La flotte s’est alignée dans le sillage du leader Generali et navigue vent de travers, en direction de la marque de parcours des Canaries. Les premiers y sont attendus dimanche en début d’après-midi. Ce sera alors le premier grand tournant de la course avec d’importants choix stratégiques à opérer : route ouest ou route sud pour rejoindre le terminus de Saint-Barth’.

Vivons heureux, vivons penchés

Changement d’ambiance à 120 milles des Canaries. Ce matin, les grands spis, très sollicités en début de course pendant ces cinq derniers jours de course, ont été mis au repos jusqu’à nouvel ordre. Le vent a refusé (tourné vers l’est) et les 14 Figaro Bénéteau se sont vite retrouvés penchés, au près débridé ou au reaching. Malgré le gris persistant (« on n’a quasiment pas vu le soleil depuis le départ » nous disait Fabien Delahaye), la fraîcheur des températures et même quelques gouttes de pluie, le moral des troupes est excellent. Le dernière nuit, très paisible, a offert une parenthèse de calme aux marins qui, le temps de quelques heures, ont savouré les joies d’une vie « normale » sur un bateau à voile, pour la première fois depuis le départ de la course. Tout le monde est bien reposé. Certains se sont même offerts une douche et un shampoing, de quoi repartir frais et dispo vers le prochain objectif.

RDV à La Palma, dimanche pour le déjeuner

La mission du jour : aller chercher le way point virtuel situé dans le nord de La Palma, une des sept îles volcaniques de l’archipel des Canaries. Les navigateurs devront passer dans ce couloir de 9 milles, en laissant le point GPS à tribord et la terre (notamment, le cap Punta del Roque) à bâbord. Normalement, avec un vent qui devrait refuser pour s’installer face aux étraves des monotypes, il y aura un virement de bord à effectuer dans la soirée ou dans la nuit. Les premiers sont attendus à la marque des Canaries demain dimanche, en tout début d’après midi.

La meute aux trousses

A l’exception de Bretagne-Crédit Mutuel Performance, toujours décalé dans l’ouest, la meute s’est plus ou moins alignée dans le tableau arrière de Generali. Nicolas Lunven et Eric Peron entament leur deuxième journée en tête mais n’ont qu’une très faible marge (0,6 mille) sur leurs poursuivants. Décalés à leur vent, Interface Concept, Skipper Macif et Gedimat naviguent à vue et représentent une menace directe pour le bateau rouge. Mais il s’agit aujourd’hui d’une « simple » course de vitesse vers La Palma. Derrière, le groupe La Cornouaille, 30 Corsaires, Made in Midi et plus loin, Scutum, accuse une quinzaine de milles de retard. Rien de bien méchant après 6 jours de mer et surtout, au regard de ce qui attend les concurrents après le passage des Canaries.

Choisir, c’est renoncer

Dans un monde idéal, à cette latitude, les alizés (vents de secteurs est-nord-est générés par la bordure sud de anticyclone des Acores) sont bien installés. Une fois passées les îles Canaries, les navigateurs n’ont plus qu’à mettre le clignotant à droite, choquer les écoutes, envoyer le spi, et cavaler au portant, direction Saint-Barth. Mais il y a des exceptions à ce bel ordonnancement. C’est le cas cette année. Une dépression orageuse perturbe tout le schéma et c’est avec elle que les 14 tandems devront composer. Dimanche, ils auront un choix crucial à faire : partir dans l’ouest, sur la route la plus directe, mais en se coltinant des vents légers et de face. Ou continuer à plonger dans le sud, pour aller chercher plus bas des vents favorables. Cette deuxième option a un prix : rallonger la route de plusieurs centaines de milles. Or, une fois que les équipages auront fait leur choix stratégique, ils ne pourront plus revenir en arrière. A l’heure qu’il est, les marins sont déjà en train de se gratter la tête devant leurs routages. La journée de dimanche sera à tous les égards, un grand tournant de la course.

LES MOTS DES MARINS

Erwan Tabarly, Gedimat :

[quote]Ca va bien, on est passé au près ce matin, on navigue plus penché que les autres jours. On est à vue avec Macif, on est vraiment collé, du coup on est vraiment concentré, aux réglages, on ne s’ennuie pas… Au portant on était beaucoup à la barre. Là, on reprend nos marques et peut-être, nous mettrons un peu plus le pilote. Ca va changer avant La Palma, on va avoir une grosse bascule, du coup il y aura un virement de bord à faire, ce ne sera pas du tout droit jusqu’à La Palma. Nous allons finir dans du sud-ouest, va falloir bien négocier pour arriver au près à La Palma. Cette dépression casse l’alizé, et du coup, on ne sait pas encore vraiment quelle route on va suivre, j’avoue que je n’en sais encore rien. Nous devrions arriver à La Palma demain midi. Avec Thierry, on discute un peu plus que les premiers jours, nous prenons le temps tout en restant super concentré sur la marche du bateau.[/quote]

Mathieu Forbin, Guadeloupe Grand Large 1, joint à la vacation de ce midi :

[quote]Le tandem fonctionne bien, nous sommes tous les trois, avec le bateau, en forme. On apprend le large, doucement, on essaye de comprendre les évolutions météo… Les conditions en ce moment, c’est particulier, nous sommes au près avec 10-12 nœuds de vent, parce qu’il y a eu une rotation il y a deux heures. Arthur et moi, on est frustré parce que la première nuit, on était au combat avec les autres. Ensuite, nous avons mal géré la sortie du front, et là on essaie de rattraper la tête pour rester dans le match. Nous faisons de notre mieux, on a eu des petits soucis techniques. Nous apprenons le fonctionnement du bateau. Arthur est monté dans le mât pour la drisse. On n’a qu’une seule drisse pour le moment, on va trouver un autre moment pour passer la deuxième. Nous nous alimentons correctement, nous mangeons bien le matin. On fait de bons quarts, on essaye de barrer au maximum. On continue à fond, on ne lâche pas l’affaire ! Pour moi c’est un challenge. Mais tous les deux, nous nous sentons très à l’aise en ce moment, nous avons envie d’avancer, d’optimiser. Arthur est un compétiteur, moi aussi, et ça nous booste que Guadeloupe Grand 2 ait remporté le challenge deux fois.[/quote]

LE TROPHEE DE LA PERFORMANCE

Remporté pour la deuxième fois par François Guibourdin et Nicolas Thomas sur Guadeloupe Grand Large 2, avec 170 milles de parcourus entre le 11 et le 12 avril 12h00.

LE CHIFFRE DU JOUR

7 jours et 35 minutes, c’est le temps qu’avaient mis Erwan Tabarly et Eric Peron (Nacarat) en 2012 lorsqu’ils avaient franchi, les premiers, la marque des Canaries.

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