Les derniers 100 milles
Doucement, mais sûrement… La dernière ligne droite, ou presque, est engagée sur la deuxième étape de La Solitaire du Figaro – Eric Bompard cachemire La Corogne-La Cornouaille dans des vents portants de 10-15 nœuds, qui obligent les solitaires à multiplier les empannages. A 100 milles de la ligne d’arrivée à Concarneau, Sébastien Simon (Bretagne-Espoir Crédit Mutuel Espoir), en tête depuis bientôt 24 heures, tient toujours en respect la meute de poursuivants lâchée à ses trousses.
Des durs à cuire à l’image de Yann Eliès (Groupe Quéguiner-Leucémie Espoir), ou de Xavier Macaire (Skipper Hérault) qui progressent en embuscade. Sous spi, les dernières heures de course s’annoncent longues et fastidieuses pour rejoindre Concarneau, où les premiers sont attendus entre 21h et les douze coups de minuit, alors que l’incertitude l’emporte sur les évolutions du vent aux abords des côtes de la Cornouaille.
Des ETA incertaines
La faute à une dépression orageuse qui a pris ses quartiers sur la Bretagne générant ce matin des vents capricieux, très instables en force, et une brume épaisse. De la boucaille, comme disent les marins, qui annonce la couleur pour cette dernière journée à l’échéance incertaine ; avec des ETA (Estimated Time of Arrival) à prendre avec des pincettes, évoluant entre le début (21h) et la fin de soirée (23h30) ce vendredi.
Ce matin, à l’heure où tous les monotypes sont encore gris, la flotte de La Solitaire poursuit sa lente ascension à petite cadence, à des vitesses qui dépasseront difficilement les 7 nœuds tout au long de la journée. Sous spi, les milles défilent lentement pour un final annoncé poussif. Sur l’eau, même si la flotte est encore très dispersée hier sur l’échiquier du golfe de Gascogne, s’est regroupée, les écarts en distance au but se maintiennent avec les dix premiers solitaires réunis en 5 milles.
« Au fond du bus »
La note est, en revanche, toujours aussi salée pour tout ceux, qui avaient misé leur salut au plus près de la route directe. Ils concèdent ce matin entre 13 et 15 milles de retard sur la tête de flotte. « Je suis au fond du bus », confiait hier soir Thierry Chabagny (Gedimat), le leader au classement général, dont la voix cachait mal la déception d’avoir vu la porte du golfe de Gascogne se fermer de manière si brutale devant son étrave. Corentin Douguet (Sofinther-Un maillot pour la vie), Alain Gautier (Generali 40) ou encore Adrien Hardy (Agir Recouvrement) payent aussi les frais d’une option qui leur coûte cher.
De son côté, toujours bien inspiré, Sébastien Simon (Bretagne-Crédit Mutuel Espoir) tient tête, et n’a pas fini de forcer l’admiration dans son sillage. Du haut de ses 25 ans, ce jeune talent du large, qui a décroché hier les honneurs du Trophée Suzuki (porte de passage obligatoire par 45°de latitude nord) tient bon le rythme et la barre d’une deuxième étape menée, depuis le coup d’envoi au large de la Corogne, d’une main de maître. De la belle ouvrage, même si le plus dur reste à faire pour contenir, sur les 100 derniers milles, les assauts de ses plus proches poursuivants qui ne lui laisseront aucun droit à l’erreur…
Ils ont dit :
Sébastien Simon (Bretagne – Crédit Mutuel Espoir) -1er au classement général de 5h00 :
« Ça a l’air de bien se passer pour moi, c’est top ! C’était un peu difficile en début de nuit car nous avions un vent capricieux. On a du faire beaucoup de manœuvres, mais ça va mieux là. C’est chouette de mener la flotte, j’ai stressé un peu, car à un moment ça revenait par l’arrière, mais là ça va. Mais nous ne sommes pas encore arrivés alors je me méfie. C’est loin d’être pas terminé, il reste 100 milles encore. L’échéance, je la vois plutôt ce soir vers 19hTU (21h, heure locale), je verrais bien un « tout droit », mais nos fichiers ont pas mal bougé, donc j’attends la météo de la direction de course pour voir et décider. J’étais en train de dormir. Depuis le début de la nuit, je suis sous pilote mais je garde toujours un œil sur les adversaires. Les plus proches de moi sont Yann Eliès (Groupe Quéguiner – Leucémie Espoir) et Xavier Macaire (Skipper Héraul)t, je me suis placé entre eux et la ligne d’arrivée, je les surveille. Dans la nuit j’ai pas mal parlé avec Yann, c’est sympa et en plus nous avons eu un beau coucher de soleil. »
Yann Eliès (Groupe Quéguiner – Leucémie Espoir) – 3ième au classement général de 5h00 :
« On glisse tranquillement mais sûrement vers Concarneau. On voudrait aller plus vite mais bon … Nous n’avons pas spécialement eu de dorsale cette nuit. Ca s’annonce vers du 10-15 nœuds, avec du vent de sud ouest pour la journée. On voit que la dépression qui est sur la Bretagne n’est pas loin. On ne va pas tarder à passer dessous. Pas de crème solaire pour nous aujourd’hui ! C’est un scénario un peu poussif jusqu’au bout, j’aurais aimé un vent de nord ouest mais ce n’est pas le cas. Là, Sébastien (Simon) est impressionnant, je pensais que nous arriverions à le rattraper, à le manger tout cru et non, il a même creusé encore l’écart, j’espère qu’il va gagner l’étape et aller jusqu’au bout. Une course de chef ! J’aimerais faire juste devant ou juste derrière Xavier Macaire par rapport au général, c’est ma target ! »
Vincent Biarnès (Guyot Environnement) – 4ième au classement général de 5h00 :
« Ca marche bien pour moi. On attaque la dernière ligne droite, 100 milles avant l’arrivée mais cela va tout doucement. Je suis sous spi, à 15 nœuds, on est vraiment pile dans l’axe de la route. On fait des empannages régulièrement au gré des variations de vent. C’était un très bon bord au portant. Ce qui est dur c’est que le vent est revenu par derrière et la flotte s’est compressée. Je suis assez fatigué, je me suis endormi sur le pont tout à l’heure. Les conditions s’y prêtent, donc je vais continuer à faire des siestes. Si on garde cette vitesse je pense être à Concarneau dans 13h00. Il y a quand même 7 à 8 bateaux qui ne sont pas loin de moi et si j’ai l’opportunité j’essayerai d’attaquer sur la fin de cette étape pour monter sur le podium. »