Rase-cailloux de nuit, rase-cargos de jour
Deux abandons sont à déplorer sur cette troisième étape de la 46e édition de La Solitaire du Figaro – Eric Bompard cachemire. Au beau milieu de la nuit, le long de l’île de Batz, Benjamin Dutreux (Team Vendée) et Nick Cherry (Redschift) ont talonné sur les cailloux endommageant sérieusement le safran tribord pour le premier, et une varangue pour le second. Ce matin, la flotte menée par Charlie Dalin (Skipper Macif 2015) entame la transmanche, cap sur Wolf Rock au reaching, poussée par 10-12 nœuds de vent. Programme du jour : la négociation des cargos et d’une dorsale qui leur barre la route vers les côtes anglaises.
Cette nuit, les 39 skippers ont pris des risques à vouloir éviter le plus fort courant le long des côtes de Bretagne nord. Pour certains, cette partie de louvoyage au plus près des cailloux s’est soldée par de sérieuses avaries, les empêchant de continuer la course. A 00h12 très exactement, le jeune bizuth Benjamin Dutreux (Team Vendée) annonçait à la direction de course qu’il venait de talonner violemment dans le nord de l’île de Batz. Idem, une heure plus tard, pour le Britannique Nick Cherry (Redschit). Les deux bateaux ont donc fait escale à Roscoff pour tenter de réparer le plus rapidement possible afin de prendre le départ de la quatrième et dernière étape de la 46e édition de La Solitaire du Figaro – Eric Bompard cachemire.
Au beau milieu du rail des cargos
« Nous sommes en train de gérer les croisements avec les cargos au niveau du rail d’Ouessant. Nous avons du en appeler un pour qu’il se décale un peu. » indiquait Xavier Macaire (Skipper Hérault) ce matin à la vacation de 5 h. Les yeux rivés sur les écrans d’ordinateur, les marins contrôlent le trafic grâce l’AIS (Automatic Identification System). Au moment de l’appel du PC Presse, Xavier croisait à 50 m un monstre de 200 mètres ! Même s’ils sont en course, la sécurité et la solidarité demeurent les mots d’ordre. Yoann Richomme (Skipper Macif 2014), 4e au classement de ce matin, avec son anglais parfait, joue le rôle de chien de garde de son groupe et n’hésite par à appeler directement les passerelles de ces immenses bâtiments…
Attention, péage !
Les Figaro Bénéteau 2 commencent déjà à ralentir à l’approche d’une grosse bulle sans vent au beau milieu de la Manche, pile sur la route directe vers les côtes anglaises. La flotte n’aura pas le choix : il faudra traverser cette dorsale, car elle ne bouge pas. Dès le passage de la marque au nord de Roscoff, deux options franches se sont dessinées. Celle de poursuivre sur la route directe comme le gros de la flotte emmené par Charlie Dalin (Skipper Macif 2015) et Yann Eliès (Groupe Quéguiner – Leucémie Espoir), ou celle, beaucoup plus franche, de partir à l’est, comme Adrien Hardy (Agir Recouvrement). L’idée est de sortir de cette zone de molle le mieux positionné possible pour attraper la bascule de vent au nord-ouest. Qui aura raison ? Dans tous les cas, il est fort à parier que l’ordre de sortie de la dorsale ressemblera fort à l’ordre d’arrivée !
Ils ont dit en mer :
Charlie Dalin (Skipper Macif 2015) – 1er au classement de 5h00
« Ca va bien ! Nous avons attaqué la Transmanche et là, je vois plein de lumières de cargos, de porte-containers, je commence le rail montant, il faut surveiller autour. La mer est très plate, le vent est nord-nord est, et j’avance à 7 nœuds vers le nord-ouest. Je suis sous grand-voile, génois et je suis au reaching un peu serré. L’objectif est de trouver le bon compromis et de gérer mes petits concurrents. Ca a été chaud cette nuit, j’ai entendu que Benjamin Dutreux (Team Vendée) avait tapé un caillou j’espère que ça va aller pour lui. C’est vraiment aller au ras des cailloux, nous sommes un peu fatigués donc ce n’est pas toujours simple. C’est un peu chaud le rase-cailloux, j’ai fait attention, je n’ai pas joué avec le feu, ni pris de risques. C’est reparti par devant, j’ai enroulé la bouée chenal 1 avec du vent et le courant avec moi, les autres l’ont passé contre-courant, la flotte s’est étirée, il y a eu une petite transition du vent. Nous devrions toucher la dorsale dans la journée, le vent va avoir une petite droite puis ça va gaucher en mollissant. Il va falloir décider à quel moment virer de bord pour toucher le vent qui sera nord-ouest de l’autre côté. Un passage délicat mais c’est sûrement ceux qui sortiront mieux de la dorsale qui s’en sortiront. J’ai eu un petit coup de mou après le Chenal 1, je piquais du nez mais j’ai réussi à faire deux ou trois siestes donc ca va mieux, avec les lueurs du jour aussi, une belle journée de pétole sous le ciel bleu !»
Xavier Macaire (Skipper Hérault) – 4ième au classement de 5h00
« Ca va, nous sommes en train de gérer les croisements avec les cargos au niveau du rail d’Ouessant. Nous avons du en appeler un pour qu’il se décale un peu. On les a à l’AIS ce qui est pratique pour éventuellement les appeler en cas de besoin et leur demander de modifier un peu leur route. Ca a été cette nuit, cela s’est fait assez naturellement. Mais c’est toujours stressant de naviguer dans les cailloux mais cela n’a duré que 2 ou 3 heures. C’est vrai que l’on prend un peu de risques, c’est assez impressionnant de passer à côté de 20 ou 30 mètres d’un très gros caillou. En ce moment, on doit être sur le pont mais on doit surtout surveiller l’ordinateur et anticiper pour bien prévoir le croisement des cargos. Là, je suis dans le petit groupe qui va bien, Yoann Richomme (Skipper Macif 2014) a un super anglais donc c’est lui qui contacte les cargos. On devrait avoir cet après-midi la dorsale, de la pétole et sortir ensuite dans du vent sud-ouest. Il n’y a pas vraiment de positionnement plus favorable que d’autre, car la dorsale nous barre la route. Là, je fais plutôt une route directe vers Wolf Rock.»