Tout petit temps pour le départ de la Lorient Horta Solo
A 15 heures, heure supposée du départ de la Lorient Horta Solo, pas un souffle de vent ne venait perturber la quiétude d’un plan d’eau qui manifestait plus d’accointances avec le Léman ou le lac de Neuchâtel qu’avec un Atlantique à la respiration puissante. Si les coureurs prenaient leur mal en patience, le Comité de Course manifestait à juste titre quelques inquiétudes : pétole blanche et ciel couvert sont rarement annonciateurs d’une brise solide. A bord des Figaro Bénéteau, les solitaires en profitaient pour achever une ou deux bricoles pas forcément essentielles, réviser une dernière fois leur stratégie de navigation, prendre un peu de repos dans le cockpit avant une nuit qui s’annonce éprouvante pour les navigateurs.
Car c’est le paradoxe de la pétole de solliciter les organismes. Dans ces conditions, pas question de laisser le pilote diriger le bateau. Il faut être à l’affut de la moindre risée, veiller en permanence sur le plan d’eau : c’est à la barre que les navigateurs ont le plus de sensations et trouvent les meilleurs compromis pour faire avancer leur voilier. Ajoutons à cela, un vent instable par définition et l’on imagine bien que tous s’attendaient à une nuit compliquée et fatigante.
Chassés croisés
C’est finalement à 17h 16mn que le président du comité de course, Jean Coadou pouvait libérer les vingt solitaires dans un vent d’ouest de 5-6 nœuds à peine. Malgré un départ favorable en bout de ligne, plusieurs concurrents choisissaient de partir au bateau comité pour aller chercher un renforcement des vents à la côte. Alors que Milan Kolacek (Bohemia Prahia) et Vincent Biarnes (Guyot Environnement) prenaient le meilleur départ à la bouée, d’autres comme Gildas Mahé (Interface Concept) ou Paul Meilhat (SMA) n’hésitaient pas à partir au bateau comité et immédiatement virer de bord pour plonger à la côte. Au final cette option s’avérait payante, puisque à la pointe du Talus, c’est Gildas Mahé qui menait la danse devant Thierry Chabagny (Gédimat) et Paul Meilhat. Derrière ce trio, plusieurs coureurs se tenaient en embuscade comme Gildas Morvan (Cercle Vert), Xavier Macaire (Skipper Hérault) ou Frédéric Rivet (DFDS Seaways).
Du nord dans la route
Dans ce régime de vents d’ouest à sud-ouest, il apparaissait vite à la sortie des coureaux de Groix que la flotte n’allait pas opter pour l’orthodromie. Aucun concurrent ne se risquait ainsi à raser la pointe de Pen Men pour plonger, route directe au sud-ouest vers les Açores. Bien au contraire, tous continuaient de chercher à gagner dans l’ouest, voire de mettre un peu de nord dans leur route ; la faute à cette dépression orageuse centrée sur la route directe qui incite tous les solitaires à un grand détour par le nord pour éviter les calmes au plus près de son centre. Certains routages préconisaient même un détour jusqu’à la latitude de l’île de Sein. Suivront-ils aveuglément les plans de routage proposés ou certains tenteront-ils de faire de la résistance en essayant de couper le fromage ? C’est l’enjeu de ces premiers jours. D’ores et déjà la grande bataille stratégique est engagée.
Ils ont dit :
Corentin Horeau (Bretagne Crédit Mutuel Performance)
« La Solitaire est derrière nous maintenant. Je vais essayer de confirmer, mais sur ces formats très au large, je suis encore en apprentissage. C’est plutôt quelques chose qui me plait. Je sais que certains sont plus aguerris que moi, mais je vais essayer de me concentrer sur les points essentiels.»
Gildas Mahé (Interface Concept)
« Les Açores ? Je ne connais pas mais je n’en ai entendu que du bien, tout le monde parle d’une escale mythique, donc j’ai hâte d’y aller. J’aime bien ce genre de parcours : le fait que ce soit libre va ouvrir le jeu. Les routages nous font faire un grand tour par le nord pour gagner les Açores et je suis sûr qu’à chaque fichier météo, on va avoir des gars qui vont avoir envie de jouer à pile ou face et d’essayer de grignoter sur la route directe. Ça devrait être vraiment intéressant.