L’appel du Sud
A 21h00 heure française, ce soir, la flotte quittera la Nouvelle-Zélande pour Itajaí, au Brésil. Cette cinquième étape est celle de tous les extrêmes. Avec 6 776 milles, elle est la plus longue mais elle est aussi la plus éprouvante.
Jean-Luc Nélias, navigateur à bord de MAPFRE, résume la situation :
« C’est l’étape la plus froide, la plus engagée, la plus sauvage, avec du vent fort, de la mer froide, des grosses vagues. » Pour le stratège de MAPFRE, cette cinquième étape n’a rien à voir avec les précédentes qui se sont déroulées le plus souvent à proximité des côtes. La sécurité sera donc un paramètre capital à prendre en compte. Même son de cloche pour Pascal Bidegorry (Dongfeng Race Team) qui retrouve sa place à bord du bateau rouge. « Il faut être vigilant, même s’il y a marqué Pacifique sur cet océan, ça n’est pas vrai ! » prévient-il, en homme averti. Malgré plusieurs tentatives, le Basque n’a jamais franchi le Cap Horn et il compte bien faire mentir ce signe indien cette année. Outre les vagues, le vent et le froid, l’un des paramètres les plus importants à prendre en compte sur cette étape est l’éloignement. A Auckland, on répète à l’envi qu’entre la Nouvelle-Zélande et le Cap Horn, il y a un moment où l’être humain le plus proche se trouve dans l’espace, à bord de la station internationale ISS. Autant dire qu’en cas de problème, il ne faudra pas trop compter sur les astronautes pour venir donner un coup de main.
Suivre le départ en live
Le suivi du départ en live débute à 20h45 (heure française), ce soir sur la home page du site, l’application ainsi que sur la chaîne Youtube.
Pascal Bidégorry :
Ce que j’espère sur cette étape, c’est que l’on va naviguer intelligemment dans cette partie du globe. Il y a un moment où l’on est un peu loin de tout. C’est vrai qu’on a peut-être un peu plus de retenue ou de réflexion sur les enjeux et les risques que l’on peut avoir sur l’eau. Il faut être bien vigilant. C’est l’étape la plus dure parce qu’il fait froid, on va aller en bordure des glaces, peut-être qu’on en verra, je n’espère pas. Même s’il y a marqué Pacifique sur cet océan, ça n’est pas vrai ! Toutes les dépressions sont plus marquées, les fronts sont plus marqués, tout ce qui se passe est plus violent et plus actif. La mer est plus grosse. On est dans un coin où les dépressions font le tour du pôle et rien ne les arrête.
On fait un briefing pour expliquer au Chinois ce qui va se passer mais ils ont bien compris que ça ne ressemble pas du tout à ce que l’on a fait avant. Avant, on a navigué dans du petit temps et il faisait très chaud alors que maintenant, on va naviguer dans du vent fort, avec de la grosse mer et il va faire froid. On n’est pas dans la même physionomie de régate et il faut qu’ils se préparent à ça. J’espère que cette fois-ci, le Cap Horn va m’accepter. Je suis passé pas loin plusieurs fois mais que je n’ai pas réussi à en faire le tour. La dernière fois, c’était il y a 14 ans, ici à Auckland sur une étape de la Volvo. On avait démâté et passé 33 jours dans le Pacifique. Ça n’avait pas été une mince histoire. Maintenant, il serait temps. Je ne suis pas complètement focus là-dessus mais il faut bien réaliser qu’il y a 4 000 milles à faire jusqu’au Cap Horn. Il y a des moments où il faudra être à l’attaque. Il y a des moments où il faudra être conservatif mais pas trop. Et après le Cap Horn, il reste encore 2 500 milles pour aller jusqu’à Itajai et il faut que le bateau comme l’équipage soient en bon état.
Dans ma tête, j’essaie d’oublier le classement général, j’essaie d’oublier ce qu’il s’est passé avant. Je cherche à avoir la même attitude que quand on est partis d’Alicante. Je reste persuadé qu’on ne fait pas partie des meilleurs équipages, en tout cas sur le papier. Maintenant, on a un super état d’esprit. Les gens travaillent bien ensemble. Ça c’est notre force. Il faut qu’on continue à cultiver cette façon de faire et peut-être qu’on pourra se surprendre.
Interview de Jean-Luc Nélias :
Pour cette étape, on va aller vite et on va essayer de gagner cette manche. Ça, c’est le résumé, très court. C’est l’étape la plus froide, la plus engagée, la plus sauvage, avec du vent fort, de la mer froide, des grosses vagues. Elle est longue en distance mais courte en temps car les bateaux vont être capables d’atteindre des moyennes supérieures à 18 nœuds. Ce qui n’était pas le cas sur les étapes précédentes où l’on était au près dans du petit temps. C’est une étape radicalement différente. Avec peut-être des icebergs, des tempêtes, le passage du Horn, donc c’est la légende de la Volvo. On a une porte des glaces qui est très sud alors j’ai dit au gars d’aller faire du shopping et d’acheter des vêtements chauds. Il va faire très froid. On va descendre assez sud et dans des eaux qui sont à moins de 4°. Passer quatre heures sur le pont dans ces conditions, c’est dur. On peut se geler les orteils ou les mains donc il faut faire attention. La dernière fois, c’était sur Groupama et on avait passé le Horn en tête. Ça avait été une étape très difficile. Beaucoup de bateaux avaient cassé car les conditions de mer étaient très difficiles. On avait navigué toute une semaine dans des vagues de plus de 10 mètres. Il avait fallu gérer la vitesse du bateau pour arriver en bon état au Cap Horn. Le Pacifique, c’est des grosses vagues, une mer bleue, une lumière intense, des albatros, des icebergs. On va essayer de faire le mieux possible. Déjà arriver en un seul morceau au Horn et le mieux placé possible à l’arrivée à Itajai. On aimerait bien gagner cette manche car c’est une manche importante dans le classement. Si on ne gagne pas, on aimerait bien faire un podium et surtout progresser au classement général. On est 4ème à égalité de points avec Alvimedica et on aimerait bien atteindre le podium maintenant.
Sam Davies (Team SCA) :
L’étape 5, c’est surement la plus dure mais c’est aussi l’étape la plus attendue par tout le monde. C’est l’étape où l’on va dans les mers du sud, où il y a les grandes vagues. On va sûrement avoir beaucoup plus de vent que sur les autres étapes et il y a le Cap Horn. Il y a plein de choses qui font que cette étape est la plus importante de la Volvo Ocean Race. Sur Team SCA, beaucoup de filles ne sont jamais allées dans les mers du sud. Elles ne connaissent pas ces conditions là. On essaie de leur expliquer comment c’est. C’est surtout le froid qui sera difficile.