Une première manche… à répétition
Avec cette première étape de 484 milles au départ de Deauville pour une arrivée jugée à Plymouth, les 38 solitaires vont tout de suite rentrer dans le match avec quatre tronçons principaux qui leur font traverser trois fois la Manche ! Capitale pour le classement final parce qu’elle détermine une première hiérarchie, cette première manche donnera le ton… comme ce fut souvent le cas lors des 44 précédentes éditions de La Solitaire du Figaro-Eric Bompard cachemire…
Cela va être une sacrée paire de Manche, cette première étape : d’abord parce que la brise risque fort d’être aux abonnés absents ou à tout le moins faible et très irrégulière. Ensuite parce que même si les courants de marée seront faibles, les passages obligés le long de la côte Sud britannique et de la côte Nord bretonne, rendront les trajectoires très tendues avec peu d’opportunités tactiques. Enfin, parce l’endurance va être le facteur clé de cette première étape puisque les routages actuels donnent jusqu’à quatre jours pour grignoter les 484 milles entre Deauville et Plymouth !
Des statistiques qui parlent
Déjà un paramètre à prendre en compte sur cette épreuve atypique en solitaire et en quatre manches, c’est que seul le cumul des temps de course détermine la hiérarchie finale. Cela signifie qu’un écart important dès le premier quart temps peut être rédhibitoire : plus d’une heure de delta vis à vis du leader plombe en général le classement final, parce qu’il est très difficile psychologiquement de se « remettre » en phase quand la victoire s’éloigne de l’horizon, rendant l’approche des trois autres étapes plus laborieuse.
En fait sur les 44 précédentes « Solitaire », 18 vainqueurs au classement général ont remporté la première étape et sur ces 18 skippers, sept d’entre eux n’ont gagné que la première étape ! Ainsi à 40,9 %, le vainqueur de cette première manche est victorieux au final… Pour cette 45ème édition, ce parcours est en sus très complexe par rapport aux « habitudes » qui emmenaient les solitaires en Irlande ou en Espagne avec donc des parcours très ouverts météorologiquement.
Cette fois, c’est un tracé très côtier en quatre tronçons de respectivement 80 milles pour aller virer Owers (Est de l’île de Wight), 200 milles pour atteindre le phare de Wolf Rock (devant les Scilly), 100 milles pour descendre sur Astan (devant Roscoff) et 100 milles pour franchir le brise-lames de Plymouth. Quelle que soit la direction du vent au départ (du secteur Nord-Nord Est huit nœuds est annoncé à ce jour), il faudra tirer des bords contre le vent, envoyer le spinnaker, enchaîner les empannages, tenir le rythme au vent de travers… Et avec un système orageux prévu, il faudra s’attendre aussi à alterner calmes et grains, soleil et pluie, rotations brusques, brise thermique, regroupements et échappées, redistribution des cartes et jours sans fin puisque les nuits ne durent à l’orée de ce nouvel été, que cinq heures…
En bref…
Un nouveau prix : les 100 milles de la Brittany Ferries
La dernière partie de la première étape (Roscoff-Plymouth) se trouve sur la trajectoire historique des bateaux de la Brittany Ferries qui transportaient les légumes bretons jusqu’en Angleterre. C’est pourquoi la compagnie a désiré s’associer à la 45e édition de La Solitaire du Figaro-Eric Bompard cachemire en attribuant 1 500 € au marin le plus rapide sur ces derniers 100 milles de l’étape (un pointage sera effectué à la marque de parcours Astan dans le Nord de Roscoff et à l’arrivée).
Ils ont dit…
Jean-Paul Mouren (Groupe SNEF) :
« La première étape, c’est un peu comme quand on va plancher sur un examen et qu’on reçoit le sujet. Il faut rendre la meilleure copie possible. Elle est très importante parce qu’elle détermine tout de suite le niveau du gars. Ce n’est pas une course de hasard ici, les meilleurs élèves, ceux qui ont le meilleur carnet scolaire arrivent souvent devant… »
Frédéric Rivet (DFDS Seaways) :
« La première étape, il faut être dans le coup d’entrée de jeu, ne pas se faire distancer, impressionner l’adversaire, prendre le tempo, et tout donner. Il y a quatre étapes, la première c’est 25% du classement général, on ne peut pas passer à côté… »
Alain Gautier (Generali) :
« Est ce qu’elle est plus importante que les autres ? Je n’en suis pas sûr… Mais c’est vrai que sur la première étape, il faut éviter de se prendre un caramel parce qu’après, c’est rédhibitoire. Il faut peut-être moins prendre de risques, essayer d’être plus conservateur. J’en ai fait quinze de premières étapes, donc j’ai des histoires en stock ! »
Charlie Dalin (Normandy Elite Team) :
« Il faut pas la rater la première étape, c’est toujours bien de bien commencer. Il peut y avoir de gros écarts, mais l’objectif, c’est d’être dans le bon paquet tout de suite. Je dois être abonné aux premières étapes avec peu de vent, parce que lors de mes deux précédentes participations, il n’y avait pas de vent ! »
Damien Guillou (La Solidarité Mutualiste) :
« La première étape, ça permet de voir un peu à quelle sauce on va être mangé. Chaque année, les anciens coureurs reviennent, mais d’autres arrivent et progressent. Cela permet de voir comment est le niveau et comment on se situe. Elle permet aussi de se donner des objectifs pour la suite. De savoir ce qu’il va se passer pendant un mois, qui est en forme, qui est devant… »
Erwan Tabarly (Armor Lux – Comptoir de la mer) :
« Une première étape, c’est primordial. Elle lance l’épreuve : on n’a pas le droit de faire une mauvaise étape. Il faut tout de suite marquer le coup, voir où en est. Pour le moral, c’est bien d‘être devant. Même si au total il y en a quatre, c’est toujours mieux d’avoir de l’avance sur la première étape. Par expérience, le vainqueur du Figaro est souvent dans les cinq premiers dès la première étape. Si à l’issu de la première étape, on est dans le bon paquet, on navigue plus sereinement par la suite. »
Gildas Mahé (Interface Concept) :
« Une première étape, c’est bien de rentrer dedans tout de suite. Je pense qu’il faut dès le départ mettre les choses dans le bon ordre, faire un bon résultat… Je garde le souvenir de mon premier Figaro en 2006. La première étape fut très dure, mais c’était exactement ce que j’étais venu chercher et c’est pourquoi je suis là ! »
Sam Goodchild (Team Plymouth) :
« La première étape, c’est la première fois qu’on voit tout le monde en même temps. Une année est passée depuis la précédente édition, et tout le monde se retrouve sur l’eau. En terme de vitesse, de confiance, c’est important d’être tout de suite dans le match. Celle-ci ne s’annonce pas facile. On peut tout perdre rapidement. »
Anthony Marchand (Ovimpex-Secours Populaire) :
« C’est la première régate de la saison où on navigue à près de 40 bateaux. Cela permet de jauger les différences de niveaux entre les concurrents. La manière de naviguer est très différente sur La Solitaire. Tu découvres ton niveau personnel… Mais ce n’est qu’une seule étape, donc il ne faut trop se mettre de pression en plus : il y en quatre… »