Bientôt la bascule
Deux groupes et deux régimes : c’est ainsi que l’on pourrait résumer la situation sur l’eau, ce mercredi matin. Décalé un peu dans l’ouest, un petit groupe de quatre passé hier à l’extérieur du DST au cap Finisterre, est à la peine depuis cette nuit, la faute à un vent très irrégulier. A l’opposé, plus proche des côtes portugaise, le reste de la flotte de la Transat Bretagne – Martinique bénéficie d’un vent plus stable et affiche une meilleure VMG, c’est-à-dire, une meilleure vitesse de rapprochement vers le but. Reste que pour les uns comme pour les autres, un changement de régime radical est attendu au cours de la journée avec l’arrivée d’une nouvelle perturbation.
Toujours en tête au pointage de 5 heures ce matin, à la faveur d’un positionnement plus à l’ouest que le reste de la meute, le petit groupe de quatre composé de Yann Eliès (Groupe Quéguiner – Leucémie Espoir), Damien Guillou (Le Solidarité Mutualiste), Anthony Marchand (Bretagne – Crédit Mutuel Performance) et Corentin Horeau (Bretagne – Crédit Mutuel Espoir), a connu une nuit compliquée, voire « galère » pour reprendre le terme de certains, lâché ce matin, à la vacation. De fait, pour eux, le vent a molli et est devenu très instable au fil des heures. « Un coup on envoyait le spi, un coup on l’enlevait. Un coup on s’arrêtait dans un trou d’air, un coup on repartait. Ce n’était pas facile » a expliqué Damien Guillou, avouant par ailleurs que dans ces circonstances, il n’avait donc pas beaucoup dormi. Pourtant, il le sait, il va falloir être frais et en forme pour attaquer la suite, les conditions météo s’annonçant très difficiles pendant 24 heures entre ce soir et demain soir avec un très fort courant de sud et des vents devant temporairement atteindre le stade la tempête avec une mer démontée.
Ce matin est donc le dernier moment pour faire des forces. Au programme : bien s’alimenter et bien se reposer. L’autre chose qu’il faudra aussi bien faire, c’est choisir de virer de bord au bon moment lorsque le vent va basculer. Pour l’heure, la petite bande des quatre prend son mal en patience et s’interroge sur la progression du reste de la flotte. Celle-ci, décalée plus à l’est, n’a pas été soumise au même régime cette nuit. Emmenée par Erwan Tabarly (Armor Lux – Comptoir de la Mer), elle a profité de conditions relativement stables – malgré de gros grains rencontrés hier en fin de soirée -, qui lui a permis de gagner vers le sud, confortablement sous spi. Malgré tout, depuis 4h30 ce matin, le vent a commencé à refusé pour elle aussi. A présent, tous les solitaires ont affalé les spis et naviguent sous génois et tous attendent la rotation du vent qu’ils vont, de toutes façons, être obligés de suivre.
Ils ont dit :
Damien Guillou (La Solidarité Mutualiste) :
« Cette nuit ça a été compliqué car nous sommes un peu avant la bascule. Le vent a molli et est assez instable. C’est super galère car un coup nous sommes sous spi puis sans spi, un coup on s’arrête puis on repart. J’ai manœuvré toute la nuit et donc je n’ai pas dormi du tout. J’attends que ça bascule. Ce qui nous attend dans pas longtemps, c’est le vent qui va remonter. A l’instant j’ai 8 – 9 nœuds. Là, je devrais virer de bord en bâbord. Ca va monter d’un coup. Selon les fichiers, il y aura 30 – 35 nœuds donc on s’attend à 40 nœuds. On sera au près. Il va falloir réduire la toile. Les voiles ont déjà souffert au premier coup de vent. Il va falloir passer sans casser quoi que ce soit. Le moment où ça va monter ? En fin de matinée, voire en début d’après-midi. Je ne sais pas où je suis par rapport aux autres. Je n’ai pas le classement donc je ne sais du tout où ils sont. J’ai uniquement Bretagne – Crédit Mutuel Performance à côté de moi et je n’ai aucune idée de ce qui s’est passé cette nuit pour la flotte. »
Erwan Tabarly (Armor Lux – Comptoir de la Mer) :
« Nous sommes encore dans une transition. Le vent a molli et il a tourné. Les conditions météo sont calmes. Nous étions sous spi il y a encore une demi-heure. Là le vent a refusé, nous sommes sous génois et nous allons va attaquer un long bord de près. On va être obligé de suivre la rotation du vent, nous n’aurons pas le choix, donc la seule possibilité ce sera de virer de bord en fonction de ce que l’on veut faire et si on veut aller chercher la bascule le plus vite. Je vais réfléchir et me décider ce matin, je vais prendre les classements que je n’ai pas encore regardés car je viens de rentrer dans le bateau, j’étais en train de changer de voile. Je ne sais pas encore où sont les autres. En début de nuit on a eu des grains, de la pluie, beaucoup de vent et pas grand chose après. Nous sommes restés presque une heure comme ça, en fin de soirée avec du vent mou, c’était un peu bizarre. Il n’y a pas énormément de choses à faire si ce n’est de changer de voile et de réduire pour le coup de vent. Ce qu’il faut surtout, c’est arriver avec des forces, donc se reposer avant, et pendant, gérer au mieux la force du vent avec des manœuvres. Il y aura du boulot. Sépalumic et DLBC Module Création sont à moins d’un mile de moi, 0,5 je crois même. J’ai essayé une option pas trop mal dans le passage du DST, je me suis retrouvé un peu derrière puis je suis remonté dans un petit grain. Chacun en profite un peu de temps en temps ».
Anthony Marchand (Bretagne – Crédit Mutuel Performance) :
« Les conditions sont assez irrégulières donc c’est un peu galère. Cette nuit on a mis le spi, nous étions face à l’extérieur du DST. Il n’y a pas de pointage aux concurrents donc je ne sais pas trop ce que les autres ont fait comme route. Je viens de voir qu’ils ont continué à faire du sud et ils ont continué à avancer alors qu’il y avait des zones de molle un peu difficiles à gérer mais on dirait qu’ils ne les ont pas trop eu et au final je me demande si nous, nous n’en n’avons pas eu quelles unes. Là le vent vient de refuser, on est au près en attendant un virement pour aller le chercher de l’ouest une dépression. Je ne peux plus remettre le rail en place mais j’ai fais un truc pour pouvoir naviguer correctement. J’ai fait ça avec un système de bout car là je ne peux plus le remettre en place. Au niveau du vent ça va de 5 à 10 nœuds. Il y aura un virement de bord à bien caler à l’ouest pour aller chercher le sens de la mer, ou en tout cas s’en rapprocher pour aller chercher un dernier virement à l’ouest. Il va falloir regarder le matériel de bord de, remettre le bateau, penser à changer le génois, mettre le solent, prévoir les ris. J’attendais la bascule un peu plus rapidement, j’ai l’impression qu’elle a un peu de retard mais en milieu d’après-midi ce sera du vent assez soutenu, fin de journée c’est sûr on aura du vent. J’essaie pas mal de savoir ce que les autres on fait, ils ont toujours été assez vite il y a des choses à suivre. C’est surtout dans le virement de bord, de bâbord à tribord, une fois que nous aurons touché le vent, celui la va être primordial et les positionnements vont être plus importants. »