La meute est lâchée et ils ont tous faim. Certains d’en finir et de rentrer dans leurs pénates après plus de trois semaines de course, d’autres de conclure en beauté, une poignée de confirmer leur position au général ou d’y grappiller quelques places encore. Chasseurs ou chassés, ils naviguent au près dans un bon flux d’Ouest/Nord-Ouest vers la pointe de la Cornouaille, qu’ils devraient atteindre demain dans la matinée. Au menu, du louvoyage donc, puis du portant musclé sous spi à l’approche d’un front froid. Il va y avoir du sport !

« Après tout, ce n’est qu’un jeu ! » Faut-il croire Yann Eliès (Groupe Queguiner-Leucémie Espoir) qui pratiquait volontiers l’intox ce matin sur les pontons de la marina de Torbay, sûr de sa science et de sa bonne étoile, alors qu’il est finalement celui qui joue le plus gros dans cette étape : une troisième victoire dans La Solitaire du Figaro-Eric Bompard cachemire, pour rejoindre le club très fermé composé de Jérémie Beyou, Jean Le Cam, Michel Desjoyeaux et Philippe Poupon.
Un peu fébrile sur le premier louvoyage et pointé à la dixième place à la bouée de dégagement, le Briochin avait laissé partir sur la gauche du plan d’eau Vincent Biarnès (Guyot environnement) et Corentin Horeau (Bretagne-Crédit Mutuel Performance). Les deux skippers étaient les premiers à tirer la barre vers le large et à envoyer le spi dans une belle brise d’Ouest de 18 nœuds. Suivaient Yoann Richomme (Skipper Macif 2014) qui a visiblement trouvé la solution pour réparer son transfert de ballast (il avait informé la direction de course d’un problème avant le départ) et Jérémie Beyou (Maître CoQ) qui a une revanche à prendre sur cette Solitaire (5ème au général à 2 heures 5 minutes du leader).
Rondement mené en 45 minutes, le parcours côtier de 5 milles a en tous cas permis aux très nombreux spectateurs anglais massés sur les digues et dans les restaurants en surplomb de la baie, d’admirer la maîtrise des skippers revigorés après quatre nuits réparatrices.

Attaquer dès le départ

Il est un point sur lequel ils étaient d’ailleurs tous d’accord ce matin: Peu importe si le parcours réduit compte encore 470 milles, il faut absolument être devant dès le départ. Lapalissade du coureur au micro ? Non, lucide anticipation de ce qui attend la flotte à partir de mardi. Après une première partie au près, pas forcément propice à créer d’importants écarts, puis un aller-retour express en mer Celtique, le retour en manche s’annonce plus complexe. « Ce qui est certain, c’est que ça va partir par devant » expliquait Charlie Dalin (Skipper Macif 2015), deuxième au général qui joue gros lui aussi « J’ai prévu de m’arracher sur le début de course, de donner mon maximum » L’anticyclone se reconstituant par l’Ouest, il stoppera d’abord la progression de l’arrière de la flotte, ce qui pourrait créer de gros écarts vers l’île de Wight (dernière marque avant de traverser la Manche vers Antifer).
En attendant, la première partie sera au contact. Choix des meilleurs bords et recalages, micro-écarts de vitesse, bonne anticipation des renverses de courants au passage des caps permettront aux plus affutés de créer les premiers petits écarts. Bilan provisoire demain matin quelque part vers Land’s end, le bout de la terre.

Les 10 premiers à la porte Radio France

  1. Vincent Biarnès (Guyot Environnement) à 16 h 46
  2. Corentin Horeau (Bretagne Crédit Mutuel performance)
  3. Jérémie Beyou (Maître Coq)
  4. Nick Cherry (Red Shift)
  5. Alexis Loison (Groupe Fiva)
  6. Adrien Hardy (Agir recouvrement)
  7. Gildas Mahé (Qualiconfort-The beautiful watch)
  8. Sébastien Simon (Bretagne Credit Mutuel espoir)
  9.  Yann Eliès (Groupe Queguiner-Leucémie espoir)
  10. Sam Matson (Chatham Marine)

Ils ont dit :

Yann Eliès (Groupe Queguiner-Leucémie espoir)

«A partir de mardi quand l’anticyclone commence à gonfler, il va nous manger par l’arrière. Le début de course va être important, il y a de petits coups à faire. Il ne va pas falloir être lent non plus. Charlie va bien dans ces conditions, notamment au près. Donc je m’attends à ce qu’il soit devant. Après il reste de petites incertitudes. Le timing du passage du front, faut-il raser la côte ou pas ? Il y a du ressac, du courant… Le front, reste-t-il bloqué sur la terre ou est-ce qu’il glisse… Ensuite, quand passe la bascule au Wave Hub ? A Wolf Rock, le courant fait un angle de 90°, il ne s’arrête jamais, ce n’est pas un aller-retour Est-Ouest comme on connaît. Là aussi, il faudra savoir se positionner. Après, c’est de la pétole, donc ça me convient plutôt bien quand il y a des transitions, qu’il faut faire avancer le bateau avec rien du tout. Si je suis aux avant-postes à ce moment là, ça devrait être plus facile »

Alexis Loison (Groupe Fiva) :

« Il y a moyen de faire des écarts, donc c’est bien et pas bien par ce que je suis à la fois chasseur et chassé. Le modèle européen nous met à Dieppe mercredi et le modèle américain jeudi parce qu’il voit la dorsale se décaler loin dans l’Est, avec la bulle centrée sur le Cotentin ce qui arrive très souvent n’est ce pas !! Dans tous les cas l’arrivée sur Dieppe sera très piégeuse. Ce sont des coins que je connais bien, tout comme la côte anglaise. Et ce sera une bonne révision avant le Fastnet cet été où je vais défendre mon titre avec mon père »

Charlie Dalin (Skipper Macif 2015)

« Je ne vais pas changer ma façon de naviguer. Je suis content d’être là où je suis, je me suis battu sur les trois premières étapes pour me retrouver dans cette position. C’est pas une opportunité qu’on a tous les jours de pouvoir gagner la Solitaire, donc je vais essayer de la prendre. J’ai bien récupéré et rechargé tout ce que je pouvais pendant ces quatre jours, je suis resté dans ma bulle, sans m’éparpiller au vu de cette étape qui ne va pas être simple. Le vent va être assez établi jusqu’au retour au milieu de la Manche et après ça va devenir très compliqué. Ce qui est certain, c’est que ça va partir par devant, donc j’ai prévu de m’arracher sur le début de course, de donner mon maximum. Sur le départ, je préfère du vent bien établi comme aujourd’hui plutôt que les conditions des jours derniers. On va avoir au moins 25 nœuds à Land’s End avec pas mal de mer. Ca va être assez sport, tout l’inverse de la seconde partie de l’étape ! »

Source

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *