires idéales pour aller virer une bouée, ndlr), ce qui n’est vraiment pas simple avec le Diam 24. Au portant, les laylines bougent très vite avec les différences de pression. »
Deux fois deuxième des championnats du monde de match racing et deux fois troisième du World Match Racing Tour, Mathieu Richard (Engie) est un puriste du jeu sur les lignes.
« Il va falloir jouer des coudes pour le bon placement, d’autant qu’on peut se retrouver à devoir partir sous foc ou gennak’, au vent ou sous le vent. Il y a un gros travail d’analyse de stratégie de départ et des réglages très fins. Après, c’est du sprint, à fond ! Plusieurs familles ont le sens du timing et du lancement du bateau. Le match racer a peut-être un avantage dans les situations de contact : il sait se frotter à l’adversaire en jouant des règles ».
Et les olympiques ?
« On a plus l’habitude des bouées que les coureurs au large, raconte Achille Nebout, le tacticien de Made in Midi, membre de l’équipe de France olympique jeunes de 470. On va plus vite dans l’observation des petits phénomènes locaux, les petites risées qui se dessinent. Le tacticien doit toujours avoir un œil sur ce qu’il se passe derrière le bateau, ce qui n’est pas simple car les bateaux vont très vite. Mais c’est important de le faire, car la moindre décision négative peut coûter 10 places au classement. »
Félix Pruvot (West Courtage – Ecole Navale) a fait 5e aux JO d’Athènes 2004 en laser. Depuis, il a raccroché l’olympisme et est devenu un adepte du Tour. Son opinion sur le problème ?
« C’est vraiment particulier dans le stade nautique, avec le vent de travers. C’est une gymnastique à trouver avec des bateaux qui accélèrent très vite. En régate, on peut aller à la touchette, mais c’est chaud d’y aller en multi, les conséquences sont plus lourdes. A-t-on toujours le choix ? Tout se joue très vite. On l’a vu samedi : les trois premiers arrivent à se détacher après la ligne de départ mais, derrière, la meute se court après et il faut trouver une solution pour sortir du lot ».
Enfin, chez Lafrancedunordausud.fr, on a choisi… de ne pas choisir. Aurélien Ducroz et ses deux compères prendront les options en fonction de l’urgence de la situation. Priorité à celui qui voit le mieux :
« Il faut détecter les risées et deviner les veines de courant qui, par endroits, risquent de jouer un grand rôle. Communiquer, ça sera le jeu, dimanche ». Qui sont les pires sur la ligne de départ ? Il rit de la question : « Les rois du multicoque qui déboulent pleine balle sur la ligne, c’est parfois un peu chaud. On essaie de se mettre dans des situations qui nous mènent vers du vent frais, on en fera autant dans le stade nautique : finir les manches sera une des clés du résultat final ».
Demain, à Zélande, ville d’arrivée de la deuxième étape du Tour de France cycliste, comme à Dunkerque, il sera plus que jamais question de s’extirper du peloton. A la différence près que, dans un stade nautique, c’est bien sur la ligne de départ que tout se joue.