A l’approche du détroit de Gibraltar
A l’approche du détroit de Gibraltar, que les premiers devraient franchir en fin de matinée ce mardi, les multicoques de la Route des Princes tricotent actuellement entre les côtes espagnoles et marocaines, toujours au près, dans 15-18 noeuds de vent et une mer relativement plate. Les Multi50 régatent toujours au contact et naviguent désormais à vue avec le MOD70 Oman Air-Musandam, l’équipage de Sidney Gavignet qui ne compte pas moins de 20 milles d’avance sur son poursuivant direct. Une avance précieuse avant l’entrée en baie de Cadix où les bateaux vont devoir traverser une zone de hautes pressions qui posent bien des questions à bord des bateaux.
Après une nuit lors de laquelle il a fallu composer avec les nombreuses petites bascules de vent, les Multi50, les MOD70 et le Maxi80 de la Route de Princes continuent de tirer des bords en mer d’Alboran ce mardi matin, quasiment à mi-distance entre les côtes marocaines et les côtes espagnoles. Tous bénéficient actuellement d’un bon flux d’ouest soufflant entre 15 et 18 nœuds et filent bon train en direction du détroit de Gibraltar alors que le trafic maritime s’intensifie autour d’eux. Chez les Multi50, la bagarre continue. Actual, Arkema-Région Aquitaine et FenêtréA-Cardinal se tiennent toujours en moins de dix milles au pointage de 6 heures. Et pour cause, tous préfèrent manifestement jouer tactique plutôt que stratégie. Le jeu de la régate continue donc pour les trois équipages qui se suivent en permanence à l’AIS, avec un léger avantage pour Lalou Roucayrol et ses hommes, ces dernières heures. De fait, ils ont en effet parfaitement négocié une petite zone de transition cette nuit, ce qui leur a permis de grappiller quelques longueurs sur le leader, Yves Le Blévec. Pas question de relâcher la pression pour autant, surtout qu’un point de bonus spécial sera attribué au premier bateau à la marque de parcours obligatoire à Gibraltar.
Une baie de Cadix compliquée
Reste que le plus complexe ne sera pas le passage du détroit, programmé en fin de matinée. C’est bel et bien l’entrée en baie de Cadix qui risque de donner du fil à tordre aux marins. « Ca s’annonce laborieux, on ne sait pas trop encore comment on va gérer cette partie » prévient le leader de la classe des 50 pieds. A bord d’Oman Air-Musandam, on s’interroge aussi sur ces premiers milles en Atlantique. Et pour cause, les uns et les autres se dirigent droit sur une dorsale qui va forcément générer des vents faibles et instables en direction, et rendre délicate la remontée jusqu’au Cap Saint-Vincent. Faudra t-il aller jouer au plus près de cet axe de hautes pressions pour être les premiers à bénéficier de la rotation du vent ou, au contraire, se rapprocher au maximum de la côte pour bénéficier des vents thermiques et de la brise de nuit ? Si la décision n’est pas encore prise pour Sidney Gavignet et ses hommes, à bord du trimaran Omanais on savoure les 20 milles d’avance au pointage acquis non seulement grâce à un joli coup après la bouée de Benicarlo, mais aussi hier après-midi, grâce à un décalage à l’est qui leur notamment permis de profiter d’une bonne gauche pour faire route directe vers Gibraltar pendant 4-5 heures et ainsi creuser l’écart. Un coup de maître puisque Sprindrift est aujourd’hui relégué à 20 milles – tout comme le Maxi80 Prince de Bretagne -, tandis qu’Edmond de Rothschild et Virbac-Paprec 70 sont maintenant pointés à plus de 45 milles de son tableau arrière.
Ils ont dit :
Yves Le Blévec (Actual) :
« Nous sommes à l’approche du détroit de Gibraltar. Il y a pas mal de choses auxquelles nous devons faire attention, notamment le trafic maritime, mais il est situé sur une bande pas trop large et on vient d’en sortir. Ça génère beaucoup de rotations et de modifications de vent que l’on essaie d’exploiter au mieux. Là, nous sortons d’une transition dans la nuit qui ne nous a pas été trop favorable car Lalou (Arkema-Région Aquitaine) est revenu sur nous. La flotte est groupée, on se suit à l’AIS en permanence, c’est sympa il y a de la tension. L’objectif, pour nous, était de rester le plus possible au milieu, dans la mer d’Alboran. On s’est aperçu que derrière, nous étions accompagnés. On a vu que les deux autres, Arkema-Région Aquitaine et FenêtréA-Cardinal étaient sur les mêmes routes que nous. On se préoccupe des autres, si l’un des deux était allé près du Maroc ou de l’Espagne, on aurait été inquiet. On a toujours un œil attentif sur les autres. Le vent est revenu, nous avons autour de 18 nœuds. Ce qui est agréable, c’est que la mer est plate. On est toujours au près mais ça marche bien. C’est mieux que ce qu’on avait eu jusqu’à présent. Dans le détroit, il y aura un peu moins de vent mais là, nous avons une pression qui nous va bien et qui permet d’aller vite. Concernant le détroit, on devrait le passer en fin de matinée, donc en heure locale entre 10h et midi. C’est sûr que le point bonus fait partie du jeu mais ce que l’on cherche vraiment c’est à creuser l’écart avec nos concurrents et pour le moment ce n’est pas facile. Nous sommes très groupés. On continue à être en mode régate. On regarde la suite. Après le détroit, le vent sera plus faible et le début de la baie de Cadix va être laborieux. Après, le vent s’installera. Là il faudra tirer les bons bords. Il y aura des petites rotations de vent à gérer et nous devrions arriver au cap Saint-Vincent au milieu de la nuit prochaine. »
Gilles Favennec (Oman Air-Musandam) :
« Nous allons vers Gibraltar, nous avons une bonne pression et tout va bien à bord. Nous ne sommes pas loin des Multi50. Depuis le départ, nous étions devant et à Benicarlo, nous avons réussi à garder le vent un peu plus longtemps que les autres. Quand ça a mollit, on avait tout de même 5-6 nœuds donc nous avons toujours avancé. Le moral est bon mais on s’interroge beaucoup pour la suite car on va droit sur la dorsale. On est content d’avoir les points de Benicarlo et d’avoir pris de l’avance mais on réfléchit à la suite maintenant. C’est pour la sortie du détroit qu’on s’interroge. Nous n’avons pas encore trop décidé vers où passer. Nous naviguons dans du vent d’ouest, c’est un effet local de Gibraltar. On ira dans la dorsale et là nous aurons deux choix : jouer proche pour aller chercher la rotation du vent ou aller près de la côte et chercher le thermique et la brise de nuit. »