Slalom spécial
On savait Guillermo Altadill accrocheur. Avec son compère José Muñoz, le skipper de Neutrogena rappelle qu’il faudra compter sur lui. Depuis la nuit dernière, les deux hommes ont enclenché la surmultipliée et ont repris près de 80 milles au leader, Cheminées Poujoulat. Néanmoins, les écarts devraient se stabiliser petit à petit, d’autant que les hommes du sud vont peut-être devoir empanner pour ne pas pénétrer dans la zone d’exclusion située à partir du 45° sud. Toujours est-il que le duel annoncé tient ses promesses. Pour les tandems engagés à la conquête des mers du Sud, la règle du jeu est maintenant claire. Au nord, les hautes pressions synonymes de vents faibles, au sud la zone d’exclusion. Tous vont devoir jouer avec ces deux limites et profiter des bascules de vent au passage des fronts pour trouver l’angle le plus favorable. Le plus habile étant celui qui ne se fera pas piéger le long d’une des deux bordures, au risqu e de voir son adversaire immédiat partir ou de se faire piéger par GAES Centros Auditivos, toujours en embuscade, à une journée de mer des deux leaders.
Les poursuivants sortis progressivement d’affaire
A bord de Renault Captur, on imagine que les sourires sont revenus. Jörg Riechers et Sébastien Audigane, filent à près de 17 nœuds vers ces Quarantièmes qui commençaient à se faire désirer. Derrière eux, We Are Water et One Planet One Ocean & Pharmaton commencent à retrouver des vitesses honorables même s’ils ne sont pas encore totalement libérés des velléités de la dorsale anticyclonique d’étendre à nouveau ses pseudopodes. Enfin Spirit of Hungary continue de filer bon train dans les alizés. Pour l’équipage, comme pour l’intérêt de la course, ce serait une bonne nouvelle que l’anticyclone de Sainte-Hélène ouvre un peu plus grand les portes du grand Sud.
Vendredi, c’est Argo D ay
Mais la grande affaire du jour, c’est sans conteste, l’information donnée par la direction de course aux concurrents, qu’à compter de demain ils pourront larguer les balises Argo embarquées, pour une opération inédite dans le monde de la course au large. Pour la première fois, l’ensemble d’une flotte est sollicité pour participer à des collectes de données particulièrement précieuses grâce à ces fameuses balises qui vont permettre de récupérer des informations lors d’un cycle global de 2000 jours environ.
Chaque tandem a embarqué à son bord les flotteurs Argo (1,7 mètre de hauteur et 22 kilos) qui, une fois jetés à la mer, vont permettre de recueillir des informations capitales révélatrices de la santé de notre planète. Chaque flotteur reste à flot pendant une dizaine d’heures avant de s’immerger aux alentours de 1000 mètres de profondeur pendant une dizaine de jours, pour ensuite plonger à 2000 mètres et enfin rem onter à la surface. Chaque cycle permettra de collecter des données sur la salinité et la température de l’eau à diverses profondeurs. Les balises peuvent répéter chaque cycle environ 150 fois.
La direction de course a rappelé aux skippers les procédures à suivre, notamment pour vérifier si les processus de mise à l’eau ont été respectés. Les skippers garderont le libre choix du moment où ils procèderont à la mise à l’eau de leur balise. Seule obligation : respecter la date d’ouverture de la procédure, ce vendredi 23 janvier.
Rappel : ce programme est initié par l’UNESCO-IOC en partenariat avec JCOMMOPS , Coriolis France et la Fondation Barcelonaise pour la Voile Océanique (FNOB).
Classement à 14h00 TU :
- Cheminées Poujoulat (B Stamm – J Le Cam) à 18 642,0 milles de l’arrivée
- Neutrogena (G Altadill – J Muñoz) à 121,7 milles
- GAES Centros Auditivos (A Corbella – G Marin) à 514,1 milles
- Renault Captur (J Riechers – S Audigane) à 963,2 milles
- We Are Water (B Garcia – W Garcia) à 1308,7 milles
- One Planet One Ocean & Pharmaton (A Gelabert – D Costa) à 1512,3 milles
- Spirit of Hungary (N Fa – C Colman) à 1774,2 milles
Ils ont dit :
Bernard Stamm (Cheminées Poujoulat) :
[quote]On a fait vraiment notre route. C’était notre choix. Si on avait voulu faire cette option sud, on y serait allé plus franchement. Après on a regardé si il fallait contrôler Neutrogena ou pas, mais les choix étaient faits, ce n’était pas possible. On est très content de notre position et de comment ça se passe. Ce n’est pas parce qu’il y a un concurrent qui part de l’autre côté du plan d’eau qu’il faut tout remettre en question. Maintenant on est très bien, on verra après l’Afrique du Sud, le résultat. Les mers du Sud, Guillermo y est, nous on y va à vitesse grand V. Le check du mât, le check du bateau, il faut le faire tout le temps, toujours. Avant chaque période de vent fort, il y aura des moments où on pourra checker le bateau et il faudra le faire. Ces mers usent le bateau. On n’a pas pu encore monter au mât, on n’a pas eu de moments de calme. Chacun apporte à l’autre. On a des manières de faire un peu différentes : pour arriver au même endroit, on prend des chemins un peu différents. C’est comme ça qu’on progresse. Mais globalement on est en accord sur beaucoup de choses.[/quote]
Aleix Gelabert (One Planet One Ocean & Pharmaton) :
[quote]On a dû faire quelques réparations, des bricoles. On est très chanceux pour l’instant. On a trouvé des solutions pour tout ce qu’on avait cassé, on n’a pas trop perdu de temps avec ça. Quand Hugo Boss a démâté, on était très triste. Ils avaient vraiment fait une belle course et on n’a vraiment pas envie que ça arrive à qui que ce soit. C’était vraiment un moment pénible. Naviguer sur un bateau qui a déjà trois tours du monde à son actif, c’est rassurant. On sait que le bateau est fiable. La vérité c’est que ça nous rassure vraiment beaucoup.
Là, on est en train de traverser un front qui devrait générer des changements de vent. Le vent est en train de mollir et les conditions se dégradent avec des averses et un vent très variable. C’était déjà comme ça, cette nuit et tant que l’on n’aura pas quitté cette zone, ça ressemblera à ce qu’on subit actuellement.[/quote]