Patte d’oie
Ils s’y préparent. Le coup de vent annoncé n’est pas encore là, mais tous les solitaires de la Transat B to B y pensent. A bord, on commence à sangler les voiles, à déplacer progressivement les poids vers l’arrière, à ranger et amarrer tout le matériel. C’est aussi le moment de prendre quelques heures de repos avant que ce ne soit la conduite du bateau qui dicte les tranches de sommeil.
Option nord ou sud ? Visiblement, la question n’est pas simple, car la flotte s’est divisée en deux groupes égaux sur deux routes radicalement différentes. Virbac-Paprec 3, PRB, Gamesa et Hugo Boss ont choisi de monter vers le nord pour essayer d’avoir un meilleur angle par rapport au vent quand la course de vitesse sera lancée. Au sud, MACIF, Banque Populaire, Safran et Bureau Vallée ont préféré jouer la carte d’une option plus proche de la route directe. Mais, tous restent plutôt circonspects et n’hésitent pas à renvoyer aux jours suivants quand il s’agit d’analyser la pertinence d’une option ou de l’autre.
Rookie rodé
A bord de MACIF, François Gabart goûte le bonheur tout neuf de mener une flotte d’Imoca. Lui, le rookie de l’épreuve (avec Louis Burton), s’offre le luxe de mettre dans son tableau arrière des clients aussi sérieux qu’Armel le Cléac’h, Mike Golding, Marc Guillemot ou Vincent Riou. On subodorait les capacités d’apprentissage express du jeune navigateur, il les confirme de manière éclatante. Et comme un bonheur n’arrive jamais seul, les vents lui donnent raison, en favorisant sans vergogne les hommes de tête. C’est ainsi qu’en quelques heures, Armel Le Cléac’h, pris dans une bulle sans vent, a vu son rival s’échapper et augmenter subitement son avance d’une bonne trentaine de milles. Mais le navigateur de Banque Populaire en a vu d’autres : la course est encore longue et quelques heures de retard ne sont rien à l’échelle des difficultés qui attendent la flotte.
Une deuxième semaine musclée
Car le programme de la semaine n’a rien de réjouissant. Les solitaires en route vers Lorient vont retrouver des conditions hivernales classiques : vents puissants d’ouest, mer forte et froid mordant vont être au programme. Sans oublier qu’en montant vers le nord, les concurrents allongent considérablement la durée relative de la nuit sur le jour. Si le début de semaine restera maniable, la fin de parcours s’avère particulièrement délicate : les premiers routages des leaders donnent une arrivée dans le golfe de Gascogne par des vents de près de cinquante nœuds. Quand on connaît la réputation de ces parages, notamment à la remontée du plateau continental, on se dit que les dernières heures pourraient être particulièrement délicates. On comprend d’autant plus que l’heure soit aux menus travaux d’entretien et à tenter de profiter des dernières heures tranquilles de sommeil.
Ils ont dit :
Armel Le Cléac’h (Banque Populaire)
« J’ai perdu des milles importants, hier. J’étais coincé dans une sorte de bulle sans vent et j’ai pu voir François (Gabart) partir sans que je ne puisse rien faire. Mais ce n’est pas très grave, la route est encore longue. La priorité, c’est quand même d’arriver à Lorient avec un bateau en bon état.»
François Gabart (MACIF)
« J’aurais mauvaise grâce à ne pas être content. Je me retrouve en tête de la course, alors que quatre jours avant le départ, je ne savais pas si on pourrait partir en temps en en heure. Les gars de l’équipe ont fait un super travail, en rognant cinq minutes de temps par ci, cinq autres par là. La dernière nuit a été contrastée. En début de nuit, le bateau n’avançait pas, il fallait rester vigilant avec les voiles qui battaient, trouver une allure pour ne rien casser. Heureusement, le vent est rentré par la suite et là, le bateau glissait sur mer plate. J’ai pu brancher le pilote et en profiter pour dormir.»
Marc Guillemot (Safran)
«On se prépare aux conditions de vent à venir. Petit à petit, on déplace les voiles vers l’arrière, on range tout ce qu’on peut. Ce n’est pas trop d’effort, parce qu’on y va très progressivement, mais on a parfois l’impression de faire un boulot de déménageur. Concernant le choix de route, je préfère m’engager sur cette option sud plus proche de la route directe. Mais les schémas météo sont complexes, je ne peux pas vraiment dire que j’ai des certitudes absolues. On verra dans quelques jours ce qu’il en sera.»