Après les mondiaux de RS:X, de Nacra et de 470, ce sont les championnats du Monde de Finn qui commencent. Le départ des premières manches sera donné lundi 26 août à Tallin en Estonie. Le plan d’eau, site des épreuves de voile des Jeux olympiques de Moscou en 1980, verra 97 athlètes s’affronter jusqu’au samedi 31 août. Un mois après le championnat d’Europe où ils ont respectivement terminé 6ème et 7ème, Jonathan Lobert, médaillé de bronze à Londres et Thomas Le Breton vont tenter de briguer un podium. Ce mondial haut en couleurs est l’objectif sportif des deux membres de l’équipe de France de Voile Olympique qui figurent parmi les favoris. Les Français vont néanmoins avoir du pain sur la planche car la concurrence sur ce mondial sera rude face à Vasilij Zbogar, Edward Wright et Jan Pieter Postma, les trois médaillés européens (respectivement or, argent et bronze).

Un an après sa médaille, Lobert à la conquête de nouveaux fronts. Entretien avec le médaillé de bronze à Londres.

Quel souvenir gardes-tu de cette journée du 5 août ?

La première image que j’ai, c’est le matin, quand je quitte la cale et que je me rends sur la zone de course. C’est mon moment préféré des Jeux. Je sais que j’ai une chance de réaliser mon rêve et j’aime cette idée de pouvoir relever le défi. Je m’étais fixé un objectif, c’était d’aller aux Jeux et d’être en position de gagner une médaille et, le matin de la dernière course, je sais que c’est possible. Ce sera difficile, mais c’est possible et c’est l’objectif que je m’étais fixé sur les Jeux : tout faire pour être en position de gagner une médaille. Je me retrouve à côté de Ben (Ainslie) et c’est là que je lui dis que la première fois que je l’ai vu à la télé, c’était lors de sa médaille à Atlanta et moi, j’avais 11 ans. C’était sympa de pouvoir aller faire la manche avec lui. Il m’a juste dit de faire ce que je savais faire et que tout se passerait bien. Ça m’a amusé de voir qu’il restait disponible pour me répondre. Je n’ai jamais vraiment été en concurrence avec lui. J’ai toujours aimé terminer devant lui car il est la référence de notre sport. Ce qui m’a frappé, c’est que même lui qui était en route pour gagner sa cinquième médaille d’or, avec une pression de fou, il était encore capable d’être normal. Ça m’a marqué de voir qu’il était encore disponible. Il aurait pu ne pas me répondre. C’est ce qui est sympa dans le Finn. On discute facilement les uns avec les autres. On essaie tous de faire du mieux possible mais ce n’est pas pour ça qu’on ne va pas se parler. Ce n’est pas du tout l’esprit de la classe.
La deuxième image, c’est quand je me dirige vers le podium. C’est très différent de ce qu’on voit d’habitude. C’est très bien organisé. Il faut faire les choses dans un certain ordre, suivre telle personne. C’est très codifié. En même temps, la pression est complètement retombée mais je ne réalise pas vraiment. Je ne me rends pas bien compte du truc sur le coup. En rentrant, je suis allé directement à la presse, j’ai enchaîné sur le contrôle antidopage qui a pris beaucoup de temps. Le temps de me changer et de prendre une douche et c’était le podium. Je n’avais jamais vu ce décorum. Sur les photos, on ne voit que le gros plan alors qu’il y a plein de choses autour. En plus, il faisait beau et le cadre était sympa. C’était très réussi.

Et les jours suivants ?

Je me suis laissé porter par le truc. J’ai profité de tout ce qui était mis en place au club France à Londres et surtout, j’ai trouvé sympa d’être placé au même niveau que les autres sports. Le CNOSF a été génial là-dessus. Il n’y avait pas d’histoire de sports plus ou moins médiatiques. On faisait tous le même parcours et on sentait que tous avait rempli sa part du boulot en ramenant une médaille pour la France. Et c’était ça le plus important.

Aujourd’hui, tu es le seul médaillé olympique encore sur le circuit. Est-ce que ça change le regard de tes adversaires ?

Je sens bien que les concurrents savent que j’ai été médaillé. Leur regard a un peu changé, c’est sûr. Ils ne m’ont pas positionné tout de suite comme un leader incontestable mais ils savent que je peux être là. Quand il y a une liste de favoris, j’en fais partie ce qui n’était pas le cas avant. Je faisais partie des outsiders qui pouvaient faire quelque chose en fonction du vent, du site, etc…

Et c’est plus confortable ?

Sur l’eau, non. Les gars ne me font pas plus de cadeaux qu’avant. Ça n’a pas changé. En revanche, ça m’a permis de devenir plus sérieux dans certains domaines que je laissais peut-être un peu filer. Ça m’a donné un peu plus d’assurance aussi dans certaines situations et m’a permis de m’affirmer un peu plus face aux adversaires. Le fait d’avoir été médaillé et d’être dans les potentiels vainqueurs d’épreuve fait qu’aujourd’hui, j’aimerais bien en remporter une. Monter sur le podium, c’est sympa, je l’ai fait plusieurs fois mais je n’ai jamais remporté de grandes épreuves. Aujourd’hui, c’est mon objectif. Pour relever ce défi, je dois changer des choses et être plus rigoureux dans certains domaines. C’est des choses toutes bêtes comme être au top de la préparation du bateau, essayer de laisser le moins de choses au hasard. Avant, si un bout n’était pas nickel, je pouvais laisser filer mais maintenant, ce n’est plus le cas. Ce serait stupide de rater un championnat pour une casse matérielle.

Cette médaille, t’a-t-elle donné encore plus envie ?

Il y a plusieurs passages. Le premier, c’est de se dire que c’est super d’avoir fait une médaille olympique. Après, je me suis dit que ce n’était que le bronze et que je pouvais faire mieux, et ensuite, je me suis rappelé les efforts que ça représentait. J’ai réfléchi pour savoir si j’étais prêt à renouveler tous ces efforts pour tenter une plus belle médaille. Je sais que le chemin est semé d’embûches mais c’est un vrai challenge et il m’anime tous les jours.

A quel moment as-tu décidé de repartir sur une préparation olympique ?

Quand j’ai quitté Weymouth, j’avais le sentiment d’avoir fait le mieux possible avec ce que j’avais en main à ce moment là. Mais j’avais la sensation que plusieurs domaines pouvaient être améliorés et allaient me permettre de franchir le cap pour viser la gagne. J’avais besoin de me reposer et de faire autre chose mais l’envie est revenue vite. En novembre, j’avais dans l’idée de repartir. Je me suis aperçu que ça me plaisait vraiment de faire du Finn. En Voile Olympique, je n’avais pas d’autre solution et ça m’allait bien car en Finn, je savais que je pouvais faire mieux. Aujourd’hui, ça me plait toujours autant et je ne regrette pas ma décision.
J’ai la sensation que j’ai énormément progressé cette année sur plein de domaines différents. Ça me conforte dans l’idée qu’il y a encore des choses à faire. Le chemin est long mais il peut y avoir des raccourcis. Il faut juste essayer de faire de son mieux et on verra ce que ça donne.

Il y a quatre ans, toi et Thomas étiez très loin du top ten. Est-ce, selon toi, possible de faire le même chemin sur les trois années à venir ?

Le défi est différent. Moi je me positionne dans le top 5 et je veux être dans le top 3. Je sais que c’est un défi difficile à réaliser. Je suis dans l’objectif d’y parvenir et après, il faudra y rester.

Quel est ton objectif sur ce mondial ?

C’est d’essayer de gagner. Maintenant, quand je vais sur une épreuve, c’est pour essayer de gagner. Le faire dès cette année, ce serait génial mais c’est mon objectif pour les trois prochaines années.

Une médaille, ça change la vie ?

Non, je ne vis pas avec, je suis passé à autre chose. Parfois, avec Fanch (François Le Castrec, le coach, ndlr), on en rigole, on se rappelle des anecdotes mais tout ça est derrière moi. La médaille a été une vraie satisfaction et je prends toujours plaisir à en parler mais c’est tout. Je suis seulement un coureur qui veut faire le meilleur résultat possible.

Tu es le seul médaillé français en voile olympique. Comment vis-tu ce statut d’ « exemple » au sein de l’équipe ?

J’en suis content. Ça ne me dérange pas plus que ça et pour moi, c’est un moyen de faire découvrir la voile olympique aux jeunes. C’est un sport formidable, très complet et si je me sens investi d’une mission, c’est celle-ci : emmener des jeunes vers la voile olympique.

Les Français engagés :

  • Jonathan Lobert (SNO Nantes / Equipe de France Militaire)
  • Thomas Le Breton (SR Brest / Equipe de France Militaire)

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